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Police-Justice

Procès Muller: les débats s'achèvent dans la confusion

Le docteur Jean-Louis Muller, lundi, au premier jour de son procès devant les assises de Nancy.

Le docteur Jean-Louis Muller, lundi, au premier jour de son procès devant les assises de Nancy. - -

Les plaidoiries des parties civiles sont attendues ce mercredi. Après une semaine de débats, la défense soutient toujours la thèse du suicide, l'accusation, celle du meurtre. Sans avoir trouvé l'argument déterminant.

Le Dr Muller a-t-il tué sa femme? Alors que les premières plaidoiries sont attendues ce mercredi, l'accusation n'a pas permis de trouver l'argument déterminant pour prouver le meurtre, au troisième procès après cassation de ce médecin-légiste alsacien. Mais la défense, menée par le ténor Eric Dupont-Moretti, n'est pas parvenue à lever tout doute et à imposer la thèse du suicide. Retour sur les temps forts de cette semaine mouvementée.

> "Acquitator" à la défense

Le docteur Jean-Louis Muller, un médecin légiste de 57 ans, comparaît pour la troisième fois pour le meurtre de son épouse. Deux fois condamné à 20 ans de réclusion criminelle, en 2008 et 2010, il a toujours nié et défendu la thèse du suicide. Cette fois, il s'est armé d'un ténor du barreau: Me Eric Dupont-Moretti, surnommé "Acquitator". Au cours des débats, l'avocat a tout donné, n'hésitant pas à se mettre en scène pour une reconstitution en "live" à la barre avec un expert.

> "Je suis innocent"

Jean-Louis Muller n'a pas changé de version. Dès le premier jour de procès, il s'est affirmé "innocent". Pour lui, le soir du 8 novembre 1999, sa femme s'est donnée la mort dans la salle de jeu des enfants, au sous-sol de leur domicile, alors qu'il regardait la télévision au premier étage. Il a entendu un claquement, a pénétré dans la pièce, a "peut-être" touché des munitions utilisées, peut-être été contaminé par les résidus de tirs dans la pièce, où il dit être entré deux fois. C'est aussi lui qui a appelé la gendarmerie.

> Des experts hésitants

Les expertises ont noté la faible présence de particules de résidus de tir sur la victime, et les traces de poudre découvertes sur Jean-Louis Muller. Mais pas de quoi conclure formellement à un meurtre. Un des experts appelés à la barre, Ludwig Niewöhrer, a bien exprimé leurs hésitations sur ce point: "Lorsqu'il y a suicide, il y a des résidus de tir beaucoup plus prononcés sur la victime", a-t-il estimé. Avant de nuancer son propos. "A condition que les prélèvements aient été correctement réalisés... Il existe aussi des cas où il y a très peu de résidus de tir, alors qu'on sait qu'il s'agit d'un suicide."

> Pas de trace sur l'arme

C’est le point crucial sur lequel l'accusation s'est une nouvelle fois appuyée: l'absence de trace sur le pistolet 357 Magnum utilisé. Comment une personne a-t-elle pu se suicider sans que l'arme porte la moindre trace? "Soit la victime portait des gants, soit l'arme a été essuyée", a répondu devant la Cour l'expert qui l'a analysée. Cet homme, Jacques Peuziat, a souligné qu’il n’y avait "ni trace sur l'arme, ni sur les munitions". A cet argumentaire, Me Dupont-Moretti a rétorqué que "l’arme n’a pas été nettoyée, puisqu’elle a été retrouvée recouverte de matière organique", une "fine pellicule grasse" relevée par l'expert. Les proches de la victime ont toutefois relevé que Brigitte Muller "avait peur des armes", alors que son mari, lui, les collectionnait...

> Les témoins surprise

Ce lundi, à l'entame de la seconde semaine de procès, l'accusation a pensé tenir un argument déterminant en faveur du meurtre maquillé en suicide. A la barre, le directeur d'enquête a affirmé avoir récemment recueilli le témoignage de deux gendarmes qui lui auraient expliqué que le docteur Muller s'était sans doute douché avant d'accueillir les enquêteurs le soir de la mort de sa femme. A ces propos, l'accusé – dépeint comme bouillonnant – n'a pas pu retenir sa colère. "Deux gendarmes arrivent quinze ans après, alors que moi ça fait autant de temps que je réclame une reconstitution et qu'on me chie dessus!", s'est-il exclamé.

> Gendarmes et policier pas d'accord

Entendus mardi, les deux témoins surprise ont indiqué, pour l'un, "avoir constaté que le Dr Muller avait les cheveux mouillés", pour l'autre, "avoir constaté que des parties de son t-shirt étaient humides". Des informations qu'ils n'avaient néanmoins jamais livrées en 14 ans - alimentant les doutes de la présidente. "Comment avez-vous pu ne pas vous rendre compte pendant 14 ans que cette information était capitale?", a lancé Marie-Cécile Thouzeau. Et puis, tous deux nient avoir entendu Jean-Louis Muller expliquer qu'il s'était douché parce qu'il avait du sang sur lui… contrairement à ce qu'a affirmé le directeur d’enquête, la veille, sous serment.

Le verdict est attendu jeudi. Et une troisième fois, les jurés devront sans doute se fonder sur leur intime conviction.

M. T.