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Terrorisme

Attentats: arrivé parmi les premiers au Bataclan, un policier de la BAC témoigne

Avant l'assaut de la BRI contre les preneurs d'otages du Bataclan, le 13 novembre, des policiers de la BAC de Créteil ont été parmi les premières forces de l'ordre envoyées sur place. L'un d'eux a accepté de raconter ce qu'il a vécu à BFMTV.

Il est 21h50, le vendredi 13 novembre, quand les policiers de la brigade anti-criminalité (BAC) de Créteil arrivent aux abords du Bataclan, boulevard Voltaire, dans le 11ème arrondissement de Paris. Dix minutes plus tôt, trois individus armés de kalachnikovs et portant des ceintures explosives ont pénétré dans la salle de concert, où ils retiennent les spectateurs en otage.

"Quand on arrive boulevard Voltaire, il y a des gens qui courent dans tous les sens, qui sont apeurés, paniqués, se remémore l'un des agents de cette brigade. On entend des coups de feu, on entend la première déflagration. On commence à sentir que la situation est hyper tendue."

Évacuer les civils par tous les moyens

À ce moment-là, la porte de secours du Bataclan, située impasse Amelot, s'ouvre pour des spectateurs qui ont réussi à s'échapper. "Mon premier réflexe est de faire sortir les personnes de la zone dangereuse", se rappelle le policier. Il arrête alors tous les véhicules qui circulent à proximité, voitures de particuliers comme taxis, pour installer des personnes à leur bord et enjoindre les conducteurs à quitter l'endroit le plus vite possible. "Je leur dis de ne pas s'arrêter, et s'il y a des blessés, de les amener directement à l'hôpital."

Et des blessés, il y en a, certains très gravement. "Une personne, que je couche derrière mon véhicule pour la protéger, a une balle dans le ventre, souffle le fonctionnaire de police. Ses amis me hurlent dessus pour leur porter assistance, encore une fois j'arrête une voiture pour qu'ils montent dedans et quittent la zone."

"Forcément, on a peur"

Mais alors que les agents de la BAC portent secours aux spectateurs, ils sont la cible de tirs nourris. Au total, ils essuient quatre rafales de kalachnikovs. L'un des terroristes est en effet posté à un balcon du Bataclan, d'où il tire sur les forces de l'ordre. Dans ces conditions, difficiles de garder son sang-froid.

"On a peur. Forcément on a peur, c'est un sentiment normal. Mais on n'a pas le temps de penser à tout ça, on a des gens qui comptent sur nous. Il y a des civils qu'il faut assister et protéger."

Les policiers ripostent, et réussissent à entrer dans le bâtiment. Ce qu'ils y voient va les marquer profondément. "Quand je rentre dans le Bataclan, les premières victimes que je vois, ce sont des gens de mon âge, ce sont des trentenaires, se rappelle le policier. Ça aurait pu être mes amis."

Sentiment d'impuissance

Dix jours plus tard, l'agent de la BAC est encore secoué par ce qu'il a vécu cette nuit-là, même s'il assure aller mieux, désormais. "Les trois, quatre premiers jours étaient un peu difficiles, au niveau du sommeil, au niveau de l'appétit. On a fait ce qu'on a pu, on a improvisé."

Aujourd'hui, ce que ce policier retiendra, c'est surtout "un sentiment d'impuissance et de frustration, par rapport à la puissance de feu employée contre nous." Alors que les assaillants sont équipés d'armes automatiques, et de ceintures explosives, les forces de l'ordre ont "une arme lourde pour six ou sept fonctionnaires de police." Mais interrogé sur ce qu'il ferait s'il fallait retourner en première ligne, il n'hésite pas un instant. "Ça fait partie du job, tout simplement."

H. M. avec Mélanie Bertrand et Stéphane Beaugard