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Rassemblement national

Crise au FN: Florian Philippot dans le collimateur des cadres du parti

Florian Philippot le 14 mars 2017 au Parlement européen, à Strasbourg.

Florian Philippot le 14 mars 2017 au Parlement européen, à Strasbourg. - Frederick Florin - AFP

Au-delà du désaccord entre Florian Philippot et Marine Le Pen au sujet de l'association Les Patriotes, c'est aussi la ligne défendue par le vice-président du parti, ainsi que sa personnalité, qui divisent au sein du parti.

Un vent de rupture souffle sur le Front national. Ce mardi matin, le vice-président et la présidente du parti se sont affronté par médias interposés. En cause, officiellement: l'association Les Patriotes créée par Florian Philippot au mois de mai dernier.

"Florian est un dirigeant politique. Il sait, je crois, que la création des 'Patriotes' au moment des législatives a créé une forme d'émoi au sein du Front national, auprès des adhérents, et même certaines inquiétudes", a lancé Marine Le Pen mardi matin sur RTL. "Je lui fais confiance pour lever ces ambiguïtés, pour rassurer les adhérents". Mais derrière la confiance, c'est un avertissement que Marine Le Pen glisse: si Florian Philippot refusait d'abandonner son association, "je prendrai, comme présidente du Front national, mes responsabilités".

Autrement dit: il risque l'exclusion du parti, ou tout au moins la perte de son poste auprès de la direction.

Sur BFMTV et RMC, l'intéressé se défend, et refuse de se voir appliquer "un pistolet sur la tempe". "Je ne comprends pas: d'autres vice-présidents comme Louis Aliot [également compagnon de Marine Le Pen, ndlr] président des associations, et on ne leur dit rien", rétorque-t-il. "Si c'est personnel, il faut le dire!"

La ligne Philippot dans le viseur

Au-delà de l'association, c'est aussi la ligne politique défendue par Florian Philippot qui est remise en question. Souverainiste, fervent défenseur d'une sortie de l'euro, il a usé de son influence pour que cette ligne soit aussi celle défendue par Marine Le Pen aux présidentielles – au point de menacer de quitter le parti si la sortie de l'euro était remise en cause. L'attitude a déplu à certains cadres du parti, qui n'ont pas hésité à parler de "chantage". La mauvaise prestation de Marine Le Pen au débat présidentiel, son score au second tour ont achevé de convaincre les réticents que la ligne Philippot n'était pas celle qu'il fallait défendre, le rendant ainsi responsable de la défaite.

La personnalité du jeune loup du FN est de plus en plus critiquée, son omniprésence médiatique agace. "La politique ne consiste pas à se pavaner à la télévision, elle consiste à être sur le terrain", a lancé Louis Aliot, député des Pyrénées-orientales, dimanche lors de sa rentrée politique. Florian Philippot n'est jamais nommé, mais le message est clair.

Couscousgate

Les tensions se cristallisent de nouveau autour d'une banale photo postée la semaine passée par Kelly Betesh, proche du numéro 2 du FN, sur Twitter: on y voit Florian Philippot partager un couscous entouré de ses proches (Kelly Betesh, l'eurodéputée Sophie Montel...) dans un restaurant de Strasbourg. Aussitôt, une partie des militants frontistes réagit et attaque l'eurodéputé... sur le choix du restaurant.

"Et ça se dit patriote", écrit l'un d'eux. "Dans notre prochain numéro, nous vous ferons découvrir la meilleure choucroute de Marrakech", ironise Pierre Cheynet, un cadre du FN.

"Je reconnais un droit imprescriptible à Philippot de manger du couscous en paix, d'autant que lorsqu'on mange, on se tait!", renchérit, cinglant, Gilbert Collard.

Simples "nuances" ou vraies dissensions?

L'avenir de Florian Philippot se situe-t-il hors du FN? Si certains lui montrent la sortie avec insistance, d'autres voient les tensions d'un mauvais œil: "Personne ne met un pistolet sur la tempe de Florian Philippot", relativise Sébastien Chenu, interrogé sur RMC. "Qui dit qu'il faut le virer? Il a toute sa place au Front national!". Le problème pour lui se situerait uniquement du côté de "l'ambiguité": "défend-il sa boutique avec Les Patriotes ou est-il raccord avec la ligne du FN ?". 

"L'escalade m'inquiète", confie Bruno Gollnisch, pour qui il s'agit davantage de "nuances" internes que de vraies dissensions sur le fond. "Je ne suis pas gaulliste, je suis en désaccord avec Florian Philippot et je lui ai dit, mais c'est un garçon intelligent, qui s'exprime bien. Ce serait dommage pour le parti qu'il s'en aille". Tout en reconnaissant que "si les choses venaient à s'envenimer;, ce ne serait pas la mort du FN pour autant. Florian Philippot a sa place au FN… A condition qu'il ne prenne pas toute la place".

Ariane Kujawski