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Terrorisme

Avocats, magistrats... Qui sont les grands acteurs du procès des attentats du 13-Novembre?

Olivia Ronen, avocate de Salah Abdeslam ; Jean Reinhart, avocat de parties civiles au procès du 13-Novembre ; Arthur Dénouveaux, président de l'association Life for Paris

Olivia Ronen, avocate de Salah Abdeslam ; Jean Reinhart, avocat de parties civiles au procès du 13-Novembre ; Arthur Dénouveaux, président de l'association Life for Paris - AFP

Pendant près de neuf mois, trois juges, trois avocats généraux ou encore 330 avocats vont participer au procès hors norme des attentats du 13-Novembre.

Cela fait des mois qu'ils se préparent. À partir de ce mercredi, et pendant près de neuf mois, magistrats, avocats ou encore représentants des victimers et de leurs proches vont se replonger dans l'horreur des attaques terroristes du 13-Novembre qui ont fait 130 morts en 2015. Ces hommes et ses femmes vont tenter de comprendre quel a été l'engrenage qui a conduit à l'attaque la plus meurtrière jamais commise en France. Voici les principales figures qui vont revenir au cours des débats.

• Jean-Louis Périès, le président de la cour d'assises

C'est une cour d'assises spécialement composée de magistrats professionnels, comme dans toutes les affaires de terrorisme, qui va juger les 20 accusés. À sa tête, Jean-Louis Périès qui présidera les audiences jusqu'en mai prochain, avant de prendre sa retraite. L'homme est décrit comme ayant un très fort caractère mais aussi "le sens de l'humain", selon Jean-Michel Hayat, le Premier président de la cour d'appel.

Ce juge d'instruction, spécialisé dans la criminalité organisée et qui a notamment renvoyé au tribunal l'ex-maire de Paris et sa femme, Jean et Xavière Tiberi, s'est déjà expérimenté à des dossiers sensibles. Au cours de ses 40 années de carrière, il a présidé le procès en appel d'Abdelhakim Dekhar, le tireur de BFM et Libération, ou encore le premier procès de l'attaque de policiers au cocktail Molotov à Viry-Châtillon.

Depuis un an et demi, le magistrat travaille pour préparer ce procès des attentats du 13-Novembre et maîtriser les 542 tomes de ce dossier.

"Rien ne l'oblige à faire ça et il y a beaucoup de gens qui n'avaient pas envie de le faire", note un magistrat parisien. "Il a fait plein de choses, il faut être courageux pour se dire, 'pour mes derniers mois, je me fixe ça comme objectif'."

Jean-Louis Périès s'appuiera sur quatre assesseurs dont deux ont déjà exercé la fonction de président de cour d'assises. Choisie pour être première assesseure, Frédérique Aline a récemment présidé le procès de l'ancien secrétaire d'État Georges Tron. Quant à Xavière Siméoni, c'est une ancienne juge d'instruction qui a notamment renvoyé l'ex-président de la République Jacques Chirac devant un tribunal correctionnel. Elle a plus récemment présidé le procès en appel d'Abdelkader Merah, le frère du terroriste Mohammed Merah.

Enfin, quatre magistrats ont été choisis comme "joker" pour remplacer leurs collègues en cas de besoin.

• Une accusation à trois têtes

C'est une situation "quasi inédite", du propre aveu d'un magistrat. Le ministère public sera représenté par trois avocats généraux, contre deux habituellement lors des grands procès. Ces trois magistrats du parquet national anti-terroriste sont détachés depuis novembre 2020 pour préparer cette audience. "Ça s'est imposé", explique-t-on au PNAT.

Si l'exercice est relativement nouveau pour eux, et pour cause le PNAT n'existe que depuis 2019, Camille Hennetier, Nicolas Le Bris et Nicolas Braconnay sont déjà rompus aux dossiers terroristes. La première a fait ses armes aux côtés de l'ancien procureur de Paris François Molins quand elle a dirigé la section spécialisée sur les affaires de terrorisme au parquet de Paris. Le second était le magistrat de permanence le soir du 13 novembre 2015. Quant au troisième, il est déjà intervenu dans des procès pour apologie du terrorisme.

À la fois emplis d'"enthousiasme" et d'"angoisse" face à ce saut dans l'inconnu, les trois avocats généraux ont tiré les enseignements du procès des attentats de janvier 2015 pour organiser le déroulé de l'audience. Leur volonté? Que l'institution judiciaire soit à la hauteur. Leur crainte? Que le procès tourne au débat théologique. Camille Hennetier, Nicolas Le Bris et Nicolas Braconnay ont prévu de réquisitionner pendant deux jours.

• Les avocats de la défense

Olivia Ronen aura pour lourde tâche de défendre Salah Abdeslam. L'avocate a été contactée il y a trois ans par le seul membre des commandos du 13-Novembre encore en vie.

"C'est lorsqu'on a le moins envie de comprendre que c'est le plus intéressant d'y aller", explique-t-elle pour justifier son choix de défendre le terroriste. "Plus l'étau se resserre, plus notre rôle est essentiel."
Olivia Ronen va défendre Salah Abdeslam lors de son procès.
Olivia Ronen va défendre Salah Abdeslam lors de son procès. © Joël Saget

Loin du médiatique Frank Berton, un temps l'avocat de Salah Abdeslam, cette jeune avocate, qui a prêté serment il y a cinq ans, a toutefois une expérience dans les dossiers terroristes. Ancienne secrétaire de la conférence, ces jeunes avocats élus pour un an à la suite d'un concours d'éloquence pour être commis dans les cours d'assises, Olivia Ronen est déjà intervenue sur le dossier de l'attentat de Nice ou sur des affaires d'attentats déjoués. Pour défendre Salah Abdeslam, elle a fait appel à un autre - jeune - confrère, Me Martin Vettes.

Autre figure de la défense: Me Xavier Nogueras. Avec son étiquette d'"avocat de jihadistes", il va défendre Mohamed Amri, qui a reconnu être allé chercher Salah Abdeslam en voiture le soir des attentats pour le ramener en Belgique, en sachant qu'il était impliqué dans les attentats. Avec sa carrure imposante, ses cheveux gris, et sa voix caractéristique, l'avocat a traîné sa robe, ces dernières années, dans de nombreuses affaires de terrorisme, et notamment pour assurer la défense de Jawad Bendaoud, qui avait été surnommé "le logeur de Daesh".

Me Christian Saint-Palais, lui, s'est déjà essayé aussi aux procès hors normes. Après avoir défendu l'un des accusés du procès des attentats de janvier 2015, Amar Ramdani, le président de l'association des avocats pénalistes sera également côté défense pour défendre Yassine Atar, le frère d'Oussama, considéré comme le coordinateur des attaques.

• Les voix des victimes

Près de 1800 victimes se sont constituées parties civiles. Si certaines témoigneront, ce sont leurs avocats qui poseront des questions aux témoins ou accusés et ce sont eux qui demanderont en leur nom réparation à la justice. Parmi leurs quelque 300 représentants, Me Jean Reinhart, qui défendra une centaine de parties civiles.

L'homme a longtemps été l'avocat de grands groupes. Il défend l'UIMM, l'Union des industries et métiers de la métallurgie, la Société Générale contre Jérôme Kerviel, ou encore une victime française de l'escroc américain Bernard Madoff. Il est plongé une première fois dans les attentats quand la Sodexo le contacte pour défendre la veuve de l'un de ses employés, Frédéric Boisseau, tué par les frères Kouachi en janvier 2015. Puis l'horreur du 13-Novembre le frappe personnellement avec la mort de son neveu Valentin, présent au Bataclan quand les terroristes ont pénétré dans la salle de spectacle.

L'avocat des deux pilotes, Me Jean Reinhart.
L'avocat des deux pilotes, Me Jean Reinhart. © Capture BFMTV

D'autres figures, comme Me Samia Makhtouf, Me Helena Christidis ou Me Géraldine Berger-Stenger, sont déjà intervenues du côté des parties civiles dans des dossiers de terrorisme.

• Les associations de victimes

Il sera le dernier à témoigner. Si le planning est parfaitement respecté, Arthur Dénouveaux, président de l'association de victimes et de familles de victimes Life for Paris, viendra témoigner le 27 octobre pour "synthétiser les différents témoignages" qui auront été entendus par la cour d'assises et pour "apporter des éléments manquants", lui qui était présent au Bataclan.

Arthur Dénouveaux, le président de Life for Paris.
Arthur Dénouveaux, le président de Life for Paris. © Ludovic Marin

Autre président, celui de l'association de proches de victimes 13Onze15 Fraternité et Vérité, Philippe Duperron. Ce dernier a perdu son fils dans l'attaque du Bataclan. Il viendra témoigner, comme son épouse.

https://twitter.com/justinecj Justine Chevalier Journaliste police-justice BFMTV