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Remaniement: pourquoi Gérald Darmanin reste ministre de l'Intérieur

Le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin donne une conférence de presse le 5 mai 2022 à Bousbecque, dans le Nord, pour annoncer sa candidature aux législatives

Le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin donne une conférence de presse le 5 mai 2022 à Bousbecque, dans le Nord, pour annoncer sa candidature aux législatives - DENIS CHARLET © 2019 AFP

Le patron de la place Beauvau garde son maroquin ministériel après l'annonce du nouveau gouvernement. L'ancien maire de Tourcoing permet d'envoyer des gages à la droite tout en étant apprécié des syndicats policiers. Son profil qui clive à gauche n'incarne cependant pas le renouvellement promis.

Un acte de confiance rare de la part de l'Élysée. Gérard Darmanin garde son poste de ministre de l'Intérieur à la faveur du gouvernement d'Élisabeth Borne qui vient d'être annoncé ce vendredi. Parmi ses atouts: une excellente connaissance des dossiers et un capital sympathie auprès des policiers. Mais son image reste brouillée sur les bancs de la gauche.

"C'est un métier très éprouvant où vous êtes en permanence dans l'urgence, dans les crises. Vous en sortez généralement essoré. C'est une gageure de tenir à ce poste", avance Sébastien Pietrasanta, ancien député socialiste et spécialiste des questions de sécurité auprès de BFMTV.com.

"Logique de le garder"

Nommé en 2020, après la démission de Gérald Collomb qui avait obligé Édouard Philippe à ajouter la casquette de patron des policiers à celle de Matignon pendant 10 jours, et après l'échec de Christophe Castaner qui s'était fâché avec les forces de l'ordre après avoir évoqué un "soupçon avéré de racisme" dans leurs rangs, Gérald Darmanin a cultivé ses bonnes relations avec les agents.

Après des années de dialogue social compliqué, l'ancien maire de Tourcoing a su renouer les discussions en lançant le Beauvau de la sécurité, présenté devant le Conseil des ministres en mars dernier et probablement voté à la rentrée prochaine.

"Il y a une logique à garder Gérald Darmanin dans la mesure où nommer quelqu'un qui n'a pas planché sur ce texte pour le défendre devant le Parlement aurait été très mal perçu par les policiers", juge de son côté Guillaume Farde, conseiller scientifique de la spécialité sécurité-défense à Sciences-Po Paris et consultant pour BFMTV.

"Caution de droite"

L'ancien maire de Tourcoing a également veillé à s'installer politiquement dès son arrivée à l'Intérieur. De son entretien dans Le Figaro à l'été 2020 dans lequel il évoque "l'ensauvagement d'une partie de la société" à son "choc" au sujet des rayons halal et casher dans les supermarchés en passant par Marine Le Pen qu'il trouve "un peu molle", le trentenaire a su donner des gages à la droite.

"C'est la caution d'Emmanuel Macron face à Élisabeth Borne, une Première ministre de gauche", analyse Brice Hortefeux, ancien ministre de l'Intérieur de Nicolas Sarkozy.

Un maintien qui déplaît à l'aile gauche

Dans les rangs de la macronie, la nouvelle de son maintien place Beauvau fait d'ailleurs grincer des dents.

"Le président fait campagne sur une méthode refondée, on parle aux électeurs de Jean-Luc Mélenchon et on repart pour un tour avec Gérald Darmanin. C'est incompréhensible", lâche, déçu, un marcheur de gauche.

Une partie de la macronie juge également le profil du ministre beaucoup trop clivant. Après des accusations de viol, Gérald Darmanin a bénéficié d'un non lieu par réquisitoire en 2022. La plainte déposée contre lui pour "abus de faiblesse" a été, elle, classée sans suite. Le ministre, pour se défendre, avait évoqué "sa vie de jeune homme" dans les colonnes de La Voix du Nord.

Un choix limité

"Je ne suis pas sûr qu'il avait vraiment le choix de ne pas le nommer à nouveau. A Beauvau, on ne place que des ultra-fidèles en qui on a toute confiance parce que vous savez tout sur tout le monde. Et on évite de se planter à nouveau comme avec Christophe Castaner. Vous faites vite le tour du casting", analyse de son côté un ancien fonctionnaire de police.

Gérald Darmanin va désormais tenter de viser le regard de longévité incarné par Pierre Joxe, qui a passé presque quatre ans et demi à Beauvau pendant le premier puis le second quinquennat de François Mitterrand.

Marie-Pierre Bourgeois