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Police-Justice

Un an après, la situation des Roms n’a pas changé

« Les évacuations se passent toujours de la même façon : il y a une pression policière, une présence répétée et un jour la police dit : on évacue tout le terrain... », déplore Laurent El Gozi, le président de la FNASAT.

« Les évacuations se passent toujours de la même façon : il y a une pression policière, une présence répétée et un jour la police dit : on évacue tout le terrain... », déplore Laurent El Gozi, le président de la FNASAT. - -

Les Roms sont toujours là. Il y a un an, Nicolas Sarkozy annonçait pourtant son intention de les expulser de France. Ceux qui ont fini par accepter de rentrer en Roumanie, sont revenus, « malgré la peur ». Une association dénonce, pour le gouvernement, « une façon très facile de faire du chiffre »...

Le 28 juillet 2010 lors du "discours de Grenoble", qui faisait suite à des violences survenues entre gens du voyage et Roms dans le Loir-et-Cher, Nicolas Sarkozy annonçait son intention d'expulser les Roms de France. Le chef de l’Etat demandait alors le démantèlement en 3 mois de 300 camps, « des zones de non-droit », selon lui. Dans la foulée, le ministère de l'Intérieur signait une circulaire visant à évacuer les Roms en Roumanie. La circulaire avait provoqué la colère de Bruxelles qui dénonçait une mesure destinée à stigmatiser une ethnie.

Selon l'association Rom Europe, il y a eu 12 000 expulsions en 2010, comme en 2009. Et les Roms sont tous revenus en France après quelques mois en Roumanie. Aujourd’hui, ils sont toujours 15 000 et le gouvernement continue d'organiser des évacuations... sans succès.

« Ils reviennent car il y a plus à manger dans nos poubelles que chez eux ! »

En colère, Laurent El Gozi, le président de la Fédération nationale des associations solidaires d'action avec les Tsiganes et les Gens du voyage (FNASAT), qui regroupe 80 associations de défense des Roms, explique : « Les évacuations se passent toujours de la même façon : il y a une pression policière, une présence répétée et un jour la police dit "on évacue tout le terrain" et les gens ont le choix entre être mis en rétention administrative et accepter l’aide au retour volontaire, c’est-à-dire 300 euros par adulte. Evidemment, la plupart préfèrent être raccompagnés en Roumanie, où ils sont très mal accueillis, stigmatisés, n’ont pas de boulot, ni de ressources. Et évidemment ils vont revenir, parce qu’ils le disent depuis 20 ans : il y a plus à manger dans nos poubelles que chez eux! ».

« J’ai peur mais je veux rester ici, parce que j’ai mon travail »

Dans un camp de 12 personnes en Seine-et-Marne, Maria vit avec la peur constante d'être évacuée : « Ils viennent, pour savoir s’il n’y a pas des personnes en plus. Nous on croit qu’ils viennent pour casser le terrain. Ils peuvent arriver n’importe quel jour, à n’importe quelle heure. On a peur mais moi je veux rester ici, parce que maintenant j’ai mon travail. Le salaire en Roumanie, c’est 100-150 euros ; ici on gagne très bien, 1000-1200 par mois si je travaille chaque jour. On n’a pas le choix, on reste là, même avec notre peur ».

« Ça veut dire quoi l’Europe pour vous ? Juste la France ? »

Evacué en Roumanie, Robert, un Rom qui vit dans le bidonville de Moulin Galant, dans l’Essonne), explique pourquoi il est revenu en France : « Les flics me disaient : tu n’as pas de travail en France, tu n’as rien, tu es obligé de travailler pour rester ici. Alors ok, je suis allé 6 mois en Roumanie. Mais mes enfants sont scolarisés en France. Il y a des personnes qui travaillent, toutes les personnes sont pas des voleurs ! Il y a des personnes qui essaient de faire leur vie, comme tous les Français, comme tous les policiers. Pourquoi ils ont fait l’Europe ? Ça veut dire quoi l’Europe pour vous ? Juste la France ? ».

« Une façon très facile de faire du chiffre d’expulsion »

Damien Nantes est membre de l'association Rom Europe. Ça ne l'étonne pas que les Roms soient tous revenus. Ça prouve, selon lui, que la circulaire de Sarkozy n'était qu'un effet d'annonce : « On a été dans un discours, dans une politique de communication. Aujourd’hui en France, les Roms sont une façon extrêmement facile de faire du chiffre d’expulsion. On les fait rentrer dans ce qu’on appelle le rapatriement humanitaire : on met suffisamment la pression sur les gens pour qu’ils acceptent de rentrer chez eux, on leur paye le voyage et on leur donne 300 euros. Mais ces gens-là sont quand même des citoyens européens, donc ils ont le droit de revenir en France. Et quelques jours, quelques semaines plus tard, ils reviennent et parfois ils sont ré-expulsés dans l’année ; donc ça fait des nouveaux chiffres ».

La Rédaction, avec Amandine Dubiez