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Dominique de Villepin entendu jeudi dans l'affaire Karachi

Les enquêtes sur l'attentat de Karachi mettent à l'épreuve la volonté déclarée du gouvernement de faire la lumière sur l'affaire, à la veille de l'audition de Dominique de Villepin, jeudi, devant le juge Renaud Van Ruymbeke. L'ancien secrétaire général de

Les enquêtes sur l'attentat de Karachi mettent à l'épreuve la volonté déclarée du gouvernement de faire la lumière sur l'affaire, à la veille de l'audition de Dominique de Villepin, jeudi, devant le juge Renaud Van Ruymbeke. L'ancien secrétaire général de - -

par Thierry Lévêque PARIS (Reuters) - Les enquêtes sur l'attentat de Karachi mettent à l'épreuve la volonté déclarée du gouvernement de faire la...

par Thierry Lévêque

PARIS (Reuters) - Les enquêtes sur l'attentat de Karachi mettent à l'épreuve la volonté déclarée du gouvernement de faire la lumière sur l'affaire, à la veille de l'audition de Dominique de Villepin, jeudi, devant le juge Renaud Van Ruymbeke.

L'ancien secrétaire général de l'Elysée (1995-2002) et ex-Premier ministre (2005-2007) est appelé à dire ce qu'il sait d'une possible affaire de corruption pendant la campagne présidentielle de 1995, qui pourrait avoir un lien avec l'attentat dans lequel ont péri 11 Français en 2002 à Karachi.

Sa convocation, confirmée de source judiciaire, intervient alors que de nombreux éléments collectés dans deux instructions distinctes mettent au jour des circuits financiers suspects autour d'une vente de sous-marins au Pakistan, sans cependant apporter la preuve formelle de la corruption.

Une demande de documents est en cours d'examen en Suisse, a-t-on appris de source judiciaire. À Paris, l'Assemblée nationale, le Conseil constitutionnel et plusieurs ministères retiennent jusqu'ici les documents demandés par les juges.

Les déclarations de Dominique de Villepin sur TF1 vendredi dernier, où il faisait état de "très forts soupçons" en 1995 de l'existence de "rétrocommissions" (retour frauduleux d'argent en France) en marge d'une vente de sous-marins au Pakistan, ont mis le feu aux poudres avec l'Elysée.

Dominique de Villepin a confirmé que Jacques Chirac avait interrompu des paiements de commissions après 1995 en raison de ces soupçons. Les 11 français tués en 2002 travaillaient sur les sous-marins et un lien entre les deux événements est soupçonné.

Nicolas Sarkozy, qui fut ministre du Budget en 1993-1995 et porte-parole de la campagne présidentielle d'Edouard Balladur, rival de Jacques Chirac en 1995, a fait diffuser un communiqué disant que l'affaire ne le "concernait en rien".

LA SUISSE APPELÉE À LIVRER DES PIÈCES

Au même moment, il s'exprimait auprès de journalistes à Lisbonne lors d'un aparté, dont la transcription intégrale et l'enregistrement ont été publiés par plusieurs médias.

Il y explique qu'il n'intervenait pas dans les contrats d'armement en 1993-1995, n'était que le porte-parole de la campagne Balladur et remarque que les comptes de cette campagne ont été validés par le Conseil constitutionnel.

Le juge d'instruction Marc Trévidic, qui enquête sur l'assassinat des Français à Karachi, et Renaud Van Ruymbeke, qui le fait sur l'aspect financier, ont rassemblé une série d'éléments sur la piste d'une possible corruption, selon des sources judiciaires.

Le recrutement, après la signature du contrat des sous-marins, d'un second réseau d'intermédiaires devant recevoir 33 millions d'euros de commissions, ce qui portait leur total à 84 millions, a été établi.

Des documents saisis démontrent la création au Luxembourg des sociétés Heine et Eurolux pour recevoir cet argent, avec l'aval, selon un rapport de police luxembourgeois, d'Edouard Balladur et Nicolas Sarkozy. Dans son aparté avec la presse, Nicolas Sarkozy conteste le rôle que ce rapport lui prête.

C'est ce réseau que Jacques Chirac a fait "assécher" en 1995. Il restait alors neuf millions d'euros à payer, et c'est la destination finale de 24 millions d'euros qui est recherchée.

Sur la piste de l'argent, le juge Trévidic s'est rendu en Suisse au printemps dernier et a découvert des documents, selon une source judiciaire. Une procédure judiciaire sera nécessaire pour qu'ils soient éventuellement remis à la France.

Par ailleurs, le juge Van Ruymbeke a découvert que 13 millions de francs (deux millions d'euros) d'origine inconnue avaient été versés en espèces aux comptes de campagne d'Edouard Balladur, validés malgré l'avis contraire des rapporteurs.

Le Conseil constitutionnel refuse de remettre au juge van Ruymbeke les délibérations de l'époque.

Enfin, dit-on de source judiciaire, sont versés au dossier du juge Trévidic des documents montrant que Jean-Marie Boivin, dirigeant de Heine, a obtenu en 2009 huit millions d'euros de "dédommagement" de l'Etat français, dans un accord passé sur le paradis fiscal de l'île de Man.

Jean-Marie Boivin avait auparavant écrit des courriers juste avant la présidentielle de 2007 à plusieurs ministres, dont Nicolas Sarkozy. Interrogés mardi à l'Assemblée nationale sur les raisons de cet accord, Michel Mercier, ministre de la Justice, et Alain Juppé, ministre de la Défense, n'ont pas répondu.

Édité par Gilles Trequesser