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Politique

Aux municipales, les candidats aussi ont le droit de s'abstenir

Le Parti Pris d'Hervé Gattegno c'est tous les jours sur RMC à 8h25.

Le Parti Pris d'Hervé Gattegno c'est tous les jours sur RMC à 8h25. - Crédits photo : nom de l'auteur / SOURCE

Les préfets de plusieurs départements ont donné l’alerte ces derniers jours : on manque de candidats aux municipales et il n’y a plus qu’une semaine pour déposer les listes.

Toutes les élections locales sont marquées par une baisse régulière de la participation – c’est ce qui s’annonce aux municipales. S’il y a de moins en moins de gens pour voter, il est logique qu’il y ait moins de gens pour se présenter : le désintérêt entraîne la désaffection. Il faut dire aussi qu’il y a un décalage énorme entre la vision qu’ont les Français de la politique et la réalité d’un mandat local : peu de prestige et beaucoup de servitudes, des risques juridiques personnels quand il y a des accidents sur leur commune. On prête facilement à ces élus un statut de privilégié ; en réalité, ils font un métier de chien.

Pourtant, on dit souvent que le maire est l'élu préféré des Français

Ça reste vrai mais il faut voir à quel prix – à tous les sens du terme. Nous avons 36 783 communes dont 31 500 ont moins de 2 000 habitants. Dans ces petites villes, la proximité devient une pression ; tout le monde attend quelque chose du maire, a fortiori s’il le connaît – beaucoup d’élus disent que c’est un poids pour eux. Et il y a l’aspect financier proprement dit : 90% des conseillers municipaux sont bénévoles ; et sauf dans les grandes villes, les maires sont très mal payés (2500€ pour une ville de 20000 hab ; 1600€ pour 3000 hab ; 646€ pour 500 hab…). En fait, ils font un job de chef d’entreprise (ou de PME) pour un salaire d’employé.

Comment peut-on faire pour remédier à cette désaffection ? Il faut bien que chaque ville ait un maire

La première : instaurer un vrai statut de l’élu – on en parle depuis 30 ans... On a aboli le cumul pour les grands élus mais les petits élus cumulent… les inconvénients. Si on veut des dirigeants à temps plein, même dans une petite ville, il faut les payer mieux. L’autre piste : réduire le nombre de communes. Il y en a 8400 en Allemagne, 8100 en Espagne et en Italie, 238 au Royaume uni ! Pour y arriver, il faut multiplier les regroupements de communes. Ça réduirait le nombre d’élus (nous avons aussi le record : 601 000 mandats !) et aussi de fonctionnaires. Donc la 1ère solution est coûteuse, la 2è est économique. Choisissez…

Est-ce que ce manque de candidats n'est pas aussi un symptôme de plus du discrédit des politiques et de la politique en France ?

C’est certain. La preuve : il y a aussi de moins en moins de militants dans les partis, qui fournissent la plupart des candidats aux élections. Ce discrédit est déjà assez disproportionné pour les grands élus (ceux des grandes villes ou les parlementaires) ; pour ce qui concerne les élus de base, il est carrément injuste car ce sont des hommes et des femmes qui se dévouent pour les autres et qui, a fortiori avec la crise, ont le sentiment d’une grande impuissance et d’une forme de déclassement. Si leur rôle se réduit à des vacations, on peut comprendre que ça provoque une crise des vocations.

Hervé Gattegno