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2017: contre l'extrême droite, Hollande envisage une grande coalition à l'allemande

Rencontre entre François Hollande et Angela Merkel le 15 septembre 2016 à l'Elysée.

Rencontre entre François Hollande et Angela Merkel le 15 septembre 2016 à l'Elysée. - Eric Feferberg - AFP

Dans une interview à la revue Le Débat, le chef de l'Etat évoque jeudi la formation d'une grande coalition à l'allemande. Non sans risques, elle permettrait de faire face à la menace de l'extrême droite.

A quelques mois de l'élection présidentielle, François Hollande fait un pas de plus vers une candidature. Dans un entretien au Débat, publié par Le Monde, le chef de l'Etat expose longuement le bilan de son quinquennat, sa vision de la gauche, du libéralisme et de la situation politique française. Et se tourne vers le futur.

Un futur qui risque d'être difficile, François Hollande ne s'en cache pas. Le Président admet que "la gauche de gouvernement est contestée sur sa gauche, par la droite et l'extrême droite", mais assure croire encore au clivage traditionnel entre la gauche et la droite, "fondateur de la démocratie".

"J'ai besoin de partenaires et d'alliés"

"Une autre société, une autre Europe, un autre monde sont possibles", poursuit François Hollande. Mais pour cela, ajoute-t-il, "j'ai besoin de partenaires et d'alliés". Le chef de l'Etat appelle de ses vœux "une coalition" du même style que la grande coalition allemande réunissant sociaux-démocrates et chrétiens-démocrates au pouvoir, présidée par Angela Merkel. Là où selon François Hollande "le président français ne bénéficie en réalité que d'une assise étroite dans le pays, le gouvernement d'Angela Merkel représente aujourd'hui près de 70% des électeurs".

Plus loin, il évoque parmi les réponses à la montée du FN "une large alliance dépassant les clivages", tout en admettant que la conséquence directe serait "donner à l'extrême droite la possibilité d'apparaître comme seule alternative. Ce serait la conduire tôt ou tard au pouvoir." Pour autant, François Hollande poursuit son bilan, et évoque l'un de ses regrets du quinquennat: "la difficulté d'introduire des rapports de travail réguliers entre la gauche et la droite pour appréhender les grands sujets d'intérêt général".

Une possible restructuration du jeu politique

Ce n'est pas la première fois que le chef de l'Etat montre son admiration pour le système politique allemand. En décembre 2013 déjà, alors qu'Angela Merkel venait de former son gouvernement, le chantre de la synthèse louait le compromis à la mode allemande entre la CDU et le SPD. "C'est équilibré", avait-il fait remarquer dans l'avion au retour de Berlin.

"François Hollande le dit clairement, il préfère le clivage gauche-droite, mais il est obligé de regarder la réalité en face, les circonstances difficiles que vit le pays", note le politologue Olivier Rouquan. "Donc il cherche à sensibiliser son camp et celui de l'opposition à une possible restructuration du jeu politique". Une coalition présentée d'ailleurs par le Président comme s'il en était le dirigeant naturel: "Pour réformer le pays, sur qui puis-je compter?", feint-il de se demander dans une interrogation rhétorique.

François Hollande aura-t-il le choix?

En France, l'idée d'une grande coalition était possible sous la IVe République, mais n'a jamais été possible sous la Ve République. "La logique d'affrontement du mode de scrutin majoritaire uninominal à deux tours interdit une grande coalition", explique le politologue Pierre Martin dans La Croix. Le système allemand, proportionnel, offre davantage de possibilités pour former des alliances. Pourquoi François Hollande appelle-t-il alors un tel système de ses vœux, jamais vu durant ces 60 dernières années? Peut-être en raison de sa popularité: en décembre 2015, un sondage rapportait que près de sept Français sur 10 souhaitaient un rapprochement entre la gauche, la droite et le centre pour formuler des propositions communes.

Pour Olivier Rouquan, François Hollande pourrait tout simplement ne pas avoir le choix: "Il semble anticiper une configuration politique à venir, par exemple sa réélection suivie d'une majorité composite à l'Assemblée nationale. Si à l'issue des législatives la majorité n'est pas franche, il pourrait être amené à composer une alliance", prévient Olivier Rouquan. "On dirait donc qu'il prépare le terrain". 

https://twitter.com/ariane_k Ariane Kujawski Journaliste BFMTV