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Terrorisme

Campagne anti-jihad: "C'est un cri d'amour que je lui envoie"

Le fils de Saliha, originaire de Belgique, est mort sur le front du jihad, en Syrie.

Le fils de Saliha, originaire de Belgique, est mort sur le front du jihad, en Syrie. - Capture d'écran Dailymotion.

Le gouvernement lance ce mercredi une série de quatre spots télévisés dans lesquels des familles concernées témoignent pour sensibiliser l'opinion sur le départ de jeunes Français au jihad. Bouleversés, ils racontent le jour où ils ont appris que leur enfant se trouvait en Syrie.

Véronique, Baptiste et Saliha ont chacun un enfant parti faire le jihad en Syrie, Jonathan une soeur de 17 ans. Face caméra, la voix parfois brisée par l'émotion, ils disent leur incompréhension et leurs souffrances. Le gouvernement a lancé ce mercredi une série de quatre spots télévisés dans lesquels quatre familles concernées témoignent pour sensibiliser l'opinion sur le départ de jeunes Français partis faire le jihad en Syrie.

Recueillis par la productrice Fabienne Servan-Schreiber, ces témoignages disent tous la douleur de ceux qui "n'ont pas compris" et "rien vu", avant de renvoyer au numéro vert de signalement des candidats au jihad, lancé au printemps 2014 par l'Intérieur.

"Nous sommes des victimes"

La fille de Baptiste avait 17 ans quand elle est partie, emmenée par un ami dont elle avait fait la connaissance sur un site de rencontres et qui est devenu l'un des porte-parole de Daesh.

"Le départ de Léa s’est passé une belle journée. Elle a pris un sac à dos, une écharpe, et depuis ce jour là, elle a disparu. On n’a rien vu. On n’a rien compris. C’est elle qui nous a appelés. Elle nous a dit: 'Papa, Maman, je vais vous faire du mal. Je suis partie. Je suis partie en Syrie, pour faire le jihad'. Et là, vous avez toute la Terre qui vous tombe dessus", raconte ce père de famille originaire d'Ile-de-France, au bord des larmes.

"Léa a eu un enfant, elle a construit sa vie, dans un monde en guerre. Quelque part, elle a voulu trouver un monde meilleur, mais je pense qu’elle a trouvé l’enfer. On nous a volé notre enfant. Léa, cette personne joviale, joyeuse, est morte. Nous ne sommes pas des parents de terroristes, nous sommes des victimes", lance-t-il.

"Je ne peux plus le serrer dans mes bras"

Véronique, elle, se rappelle des moments de joie qui ont précédé le départ inattendu de son fils Félix. "Notre fils vivait dans un univers plutôt privilégié. Il aimait la musique, il aimait le sport, il faisait des sketchs. C’est ça aussi qui est dur, ça laisse beaucoup de désarroi. On passe un week-end magnifique, c’est la fête, il y a la famille, son frère, on fait plein d’activités. Et puis le lendemain, il part en Allemagne. Et il ne revient pas. On a su qu’un mois après où il était. Il est en Syrie", raconte Véronique dans son témoignage vidéo.

"Plus les jours passaient, plus on avait des inquiétudes mais jamais on n'a pu pensé qu'il pouvait être là-bas", a-t-elle précisé, au micro de RMC, ce mercredi matin, indiquant que la conversion à l'islam de Félix n'était "pas secrète". "Il nous a annoncé sa conversion joyeusement, deux ans avant son départ", détaille-t-elle, avant d'expliquer que l'évolution de son fils a été très "progressive" et que le jeune homme et sa famille ne sont pas en rupture depuis son départ, et que des contacts réguliers sont établis, via l'application WhatsApp notamment. 

"On ne sait pas précisément où il est, ce qu’il fait, on ne peut pas aller le chercher, on ne peut pas le ramener. (...) Je ne peux plus l’embrasser, je ne peux plus le serrer dans mes bras", confie Véronique dans son clip vidéo, les larmes au bord des yeux. "C'est un cri d'amour que je lui envoie, je ne peux pas le serrer dans mes bras donc il doit comprendre qu'on l'aime", ajoute-t-elle sur RMC. 

"C’est comme si vous n’étiez plus le parent de cet enfant"

Saliha, qui habite en Belgique, a perdu son fils de 18 ans, parti faire le jihad en Syrie en août 2013. "Il a côtoyé des gens qu’il n’aurait jamais du côtoyer, qui sont à l’affut et qui guettent les nouveaux venus. Il allait fêter ses 19 ans. Mon mari était parti se promener, lorsqu’il a reçu un appel de Syrie. Il décroche le téléphone. C’était un Syrien qui le félicitait parce que son fils était tombé en martyr", se souvient Saliha.

"Quand on vous annonce la mort de votre enfant, on ne donne pas son nom véritable mais son nom de combattant. C’est comme si vous n’étiez plus le parent de cet enfant. Peu importe les origines, peu importe la religion au départ, ça peut arriver à tout le monde", rappelle-t-elle.

Diffusion pendant un mois

Plus d'une vingtaine de médias et sites internet diffuseront ces spots de prévention gratuitement pendant un mois. Parmi eux, TF1, TV5 Monde, France Télévisions, Facebook, Dailymotion, la chaîne de cinéma UGC, Orange ainsi que des quotidiens ou hebdomadaires nationaux. 

Depuis son lancement, le 29 avril 2014, le numéro vert de signalement des candidats au jihad a enregistré plus de 3.000 signalements, dont 23% concernent des mineurs. Parmi ces derniers, une majorité de jeunes filles. Selon le Premier ministre Manuel Valls, plus de 500 Français ou résidents en France se trouvent aujourd'hui en Irak ou en Syrie. 

A.S.