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Extrême gauche

Le divorce entre Guénolé et Mélenchon, énième soubresaut ou crise interne qui s'enlise à LFI?

Jean-Luc Mélenchon, entouré de Manon Aubry (à droite) et de Thomas Guénolé (à gauche), lors du meeting de Saint-Brieuc, le 27 mars 2019

Jean-Luc Mélenchon, entouré de Manon Aubry (à droite) et de Thomas Guénolé (à gauche), lors du meeting de Saint-Brieuc, le 27 mars 2019 - Martin Bertrand, Hans Lucas - AFP

La prise de distance fracassante du politologue remet sur la table les accusations d'autoritarisme dont font l'objet, en interne, Jean-Luc Mélenchon et son proche entourage.

"L'affaire Guénolé n'a aucun rapport avec les critiques sur le fonctionnement interne de La France insoumise". C'est, en substance, la réponse martelée par un cadre de LFI, auprès de BFMTV.com, à la suite du communiqué fracassant publié par Thomas Guénolé ce jeudi. Ce dernier y qualifie Jean-Luc Mélenchon d'"autocrate" et fustige le "verrouillage antidémocratique" mis en œuvre au sein du mouvement.

Partagés entre stupeur et agacement, ses cadres estiment qu'il s'agit avant tout d'un contre-feu lié à l'accusation de harcèlement sexuel qui vise le politologue.

"Je n'ai jamais eu aucun contentieux personnel ou politique avec Thomas Guénolé", assure Jean-Luc Mélenchon dans sa réponse à l'intéressé.

L'élue parisienne Danielle Simonnet, en charge du Pôle dit "de vigilance et d'écoute contre les violences sexistes et sexuelles", estime qu'il faut être "nickel" sur ces sujets, et que le politologue cherche avant tout "à n'avoir aucun compte à rendre dans cette affaire de harcèlement". Mais quid des signes avant-coureurs du mécontentement de Thomas Guénolé? "On n'avait rien là-dessus dans nos boucles mail ou Telegram. Rien", jure-t-elle auprès de BFMTV.com.

Le cas Chikirou

Pourtant, les critiques exprimées par l'ex-14e de la liste présentée par LFI pour les élections européennes (il y a été remplacé par Sergio Coronado) sonnent comme un écho à celles d'autres anciens membres. En juillet dernier, c'était l'économiste Liêm Hoang-Ngoc qui quittait le mouvement après avoir été écarté de la liste provisoire pour le scrutin. Il reprochait au comité électoral de fonctionner de manière trop verticale et de s'appuyer avant tout sur les décisions de Jean-Luc Mélenchon et son cercle rapproché.

À savoir, entre autres, la communicante Sophia Chikirou, dont l'implication dans les travaux de La France insoumise provoque des remous, liés à son rôle à la fois dans la crise qu'a connu Le Média, la web-télé mélenchoniste, et dans le financement de la campagne présidentielle de 2017.

"Petits arrangements"

En novembre, ce fut au tour de Sarah Soilihi, porte-parole de LFI, de partir rejoindre Benoît Hamon en fustigeant, auprès de Libération, les "petits arrangements entre amis" qui détermineraient les choix du mouvement. Quelques jours plus tard, c'est une insoumise historique, Charlotte Girard, qui s'est mise en retrait en pointant du doigt les "conditions d'organisation" de LFI. Longtemps pressentie pour être tête de liste en binôme avec Manuel Bompard, elle a finalement opté pour une place non-éligible... la dernière.

Comme l'avait relaté à l'époque une enquête du Figaro, cet épisode trouve à sa racine de vraies tensions avec le sommet de la pyramide, où Sophia Chikirou se trouve toujours solidement ancrée.

"On est toujours en chantier"

Reste, enfin, les départs forcés de François Cocq et Djordje Kuzmanovic, "orateurs nationaux" bannis pour leurs positions jugées trop souverainistes, trop à droite. Dans une tribune publiée dans Marianne, le second avait qualifié LFI de "formation politique gazeuse", reprenant à dessein un terme utilisé un temps par Jean-Luc Mélenchon. Aujourd'hui, Thomas Guénolé le brandit également, y voyant une manière d'assurer au chef et à son entourage une emprise ferme sur le mouvement.

"Comme toute formation jeune, on a un fonctionnement qui se cherche en permanence. On est toujours en chantier", reconnaît Danielle Simonnet, d'après qui aucun parti n'est exempt de ce genre de soubresaut. Et l'élue LFI d'ajouter: "Mais il nous reste beaucoup de taf à faire en interne. On essaie d'interroger les méthodes d'éducation populaire que nous avons initiées, par exemple".

L'éducation populaire, un secteur dont Thomas Guénolé avait la responsabilité jusqu'à maintenant via l'école de formation militante de La France insoumise.

Jules Pecnard