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Bruxelles veut que le bouclier fiscal soit modifié

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par Julien Toyer BRUXELLES (Reuters) - La Commission européenne a lancé jeudi une procédure d'infraction contre la France sur le bouclier fiscal au...

par Julien Toyer

BRUXELLES (Reuters) - La Commission européenne a lancé jeudi une procédure d'infraction contre la France sur le bouclier fiscal au motif qu'il est discriminatoire pour les personnes qui ne sont pas domiciliées fiscalement en France.

Le ministre français du Budget, François Baroin, a répondu que ces griefs ne changeaient rien aux projets de la France concernant sa fiscalité, qui doit être modifiée à l'issue d'un débat l'an prochain.

La procédure communautaire ne remet pas en cause le principe même du bouclier fiscal mais vise à placer sur un pied d'égalité avec les résidents fiscaux français les personnes qui sont domiciliées fiscalement à l'étranger.

"La Commission ne met pas en cause le principe, elle remet en cause éventuellement des modalités d'application", a dit François Baroin à des journalistes. "Nous contestons la position de la Commission, nous développerons nos arguments et ça ne gênera en rien le calendrier que nous allons proposer."

Les autorités françaises ont annoncé une réflexion sur la fiscalité au premier semestre 2011 portant notamment sur le bouclier fiscal et l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF), deux dispositifs très discutés en France.

Trois éléments sont mis en avant par la Commission, qui estime que la libre circulation des personnes, des travailleurs et des capitaux est affectée.

Le premier est que la mesure ne s'applique pas aux personnes qui ne sont pas fiscalement domiciliées en France même si elles y perçoivent l'essentiel de leurs revenus et y sont imposables à titre principal.

Le deuxième vise le dispositif de plafonnement prévu pour l'ISF afin d'éviter que le total formé par cet impôt et l'impôt sur le revenu n'excède pas 85% des revenus nets imposables du foyer fiscal.

Le troisième concerne le fait que seuls les impôts payés en France sont pris en compte pour déterminer le plafond de 50% et l'éventuel montant à rembourser.

La Commission estime que cette disposition est susceptible d'inciter les contribuables à acquérir des titres produisant des dividendes taxés en France et inclus dans le calcul du bouclier fiscal, plutôt que des titres équivalents pour lesquels ils devraient acquitter l'impôt dans un autre Etat membre.

LE MÉCANISME DOIT ÊTRE REVU

La ministre française de l'Economie, Christine Lagarde, a estimé que la logique de la Commission était compréhensible mais que la démarche ne lui paraissait "pas tout à fait légitime".

L'exécutif communautaire a choisi de transmettre un "avis motivé" à la France afin que celle-ci mette fin à cette discrimination dans un délai de deux mois.

Si Paris ne se met pas en conformité, la Commission pourrait décider de saisir la Cour de justice de l'Union européenne.

Le débat sur une éventuelle suppression simultanée de l'ISF et du bouclier fiscal a été relancé ces dernières semaines en France, y compris au sein de la majorité présidentielle.

Un amendement déposé par des élus UMP proposant cette double suppression, soutenue par une majorité de Français selon un sondage CSA, a été rejeté la semaine dernière par l'Assemblée nationale.

Décidé en 2006 par Dominique de Villepin, le bouclier fiscal a été conservé par Nicolas Sarkozy, qui a rabaissé de 60 à 50% des revenus fiscaux le niveau maximum d'impôts directs payés par un contribuable.

Le président de la commission des Finances de l'Assemblée, le socialiste Jérôme Cahuzac, a une fois de plus critiqué le bouclier jeudi, en s'appuyant sur la décision de Bruxelles.

"C'était déjà un boulet politique, il semble que ce boulet s'alourdisse", a-t-il dit à des journalistes.

"Si la France veut maintenir le bouclier fiscal, les contribuables français continueront à faire les chèques qu'ils faisaient à ceux qui bénéficient du bouclier fiscal mais ils devront de surcroit faire des chèques à des ressortissants communautaires qui paient l'ISF en France mais paient tous leurs autres impôts à l'étranger", a-t-il ajouté.

Dans l'Union européenne, seul le Danemark maintient un dispositif de ce type. La Finlande a décidé de le supprimer en 2005 en même temps que l'impôt sur la fortune.

Avec Jean-Baptiste Vey et Emile Picy à Paris, édité par Marc Angrand