« Fillon soigne un cancer avec de l'aspirine »

14 euros la tonne de CO2. Soit 3 centimes de plus par litre de carburant. C'est ce que coûtera finalement la taxe carbone. Malgré les compensations promises par François Fillon, les réactions sont vives.

Après des semaines de rumeurs, François Fillon abat ses cartes sur la très débattue taxe carbone. Le Premier ministre dévoile l'essentiel du dispositif, mis en place à compter de 2010 et qui vise à promouvoir les technologies propres, dans une interview qui sortira ce week-end dans Le Figaro Magazine.
Le montant de la taxe sera finalement de 14 euros par tonne de gaz carbonique (CO2) rejeté. Ce qui se traduira par environ 3 centimes de plus par litre de carburant. Le Premier ministre promet de compenser cette augmentation pour les particuliers en baissant soit les impôts soit les cotisations sociales. Il y aura aussi des aides pour ceux qui habitent à la campagne et sont obligés de faire des kilomètres en voiture.

« Une taxe quasiment indolore, ça tue la taxe »

Nette opposition à gauche et fortes réserves à droite, la taxe carbone ne laisse aucun politique indifférent et l'idée d'une fiscalité écologique semble faire consensus. Mais 14 euros la tonne, c'est bien en deçà des préconisations de l'ancien Premier ministre socialiste Michel Rocard, président du comité d'experts sur la taxe carbone, qui avançait le chiffre de 32 euros la tonne de CO2.
Et pour le député européen d'Europe-Ecologie, et ancien porte-parole de la fondation Hulot, Jean-Paul Besset, « c'est plus qu'une déception. Un niveau aussi bas, c'est tuer la taxe carbone dans son contenu. La Contribution climat-énergie doit être instaurée pour dissuader, aussi bien les ménages que les industries, en renchérissant le prix de l'énergie. Si on met une taxe quasiment indolore, on tue la taxe. On a simplement l'affichage que le gouvernement a fait une fiscalité écologique, mais dans son contenu c'est inefficace. »

« Fillon soigne un cancer avec de l'aspirine »

Une déception que partage Jean-Marc Jancovici, ingénieur spécialiste dans les domaines de l'énergie et du climat, qui ne mâche pas ses mots à l'égard du Premier ministre : « je pense que Monsieur Fillon, qui est partiellement en service commandé, n'a pas les idées claires sur les dangers qui nous guettent. Il est comme un médecin qui dit : peut-être que vous avez un cancer, ou peut-être pas ; alors dans le doute, je vais vous donner un cachet d'aspirine. C'est ridicule.
Si démarrer à des montants exorbitants n'est pas souhaitable, le montant que proposait la Commission Rocard - 32 euros la tonne de CO2 - représentait 6 à 7 centimes d'augmentation par litre, la première année et après c'était de l'ordre du centime en plus tous les ans. C'est acceptable et je ne pense pas que Monsieur Rocard soit connu de tous temps pour avoir voulu le malheur du peuple. »

Considérant que la taxe carbone est « un très bon impôt », Jean-Marc Jancovici met en garde : « Si on ne met pas en place cette mesure, le monde va vers des crises, beaucoup plus douloureuses que de payer l'essence plus chère. »

La rédaction, avec Claire Andrieux-Bourdin & Co