Bayrou Résurrection

Le retour au tout premier plan de François Bayrou, comme incarnation d’une union nationale souhaitée par une majorité de Français, souligne le malaise qui traverse un PS au bord de l’implosion.

Le président du Modem aura été le premier surpris par le sondage du Journal du Dimanche qui a fait sensation ce week-end : les Français à 47% le placeraient en tête des personnalités qu’elles souhaiteraient voir entrer dans un gouvernement d’union nationale, plébiscité par 78% des personnes interrogées. Autant dire qu’un an après l’élection de François Hollande, la France s’impatiente et attend un nouveau souffle.
« Je ne savais pas que ce sondage existait, c’est un copain qui m’a envoyé la une du JDD par mail, à 0h38 », a confié François Bayrou, plutôt rasséréné. Son téléphone n’a pas arrêté de sonner tout le dimanche. « Je sais combien tout cela est difficile et long, j’ai payé cher cette idée que je défends depuis dix ans et qui peu à peu fait son chemin », a-t-il ajouté. En a-t-il parlé avec le chef de l’Etat lui-même ? Mystère, même s’il est notoire que les deux hommes se parlent régulièrement, et s’apprécient…

Mais François Bayrou n’est pas près de rejoindre le gouvernement à n’importe quel prix…

« Attention », prévient-il, « je ne serai pas une roue de secours de la majorité actuelle ». Pour lui, pas question d’adhérer à l’idéologie révolutionnaire d’une gauche de la gauche, qui se veut en rupture avec l’Europe. Il faut plutôt fixer une nouvelle ligne politique, comme l’a fait l’Allemagne de Gerhard Schroeder, pour sauver une France malade. « Il ne faut pas appeler le docteur Austérité, mais le docteur Activité pour la soigner », plaide le leader centriste.

L’hypothèse Bayrou est à l’opposé du texte à charge contre Angela Merkel que s’apprête à publier le Parti Socialiste.

C’est le hiatus soulevé par le président du Modem dans son livre Etat d’urgence. La bipolarisation de la vie politique française fait que nous portons au pouvoir une majorité de gauche ou de droite qui elle-même se divise avec ses anti-Européens et ses extrêmes. C’est mécanique : François Hollande élu à un peu plus de 50% se retrouve un an après soutenu par 25% des Français. Une difficulté que l’union nationale atténuerait, ce qui a permis à Angela Merkel de relancer l’Allemagne.

François Hollande est prêt à franchir le pas ? Il ne va rien décider, pas dans l’immédiat…

« Avec qui, et pour faire quoi », a réagi l’un des conseillers du chef de l’Etat à l’Elysée. « Si tous les gens de bonne volonté se donnaient la main », c’est beau, mais ça ne se passe pas comme ça dans la vraie vie. François Bayrou n’a aucun soutien politique, et l’UMP est déchainée contre nous, en harcelant le gouvernement, et en insultant le président. François Mitterrand a voulu ouvrir le gouvernement avec Michel Rocard. Cela a débouché sur une deuxième cohabitation. Nicolas Sarkozy a nommé des ministres d’ouverture, mais pour appliquer une politique de droite. Les Français en rêvent. Les politiques ne sont pas prêts.

Jean-François Achilli