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Elections Législatives 2024

Législatives: pourquoi la Nupes et Ensemble, quasi à égalité en voix, n'auront pas autant de sièges

Avec un score quasi identique à Ensemble au soir du premier tour, la Nupes pourrait avoir moins de députés au Palais-Bourbon que la coalition présidentielle le 19 juin prochain. On vous explique pourquoi.

Un paradoxe. L'union de la gauche qui réunit les écologistes, les socialistes et les communistes sous l'égide de la France insoumise arrive au coude-à-coude avec la coalition présidentielle Ensemble. La première a récolté 25,59% des voix contre 25,75% pour la seconde au premier tour des élections législatives, selon les résultats définitifs du ministère de l'Intérieur

Pourtant, la Nupes pourrait obtenir entre 160 à 210 sièges, selon notre projection. Derrière la coalition présidentielle: réunie sous la bannière Ensemble (Renaissance, le Modem, Horizons et Agir), elle pourrait faire élire de 260 à 295 députés. Comment expliquer une telle situation?

Le chiffre de 25,7% correspond au pourcentage des suffrages exprimés sur l'ensemble du territoire. Or, il n'y a pas de proportionnalité entre le score d'un parti au niveau national et son nombre de sièges à l'Assemblée nationale, contrairement par exemple aux élections européennes. Il n'y avait en effet pas une seule élection organisée ce dimanche, mais 577, dans 577 circonscriptions différentes, au scrutin uninominal majoritaire à deux tours.

Or, Jean-Luc Mélenchon a fait ses meilleurs scores à la présidentielle dans les grandes villes et les départements très peuplés, comme à Paris, Bordeaux, la Seine-Saint-Denis, le Val-de-Marne, l'Isère ou l'Hérault. Ce constat se retrouve à nouveau lors du premier tour des élections législatives, au cours duquel Sophia Chikirou et Danièle Obono ont été élues ou réélues dès le premier tour à Paris, faisant le plein de voix pour la Nupes.

"Pour la gauche, il y a cette question de capacité à gagner des seconds tours, mais il y a surtout le phénomène de concentration de son électorat dans certaines circonscriptions. La gauche a un électorat très concentré dans les grandes villes", explique Bruno Jeanbart, vice-président de l'institut de sondage OpinionWay pour France info.

Autrement dit, pour obtenir la majorité au Palais-Bourbon, il vaut mieux faire des scores équilibrés partout dans le territoire que des scores très élevées dans certains circonscriptions et des résultats plus médiocres dans d'autres.

• Les réserves de voix semblent plus faibles pour la Nupes

Si les candidats de gauche sont arrivés plus souvent en tête au premier tour, ils ont un handicap pour le second: leurs réserves de voix. Concrètement, face à un duel Renaissance-Nupes, les électeurs des LR et, dans une moindre mesure, ceux du RN pourraient reporter leurs voix sur le candidat de la majorité présidentielle.

Le constat est assez proche pour le Rassemblement national. Avec 19,1% des voix, le parti devrait avoir entre 25 et 35 sièges. Le mouvement de Marine Le Pen peine donc lui aussi à élargir son socle au-delà de ses seuls électeurs. Aux législatives de 2017, alors que son parti s’était hissé au second tour dans 120 circonscriptions, elle n’avait finalement obtenu que huit députés à l’Assemblée.

• L'union de la gauche ne bénéficie pas de la prime au sortant

Les Républicains illustrent eux aussi le paradoxe d'un score plutôt faible et d'un nombre de sièges très honorables. Avec 11,3% des voix au premier tour pour la coalition LR-UDI, la droite pourrait garder 50 à 65 députés le soir du second tour, bénéficiant de fait de ce qu'on appelle une prime au sortant.

Ce bénéfice de la notoriété joue d'autant plus dans une campagne des législatives jugée atone, peu tournée vers des propositions. Alors que la plupart des candidats du RN et de la Nupes n'étaient pas élus dans la précédente mandature, l'immense majorité des candidats Ensemble et environ 20% des candidats républicains sont, eux, des députés sortants.

Autant d'éléments qui donnent du grain à moudre à Marine Le Pen qui dénonce régulièrement "un scrutin injuste" et appelle à la proportionnelle pour donner "un visage à l'Assemblée qui ressemble à la présidentielle".

Marie-Pierre Bourgeois