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Police-Justice

Relations police/jeunes : vers le dialogue ?

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Pour améliorer les relations entre les jeunes et les forces de l'ordre, responsables d'associations, ministres et responsables de la police et de la gendarmerie se réunissent ce lundi 31 août.

« Non, les policiers ne sont pas naturellement provocateurs, non les jeunes ne sont pas naturellement violents », a affirmé Brice Hortefeux le 21 août, quelques jours après la mort à Bagnolet (Seine-Saint-Denis) du jeune Yakou Sanogo, qui fuyait un contrôle de police à moto. Un drame qui avait été lui-même suivi d'incidents violents entre les forces de l'ordre et les jeunes de ce quartier.
Désireux d'améliorer les relations entre la police et les jeunes, le ministère de l'Intérieur réunit donc ce lundi 31 août, Xavier Darcos, ministre de tutelle de la Ville, Fadela Amara, secrétaire d'Etat chargée de la Politique de la ville et Martin Hirsch, Haut-commissaire à la Jeunesse. Autour de la table également, 17 associations nationales ou de quartiers travaillant dans les milieux jeunes et/ou de banlieue. Ainsi que les autorités : les directeurs généraux de la police et de la gendarmerie, le préfet de police Michel Gaudin, les directeurs centraux de la Sécurité publique et des CRS, et enfin le directeur de la police urbaine de proximité.

« C'est souvent très électrique avec les jeunes »

Dans certains quartiers, la situation est plus que tendue entre les forces de l'ordre et les jeunes, comme l'explique Samir, policier dans un quartier populaire de Paris : « si on est pas avec eux, on est contre eux, tout simplement. Ils oublient qu'on vient parce qu'on a souvent des appels de voisins par exemple pour un contrôle de police sur des jeunes qui sont indésirables en bas de la cité. Les jeunes pensent qu'on est là pour les embêter, alors que c'est pas du tout le cas. C'est souvent très électrique : l'effet de groupe fait que souvent ils nous rient au nez, ne nous prennent pas au sérieux et font en sorte de nous pousser, verbalement, pour qu'on commette un faux pas. »

« Une politique de sécurité irresponsable »

Une situation que déplore Laurent Mucchielli, sociologue, directeur de recherche au CNRS : « on balance dans les endroits les plus difficiles, des jeunes policiers sortis directement de l'école de formation, venus de leur province, qui rencontrent alors des jeunes désœuvrés. Chacun se diabolise ; on est dans le rapport de force, dans la virilité. » Regrettant vivement « la politique menée depuis 2002, qui est d'arrêter les expériences de proximité », Laurent Mucchielli conclue : « cette stratégie de l'escalade envoie les policiers dans le mur, qui sont, autant que la population, victimes d'une politique qui n'est pas responsable. »

« La politique de proximité instaurait un climat de confiance »

Regrettant la « police de proximité » créée en 1997 par Jean-Pierre Chevènement, puis supprimée en 2003 par l'UMP, Samir croît toutefois à une amélioration possible des relations police-jeunes : « Dans un premier temps, il faudrait beaucoup plus de dialogue. Instaurer un service qui serait plus proche de la population, comme ça a déjà été le cas avec la politique de proximité, qui instaurait un climat de confiance avec un petit groupe dans une cité. On sait très bien qu'on peut déjà s'appuyer sur ceux-là pour les futurs contrôles ou tâches. »

« Que les pouvoirs publics arrêtent leur discours guerrier »

Selon Laurent Mucchielli, pour améliorer les choses, il faut « que les pouvoirs publics abandonnent ce discours guerrier. Parce que c'est comme ça que la chose est présentée, comme une espère de guerre qu'il faudrait gagner dans les quartiers. Tant qu'on sera sur ce type de discours, et derrière, sur les pratiques violentes d'escalade qui vont avec - il y a des policiers qui font du maintien de l'ordre, de plus en plus nombreux, de plus en plus armés, face à des jeunes qui du coup, eux aussi, montent le niveau... »
Plus que sceptique quant à une évolution positive de la situation, il poursuit : « je crains malheureusement qu'il s'agisse simplement de faire de la communication, de montrer qu'on n'est pas si méchant que ça ; mais sur le fond, j'ai bien peur que ça ne change rien du tout. »

La rédaction, avec Sébastien Gilles