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Confrontation, démonstration et communication: quand Macron va au contact des Français

Emmanuel Macron au contact des Français et des cheminots en colère, le mercredi 18 avril à Saint-Dié-des-Vosges.

Emmanuel Macron au contact des Français et des cheminots en colère, le mercredi 18 avril à Saint-Dié-des-Vosges. - BFMTV

Le président n'est-il jamais autant dans son élément qu'au contact souvent houleux, parfois rugueux, avec les français? Les exemples de cet exercice d'équilibriste ne manquent pas.

La "câlinothérapie", très peu pour lui. Emmanuel Macron va "au contact". C'est vrai avec les journalistes, comme lors du "débat démocratique" du dimanche 15 avril sur BFMTV. C'est surtout vrai, sur le terrain beaucoup moins balisé, de ses confrontations avec les Français. Le dernier exemple date de ce mercredi même, dans les Vosges. Face aux éditorialistes, autant que face aux cheminots en colère, le président "assume". 

"Je ne me cache pas, je ne vais pas me calfeutrer", a-t-il lancé mercredi à Saint-Dié-des-Vosges, sur un air de déjà entendu.

Durant près de trois heures, le président a arpenté le centre de Saint-Dié, une sous-préfecture qu'il avait choisie pour promouvoir le plan "Action cœur de ville" de revitalisation des villes moyennes en milieu rural. Initialement bien accueilli par quelque 200 habitants, il a été ensuite interpellé et hué par un groupe de cheminots de la CGT qui ont crié "Cheminots en colère, on va pas se laisser faire" lorsqu'il est sorti de la mairie.

Multirécidiviste

Ce n'est pas la première fois qu'Emmanuel Macron fait front pour écouter les mécontents. A croire que l'adversité produit chez lui un effet stimulant, un regain de volonté d'affirmer encore plus fortement (et plus longuement) ses convictions. 

Le samedi 24 février au Salon de l'agriculture, il avait été accueilli par des sifflets. "Je vous engueule parce que je n'aime pas qu'on me siffle derrière", avait-il immédiatement interpellé le président. La visite bercée de polémiques et d'échanges musclés avec les "paysans en colère" s'était éternisée 13 heures durant.

Encore, le 9 février avec une demandeuse d'asile marocaine qui l'avait hélé en marge de l'inauguration de la campagne hivernale des Restos du Cœur, il avait répondu, très cash: "Il faut protéger les gens très faibles qui sont en insécurité chez eux, mais si vous n'êtes pas en danger dans votre pays, il faut retourner dans votre pays."

En réalité, cette manière d'enter dans la mêlée, Emmanuel Macron l'avait déjà adoptée alors qu'il était candidat. Deux jours avant le second tour de la présidentielle, il répétait sur RTL ce qui résonne maintenant comme une antienne: "Je vais au contact, je ne me calfeutre pas dans une voiture."

Casser l'image de président des riches?

"Le président est en campagne", fait remarquer Thierry Arnaud, chef du service politique de BFMTV. Mais qu'on ne se trompe pas sur ses intentions. "Il n'espère pas convaincre (le cheminot qui lui fait face), mais il veut démontrer devant les caméras, devant ceux qui le soutiennent qu'il est là." "Il va au contact pour montrer qu'il n'a pas peur de ses opposants. Il montre qu'il a repris les choses en main. Si vous me permettez l'expression, il va au charbon", renchérit Laurent Neumann, éditorialiste pour BFMTV.

Outre l'argument d'occupation du terrain, d'une virilité politique, ces manœuvres visent aussi, relève Laurent Neumann, à casser "l'image de président des riches" qu'il s'est involontairement forgée auprès d'une frange de la population, notamment avec la réforme de l'impôt sur la fortune.

Le troisième argument, presque uniquement rhétorique, est celui de la pédagogie. Là où Nicolas Sarkozy versait dans l'invective et où François Hollande était rattrapé pas l'impossibilité du "président normal", Emmanuel Macron explique inlassablement. Selon Bernard Sananès, président de l'Institut Elabe, "il est pour beaucoup de ceux qui le soutiennent le meilleur pédagogue des réformes qu'il veut mener".

N'y a-t-il que du positif à ces apparitions en mode commando? Si Benjamin Griveaux, porte-parole du gouvernement pense sans surprise qu'il est "normal d'aller au contact, d'expliquer", les opposants n'ont pas la même lecture. Pour Guillaume Pelletier, député Les Républicains de Loir-et-Cher, le président révèle une faiblesse en "se croyant obligé de se mettre en scène".

David Namias