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Charles Pasqua nie tout "pacte de corruption" devant ses juges

Charles Pasqua a rejeté devant la Cour de justice de la République tout "pacte de corruption" dans le cadre du financement de son parti politique lors de la campagne des élections européennes de 1999 menée en collaboration avec Philippe de Villiers. /Phot

Charles Pasqua a rejeté devant la Cour de justice de la République tout "pacte de corruption" dans le cadre du financement de son parti politique lors de la campagne des élections européennes de 1999 menée en collaboration avec Philippe de Villiers. /Phot - -

par Clément Dossin PARIS - Charles Pasqua a rejeté devant la Cour de justice de la République tout "pacte de corruption" dans le cadre du...

par Clément Dossin

PARIS (Reuters) - Charles Pasqua a rejeté devant la Cour de justice de la République tout "pacte de corruption" dans le cadre du financement de son parti politique lors de la campagne des élections européennes de 1999 menée en collaboration avec Philippe de Villiers.

Point d'orgue de la deuxième journée de son procès, l'ancien ministre de l'Intérieur, poursuivi pour plusieurs affaires de corruption présumée remontant à l'époque 1993-1995, a pris la parole à l'issue du témoignage attendu de son ancien et éphémère partenaire politique.

Le sénateur des Hauts-de-Seine, âgé de 83 ans, a alors rejeté l'accusation selon laquelle il aurait autorisé l'exploitation en 1994 du casino d'Annemasse en échange d'un financement électoral de 1,14 million d'euros remis à sa liste, le Rassemblement pour la France (RPF), pour la campagne de 1999.

"Je ne pouvais pas imaginer en 1994 que je serais amené à prendre la décision (de me présenter)" en 1999, a-t-il déclaré, debout, l'index tendu face à ses juges, rappelant que la décision de créer une liste avait été prise à seulement quelques mois du scrutin.

Philippe de Villiers, après avoir dressé le portrait d'un homme simple préférant le "saucisson corse aux grands restaurants", a apporté un soutien inattendu à l'ancien ministre.

"J'atteste que sa décision de faire une liste en 1999 a été prise beaucoup plus tard qu'en 1994", a-t-il déclaré avant que les deux hommes ne se serrent la main en quittant la salle d'audience.

Le président du Mouvement pour la France (MPF) avait au préalable expliqué les doutes l'ayant conduit à rompre l'alliance politique passée avec Charles Pasqua quelques mois après leur deuxième place obtenue aux élections européennes (13%) derrière le Parti socialiste mais devant le RPR.

"Je n'ai jamais eu accès aux informations sur le financement du RPF et c'est pour cela que je l'ai quitté" en juillet 2000, a-t-il déclaré, dénonçant une "gestion fantaisiste et opaque". "C'était la décision de la prudence."

GUÉANT MÉNAGE PASQUA

Charles Pasqua est soupçonné d'avoir perçu 7,5 millions de francs (1,14 million d'euros) en 1999 de la part de Marthe Mondolini, fille de Michel Tomi, l'un des deux associés avec Robert Feliciaggi dans le casino d'Annemasse.

Celle-ci, condamnée pour corruption active à 15 mois de prison avec sursis dans le volet non-ministériel du dossier, a déclaré à la Cour avoir agi à la demande de son père, en échange d'une place non éligible sur la liste du RPF (55e).

"Pour M. Pasqua, je recommencerais sans soucis", a-t-elle dit, n'éprouvant aucun regret.

Dans la matinée, la Cour avait entendu le témoignage du secrétaire général de l'Elysée, Claude Guéant, entendu en qualité d'ancien directeur de cabinet adjoint de Charles Pasqua, qui a ménagé l'ancien ministre de l'Intérieur, estimant que la procédure d'agrément accordé au casino d'Annemasse s'était déroulée tout à fait normalement.

L'ex-ministre avait donné son feu vert à Robert Feliciaggi, assassiné en 2006 dans un crime non élucidé, et à son associé Michel Tomi alors même que la Commission supérieure des jeux avait émis plusieurs avis défavorables.

Claude Guéant a reconnu avoir réclamé à l'époque des faits "une instruction rapide" de ce dossier sans que cela ne résulte, selon lui, d'une insistance particulière de Charles Pasqua.

Tout juste a-t-il admis, interrogé sur la part de secret de Charles Pasqua que, "au sommet de l'Etat, il y a des choses qui se partagent et d'autres qui ne se partagent pas, ce qui compte c'est que les bonnes décisions soient prises".

L'attaque la plus vive est finalement venue de Daniel Anceau, commandant de police à la sous-direction "course et jeux" des renseignements généraux au moment des faits.

"On sentait bien que ce dossier était téléguidé, qu'il devait passer. Je n'ai jamais vu ça en 15 ans aux jeux", a-t-il dit.

L'affaire du casino d'Annemasse est l'un des trois dossiers pour lesquels comparaît Charles Pasqua devant la CJR, créée pour enquêter sur les présomptions de crimes et délits commis par des ministres dans l'exercice de leurs fonctions et les juger.

Le verdict sera prononcé le 30 avril. Le sénateur des Hauts-de-Seine encourt jusqu'à dix ans de prison.

En 2008, Charles Pasqua a été condamné dans le volet non ministériel du dossier d'Annemasse à 18 mois d'emprisonnement avec sursis pour "financement illégal de campagne électorale", une peine confirmée en appel.

Edité par Jean-Baptiste Vey