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Police-Justice

Soutien controversé de Brice Hortefeux à des policiers condamnés

Des magistrats et des responsables de gauche s'élèvent contre le soutien affiché par le ministre de l'Intérieur Brice Hortefeux, un préfet et des policiers à sept agents condamnés vendredi après avoir été reconnus coupables de fausses accusations. /Photo

Des magistrats et des responsables de gauche s'élèvent contre le soutien affiché par le ministre de l'Intérieur Brice Hortefeux, un préfet et des policiers à sept agents condamnés vendredi après avoir été reconnus coupables de fausses accusations. /Photo - -

Des magistrats et des responsables de gauche s'élèvent contre le soutien affiché par le ministre de l'Intérieur, un préfet et des policiers aux sept agents condamnés vendredi après avoir été reconnus coupables de fausses accusations.

Près de 200 policiers "scandalisés" par le jugement ont manifesté vendredi soir en uniforme devant le tribunal de Bobigny (Seine-Saint-Denis) avec des voitures toutes sirènes hurlantes.

Loin de condamner cette manifestation, le ministre de l'Intérieur, Brice Hortefeux, a estimé que le jugement pouvait "légitimement apparaître, aux yeux des forces de sécurité, comme disproportionné".

Il a également demandé au préfet de Seine-Saint-Denis, Christian Lambert, de rendre visite aux personnels du commissariat d'Aulnay-Sous-Bois, où étaient en poste les policiers mis en cause.

"La faute commise est indéniable, (...). Je suis pour autant très étonné de la décision du tribunal", a déclaré Christian Lambert après avoir rencontré les sept agents condamnés.

Pour l'Union syndicale des magistrats (USM, majoritaire), ces réactions sont "ahurissantes".

"Le métier de la police n'est pas de faire des faux et de frapper des suspects. Ces faux auraient pu conduire une personne en cour d'assises où il encourait la réclusion à perpétuité", a dit à Reuters son président Christophe Régnard.

"CRITIQUE PERMANENTE DE LA JUSTICE"

S'exprimant au nom du Parti socialiste, la députée et ex-garde des Sceaux Marylise Lebranchu a condamné "avec fermeté" la manifestation de policiers.

"Le ministre de l'Intérieur doit prendre des sanctions immédiates contre ceux qui viennent de mettre en cause publiquement la justice alors qu'ils sont dépositaires de l'autorité publique", a-t-elle estimé samedi dans un communiqué.

"Si on en arrive là, c'est qu'on sent bien qu'il y a une critique permanente de la justice de la part des autorités", a-t-elle ajouté sur Europe 1, évoquant les déclarations répétées de Nicolas Sarkozy et de Brice Hortefeux sur les magistrats.

André Vallini, député PS de l'Isère, a également dénoncé l'attitude de Brice Hortefeux : "A force de stigmatiser les magistrats, le ministre de l'Intérieur aboutit à susciter des réactions démesurées de la part des syndicats de policiers à l'égard de certains jugements".

En revanche, Marine Le Pen, vice-présidente du Front national, a estimé que la justice "sape le travail des policiers avec l'accord des politiques".

Les sept policiers reconnus coupables de violences et de fausses accusations de tentative d'homicide contre un homme ont été condamnés à des peines de six mois à un an de prison ferme.

Le tribunal correctionnel de Bobigny a en outre ordonné l'inscription au casier judiciaire pour cinq d'entre eux de la sanction, ce qui entraînerait une radiation automatique de la police si le jugement était confirmé en appel.

"MALAISE PROFOND" DANS LA POLICE

Le tribunal est allé au-delà des réquisitions du parquet qui avait demandé lors du procès le mois dernier des peines de trois à six mois de prison avec sursis.

Le parquet a décidé de faire appel du jugement, comme les prévenus, et il y aura donc un second procès.

Les syndicats de police ont quasi unanimement soutenu leurs collègues.

Le syndicat Synergie-officiers parle de "déclaration de guerre à la police" par les juges. "Au-delà des sept policiers de Bobigny qui ont fauté, ce sont bel et bien tous les policiers de France qui prendront ce verdict incroyable comme un camouflet à leur encontre et un nouvel appel à la haine venant de magistrats", dit-il dans un communiqué.

Le Syndicat national des officiers de police (Snop), tout en condamnant les actes des policiers visés, proteste quand même car selon lui les peines sont trop lourdes.

Nicolas Comte, d'Unité-SGP Police, a estimé que cette manifestation était l'expression d'un "malaise plus profond."

"Ce qui pose problème, ce n'est pas la condamnation, mais la hauteur de la condamnation dans un tribunal qui n'est pas toujours réputé par sa sévérité", a-t-il expliqué.

Les policiers condamnés, qui ne sont pas écroués en raison du caractère suspensif de l'appel, étaient accusés d'avoir imputé les blessures d'un de leurs collègues survenues le 9 septembre à Aulnay-sous-Bois, près de Paris, à une tierce personne qu'ils poursuivaient.

Ces blessures résultaient en fait d'une collision avec une autre voiture de police. Trois des policiers ont de plus frappé ensuite à terre l'homme qu'ils poursuivaient et tous ont relaté une fausse version en rédigeant un faux procès-verbal.