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Procès

Un Français jugé à Paris pour agression sexuelle en récidive sur une vingtaine d'enfants en Asie

Le palais de justice de Paris (PHOTO D'ILLUSTRATION).

Le palais de justice de Paris (PHOTO D'ILLUSTRATION). - ALAIN JOCARD / AFP

Sous couvert d'humanitaire, Philippe G. est accusé d'avoir agressé sexuellement en Asie au moins 24 garçons, âgés de 6 à 14 ans. L’homme avait déjà été condamné en France pour des actes de pédocriminalité.

Au Népal ou au Cambodge, "Uncle" prétendait apporter son aide à de jeunes garçons défavorisés. Philippe G., un Français de 51 ans, est jugé ce mardi devant le tribunal judiciaire de Paris pour avoir agressé sexuellement au moins 24 d’entre eux, entre 2011 et 2015. L’homme avait déjà été condamné en France pour des actes de pédocriminalité et était inscrit au fichier des délinquants sexuels.

Une première condamnation en 2005

Le prévenu, originaire de Douai (Nord) a passé sa vie à travailler auprès d'enfants et adolescents. Au début des années 2000, il profite de son statut de sous-directeur d’une colonie de vacances en Haute-Savoie pour agresser plusieurs petits garçons, de 8 à 12 ans. Le tribunal correctionnel de Thonon le condamne en 2005 à trois ans de prison, dont la moitié avec sursis.

Son nom est également inscrit au Fichier judiciaire automatisé des auteurs d’infraction sexuelles ou violentes (Fijaisv), où sont renseignés l’identité de la personne, son domicile et la nature de la décision de justice. Ce suivi, ainsi qu’une obligation de soin, ne l’empêche pas de travailler ensuite dans un camping, dont il est écarté après des plaintes de clients sur son comportement avec les enfants.

En 2008, il part au Népal pour six mois, puis crée "Philmy voyageurs solidaires", avec l'aide de membres de sa famille et de proches. Sur le blog de l'association, dont le statut est au nom de sa mère, Philippe G. vante ses actions éducatives ou humanitaires au Népal, au Cambodge, au Laos ou en Inde auprès des "populations les plus défavorisées."

Entre les mailles du filet

Sur place, l'homme a en effet payé la scolarité de plusieurs enfants. Mais derrière le paravent humanitaire, il est accusé d'avoir imposé des masturbations ou des fellations à des garçons d'une dizaine d'années, parfois moins, lors de douches ou en dormant la nuit avec eux. Une ONG népalaise spécialisée, Saathi, observe Philippe G. en compagnie de plusieurs enfants dans différents hôtels et lieux publics de Katmandou, puis rédige un rapport alertant les autorités françaises en mai 2014.

"Comment Philippe G., avec son profil et son passé judiciaire, a-t-il pu effectuer ces séjours en Asie? Nous nous interrogeons sur une défaillance des autorités et souhaitons comprendre comment il a pu passer entre les mailles du filet", réagit auprès de BFMTV.com Noémie Saidi-Cottier, qui représente l'association de protection de l'enfance Ecpat.

La justice ouvre une enquête en mars 2015, confiée à l'Office central pour la répression des violences aux personnes (OCRVP), qui se déplace en Asie. La liste des victimes déclarées est longue: quinze garçons népalais, neuf Cambodgiens, âgés de 6 à 14 ans au moment des faits. Parmi eux, V., âgé de 7 ans quand, selon ses déclarations aux enquêteurs, Philippe G. l'aurait masturbé dans un orphelinat et lui aurait donné "un collier en forme d'éléphant ainsi que des bonbons et des gâteaux."

Un profil "particulièrement alarmant"

Un temps en cavale, le fugitif est interpellé dans le Gard, près de chez sa mère octogénaire. En garde à vue, il nie d'abord les faits et assure contrôler son attirance sexuelle pour les jeunes garçons grâce à son suivi thérapeutique. Mais il reconnaît finalement quelques semaines plus tard, devant le juge d'instruction qui le met en examen, des "attouchements sexuels." S'il n'a pas avoué jusqu'alors, c'est à cause, dit-il, du soutien de membres de sa famille, qui le pensaient guéri.

D'abord écroué, Philippe G. est placé sous contrôle judiciaire fin 2018, à la fin de la période légale de détention provisoire en correctionnelle. Il a depuis l’interdiction d'entrer en contact avec des mineurs. Selon le rapport d'un expert, son profil est jugé "particulièrement alarmant."

"Philippe G. cherchait son plaisir auprès des jeunes garçons, sans se soucier du mal qu'il pouvait leur faire", conclut un autre.

Il est, selon Me Noémie Saidi-Cottier, relativement rare de voir autant de parties civiles constituées dans un dossier de pédophilie à l'étranger. Elle espère une indemnisation des enfants à la hauteur du préjudice subi, afin qu'ils puissent poursuivre leur scolarité. L’ancien humanitaire encourt, en état de récidive légale, 20 ans de prison.

Esther Paolini Journaliste BFMTV