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Terrorisme

Sortie de prison, lieux de culte, renseignement: ce que contient la future loi antiterroriste

Gérald Darmanin à Montpellier le 19 avril 2021

Gérald Darmanin à Montpellier le 19 avril 2021 - Guillaume HORCAJUELO © 2019 AFP

Le ministre de l'Intérieur présentera mercredi, en Conseil des ministres, une nouvelle loi pour lutter contre le terrorisme. Le texte était "dans les tuyaux" avant l'attaque de Rambouillet mais tombe à point nommé pour le gouvernement.

"L'hydre islamiste est toujours très présente", a alerté Gérald Darmanin dans le Journal du dimanche. Le ministre de l'Intérieur justifiait ainsi la nécessité de "renforcer nos moyens pour lutter contre une menace qui évolue", avec un nouveau projet de loi antiterroriste présenté mercredi en Conseil des ministres. Il était "dans les tuyaux" avant l'attaque de Rambouillet mais tombe à point nommé pour le gouvernement.

• Un caractère permanent à des mesures de l'État d’urgence

Le meurtre au couteau d'une agente administrative par un Tunisien radicalisé, perpétré au sein-même d'un commissariat, alourdit la charge politique et symbolique d'un texte qui s'ajoute à la vingtaine de lois antiterroristes promulguées en France depuis 1986.

Le texte n'est, pour l'essentiel, que le toilettage d'un arsenal de dispositions déjà existantes mais que l'exécutif voulait graver dans le marbre législatif. Fort de 19 articles, il vise principalement à conférer "un caractère permanent" aux mesures expérimentées dans le cadre de la loi sur la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme (Silt) votée en octobre 2017 pour sortir de l'état d'urgence en vigueur après les attentats de 2015, explique le ministère de l'Intérieur.

• La surveillance aux sorties de prison

"On a un peu moins de 500 personnes qui purgent actuellement leur peine pour des faits liés au terrorisme", "une centaine" est sortie de prison en 2020 et "environ 60 en 2021", selon le coordonnateur national du renseignement Laurent Nuñez.

Le projet de loi propose de porter à "deux ans" (contre un actuellement) la durée maximale des mesures de surveillance pour les personnes condamnées pour terrorisme à une peine d'au moins cinq ans ferme ou trois ans en récidive.

Cette disposition vient répondre à la censure en août 2020 par le Conseil constitutionnel d'une proposition de loi LaREM visant à instaurer des "mesures de sûreté" pour ces détenus terroristes à l'issue de leur peine.

• Une pression accrue autour des lieux de culte

Outre la fermeture administrative de lieux de culte soupçonnés d'être liés à des faits de nature terroriste, comme la mosquée de Pantin après la décapitation de Samuel Paty, le projet de loi offre la possibilité de fermer des locaux dépendants de ces lieux de culte.

Cette mesure vise à "éviter que ces lieux soient utilisés par les associations gestionnaires du lieu de culte dans le but de faire échec à sa fermeture", explique le ministère de l'Intérieur.

• Création d’un périmètre de sécurité

Le projet de loi proposera d'interdire à une personne sous surveillance administrative et tenue de résider dans un périmètre géographique déterminé de paraître au sein de ce périmètre dans un lieu "dans lequel se tient un événement soumis, par son ampleur ou sa nature, à un risque terroriste particulier", rapporte-t-on Place Beauvau.

• Améliorer le renseignement électronique

Sur le volet renseignement, une révision de la loi de juillet 2015 est nécessaire face à "l'évolution des technologies et des modes de communication, qui se caractérisent, en particulier, par l'utilisation croissante d'outils de communication chiffrés", souligne le ministère. Ainsi, la durée autorisée pour recueillir des données informatiques sera portée à deux mois et les interceptions de correspondances échangées par voie satellitaires seront facilitées.

Enfin et surtout, le texte propose que la technique controversée de l'algorithme, introduite dans la loi de 2015 et qui permet le traitement automatisé des données de connexion pour détecter les menaces, soit pérennisée, dans le respect du droit européen.

Interrogé dans le JDD sur le risque d'atteinte aux libertés individuelles, Gérald Darmanin a demandé d'arrêter avec la "naïveté". "Toutes les grandes entreprises utilisent des algorithmes. Et il n'y aurait que l'Etat qui ne pourrait pas les utiliser ?"

Le projet de loi, dont la promulgation doit aboutir avant la fin juillet, promet de vifs débats au Parlement comme dans la rue, où il risque de provoquer une nouvelle levée de boucliers des défenseurs des libertés publiques.

Par E.P avec AFP