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Police-Justice

Vers des jurés populaires en tribunal correctionnel ?

Vue du ministère de la Justice, place Vendôme à Paris. Le nouveau ministre de la Justice, Michel Mercier, a annoncé pour 2011 la réforme voulue par l'Elysée sur les jurés populaires en correctionnelle et a confirmé implicitement l'ajournement de la suppre

Vue du ministère de la Justice, place Vendôme à Paris. Le nouveau ministre de la Justice, Michel Mercier, a annoncé pour 2011 la réforme voulue par l'Elysée sur les jurés populaires en correctionnelle et a confirmé implicitement l'ajournement de la suppre - -

RENNES (Reuters) - Le nouveau ministre de la Justice, Michel Mercier, a annoncé vendredi pour 2011 la réforme voulue par l'Elysée sur les jurés...

RENNES (Reuters) - Le nouveau ministre de la Justice, Michel Mercier, a annoncé vendredi pour 2011 la réforme voulue par l'Elysée sur les jurés populaires en correctionnelle et confirmé implicitement l'ajournement de la suppression du juge d'instruction.

L'Union syndicale des magistrats (USM, majoritaire), qui avait invité le ministre à son congrès annuel à Rennes, estime que la nouvelle réforme vise à faire oublier l'abandon de la première, et condamne les deux projets.

Le garde des Sceaux, un centriste nommé dimanche à la surprise générale, a repris l'idée du président Nicolas Sarkozy d'introduire des jurés populaires dans les tribunaux correctionnels. Ceux-ci, composés de trois magistrats, jugent les délits punis de peines allant jusqu'à dix ans de prison.

"Il faut associer plus clairement nos citoyens à l'oeuvre de justice. C'est déjà le cas dans les cours d'assises", a-t-il dit dans un discours.

Les syndicats de magistrats jugent l'idée absurde.

À la différence des cours d'assises où les jurés populaires votent avec des magistrats professionnels sur la culpabilité, puis sur l'éventuelle peine, les tribunaux correctionnels, font valoir les syndicats, motivent par écrit leurs décisions, avec la nécessité de connaitre le droit.

Michel Mercier précise que la mesure ne concernera éventuellement que les appels et les délits les plus graves, passibles, dit-il, de "cinq ou sept ans" de prison.

Là encore, les syndicats de magistrats soulignent que dans ces dossiers, d'épineuses questions de droit doivent être débattues et tranchées par écrit.

Le président de l'USM, Christophe Régnard, a exprimé son hostilité à pareille réforme. "Il est plus facile d'appréhender un viol ou un assassinat qu'un accident aérien ou une affaire de sang contaminé. Est-ce que des patients opèrent dans des blocs opératoires ?", a-t-il dit à la presse.

MERCIER PROMET UNE CONCERTATION

Le ministre entend en outre appliquer l'idée de Nicolas Sarkozy de faire siéger de simples citoyens aux côtés des juges d'application des peines, qui statuent sur les demandes de libérations anticipées des condamnés.

Les libérations conditionnelles sont utilisées pour favoriser les réinsertions et ont été développées par tous les gouvernements, dont l'actuel.

"On peut imaginer un assesseur qui soit président d'une association de victimes (...) ou un assesseur président d'une association de probation", a dit le ministre sur Europe 1.

Là encore, l'idée est critiquée. Les représentants des victimes sont peu susceptibles de statuer de manière indépendante sur ces sujets, remarquent les magistrats.

Michel Mercier reste évasif sur le calendrier, promettant "de la réflexion et du travail" et annonce des discussions.

Il s'est dit ouvert au dialogue avec les juges. "Je suis venu leur dire qu'on a besoin d'eux et que l'on veut travailler avec eux", a t-il souligné en marge du congrès de Rennes.

Michel Mercier n'a fixé aucune date pour l'adoption définitive de cette réforme ou son entrée en vigueur.

Le projet de supprimer les juges d'instruction indépendants et de les remplacer par les procureurs, liés au pouvoir politique, pour la totalité des enquêtes pénales, paraît en revanche quasiment abandonné.

Annoncé par Nicolas Sarkozy en 2009, il a été vivement critiqué par l'opposition, les syndicats de magistrats, des associations de victimes et à un moindre titre par les avocats, si bien que Michèle Alliot-Marie, précédente ministre de la Justice, avait renoncé à le présenter au Parlement.

Interrogé sur le sujet, Michel Mercier a indiqué que la réforme plus large de la procédure pénale était toujours en cours et que ce sujet demandait réflexion. "On verra tout cela après", a t-il dit, sans autres précisions.

Pierre-Henri Allain, avec Thierry Lévêque à Paris, édité par Gilles Trequesser