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Élysée

Humour et franc-parler, le show de Macron devant les étudiants au Burkina Faso

Emmanuel Macron a débuté ce mardi sa tournée africaine par un discours devant un parterre d'étudiants à l'université de Ouagadougou, au Burkina Faso. D'abord solennel, il a ensuite adopté un ton vif et très direct, parfois avec des pointes d'humour, jusqu'à afficher une certaine familiarité vis-à-vis de son auditoire et du président burkinabé.

A l'université de Ouagadougou, capitale du Burkina Faso, ce mardi, devant un public d'étudiants, Emmanuel Macron a manié un style direct, très à l'aise devant des représentants de la jeunesse africaine. C'est d'abord par la solennité qu'il a cherché à gagner l'attention de son auditoire. Faisant référence, à l'ouverture de son discours, à "l’avenir que vous osez inventer, selon la belle formule de l’un de vos compatriotes", le chef de l'Etat a invoqué le souvenir du héros national, révolutionnaire et président du Burkina Faso dans les années 80, Thomas Sankara, déclenchant les vivats de l'assistance.

L'atmosphère s'est encore réchauffée lorsqu'il s'est exclamé: "Je ne suis pas venu vous dire quelle était la politique africaine de la France, car il n’y a plus de politique africaine de la France!"

Le président Kaboré sur le gril

Dans sa volonté de faire un pas de côté vis-à-vis d'une interprétation postcoloniale de sa parole, il aussi renvoyé son public, lors de l'échange informel qui a suivi son discours, à ce qu'il estime être ses propres responsabilités. Alors qu'on le sollicite sur les problèmes de climatisation de l'établissement universitaire où tous s'étaient réunis, Emmanuel Macron s'étrangle: "Mais vous m’avez parlé comme si j’étais le président du Burkina Faso! Et quelque part, interrogez-vous, en tant qu’étudiants, sur le sous-jacent psychologique qu’il y a derrière votre interpellation et l’enthousiasme que ça a créé."

Il a poursuivi dans une atmosphère chahutée: "C’est quelque part que vous me parlez comme si j’étais toujours une puissance coloniale mais moi je ne veux pas m’occuper de l’électricité dans les universités du Burkina Faso. C’est le travail du président." La salle en a alors appelé au président Kaboré, lui-même présent. Le chef de l'Etat français s'est même laissé aller à tutoyer son homologue burkinabé: "Du coup, il s’en va… Reste-là! Du coup, il est parti réparer la climatisation." Un tutoiement qu'Emmanuel Macron a aussi employé avec les étudiants. 

Evoquant quelques minutes plus tard la zone Franc CFA, le Président a une nouvelle fois mis son partenaire sur le gril et l'a exposé aux rires de ses concitoyens: "Si le président Kaboré décide demain qu’il n’est plus dans la zone Franc CFA, il n’y est plus. Donc, dès qu’il aura réparé la climatisation de l’amphithéâtre, il sortira de la zone Franc CFA, vous l’avez compris."

Une salle réactive

Une question sur l'actualité lui a permis de glisser, toujours de manière familière, un message à la foule:

"Qui sont les trafiquants en Libye? Posez-vous cette question en tant que jeunesse africaine! Vous êtes incroyables! Qui sont les trafiquants? ce sont des Africains, mon ami! Ce ne sont pas des Français qui sont en train de faire les passeurs en Libye. Il faut qu’on prenne nos responsabilités tous pour les démanteler. Mais arrêtez aussi dans ce discours qui consiste à dire: le problème c’est l’autre."

Macron et les "super paradoxes"

Distribuant la parole, appelant au calme, Emmanuel Macron s'est parfois mué en chauffeur de salle. Adoptant parfois la position du commentateur amusé, un brin professoral: "Je connaissais les étudiants français, qui sont déjà es esprits paradoxaux mais vous, vous êtes des esprits super-paradoxaux parce que vous râlez pour avoir la parole et puis vous râlez dès que quelqu’un la prend en disant que les questions sont mauvaises!"

Sur un sujet d'ailleurs éducatif, en l'occurrence son intention de demander aux ambassades françaises en Afrique de proposer des bourses d'études vers l'Hexagone en priorité aux filles, il a pu encore mesurer la réactivité des spectateurs chez qui on a alors perçu quelques flottements. "N’ayez pas peur. Je n’ai pas dit qu’il n’y en aurait que pour les jeunes filles. J’entendais cette mâle réaction visant à protester", a-t-il souri. 

A son arrivée dans le pays, le convoi d'Emmanuel Macron a été caillassé. En sortant, le président de la République française a tout de même pris un bain de foule. Il doit poursuivre sa tournée africaine en Côte d'Ivoire et au Ghana. 

Robin Verner