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Police-Justice

Secte en Gironde: comment les enquêteurs luttent contre les gourous?

L'hôtel de police de Grenoble, en octobre 2016 (PHOTO D'ILLUSTRATION).

L'hôtel de police de Grenoble, en octobre 2016 (PHOTO D'ILLUSTRATION). - JEAN-PIERRE CLATOT / AFP

Un homme de 79 ans, se faisant appeler "Zeus" est renvoyé aux Assises, accusé d'abus de faiblesse et de viol de plusieurs femmes. Philippe Guichard, à la tête de l'OCRVP en charge d'enquêter sur les infractions liées aux dérives sectaires, explique à BFMTV.com la complexité de ce type d'affaires.

À Gujan-Mestras en Gironde, un homme de 79 ans sera bientôt jugé aux Assises pour "abus de faiblesse" et "viol" commis sur au moins cinq femmes dont sa propre fille. Se présentant comme un Zeus contemporain, Claude Alonso imposait sa domination sur des femmes instables, rapporte Le Parisien. Le gourou, par la voix de son avocat Me Charles Dufranc auprès du quotidien, assure que "ces personnes ont intégré cette communauté de leur plein gré."

Emprise sexuelle et financière

L'affaire illustre en tout cas la complexité des dossiers liés aux dérives sectaires, sur lesquelles est chargée d'enquêter la cellule d'assistance et d'intervention en matière de dérives sectaires (CAIMADES), dont dépend l’OCRVP (Office central pour la répression des violences aux personnes). Philippe Guichard, à la tête de l'OCRVP, reconnaît auprès de BFMTV.com que le travail des enquêteurs, au nombre limité de sept, pour prouver l'emprise mentale est très "chronophage". Il nécessite parfois jusqu'à 2 ans et demi d'enquête.

Cette dernière démarre après un signalement fait par un proche à la Miviludes - 2 à 3000 par an - suite à une rupture des liens avec l'entourage ainsi qu'un pillage du patrimoine financier. Pour le cas de Claude Alonso, il aurait imposé des relations sexuelles "destinées à recharger Zeus" afin de "sauver l'humanité en évitant l'apocalypse", cite Le Parisien. Il les aurait obligés à vendre leurs biens et à contracter des prêts bancaires afin de financer les besoins de la "communauté".

Marchands de bonheur et pseudo-thérapeutes

Dans ce cas, si le parquet estime qu'un individu "poursuit des activités ayant pour but ou pour effet de créer, de maintenir ou d'exploiter la sujétion psychologique ou physique des personnes" (loi dite About-Picard), la CAIMADES est saisie. 

"La plupart du temps, il s'agit de marchands de bonheur ou de pseudo-thérapeutes... Les sectes ont rarement pignon sur rue", indique Philippe Guichard.

"Le gourou les rend les plus faibles possible", ajoute le commissaire. Et il s'attaque à tous les "niveaux sociaux socio-culturels", insiste Philippe Guichard, et souvent les plus aisés pour s'assurer d'un gain financier conséquent.

Des victimes qui ne se reconnaissent pas comme telles

Démarre alors un long travail d'investigation pour prouver que les personnes ne sont plus maîtres de leur moyen, souvent avec l'aide d'experts psychiatres. Il faut multiplier les entretiens sans brusquer les présumées victimes.

Car ces dernières justement, ne se considèrent pas comme des victimes. Durant l'enquête sur "Zeus", fait savoir Le Parisien, plusieurs femmes sous son contrôle ont d'ailleurs témoigné en sa faveur. Cinq femmes ont donc réussi en tout cas à sortir de son emprise. Parmi elles se trouve sa fille, qui était âgée d'une vingtaine d'années au moment des faits.

Esther Paolini