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Police-Justice

Procès du Mediator: Servier reste deux heures et puis s'en va

Jacques Servier (d.) entouré de ses avocats, mardi, dans la salle d'audience du tribunal de Nanterre.

Jacques Servier (d.) entouré de ses avocats, mardi, dans la salle d'audience du tribunal de Nanterre. - -

Dès l'ouverture des débats, mardi après-midi, la défense a tenté de faire annuler le procès du Mediator. Et le principal prévenu Jacques Servier a quitté la salle d'audience au bout de deux heures.

Au bout d'un an, la reprise a été difficile. Le procès du Mediator, renvoyé en mai 2012 pour une question de procédure, a rouvert mardi devant le tribunal correctionnel de Nanterre. Mais le principal prévenu dans ce scandale sanitaire, Jacques Servier, n'a tenu que deux heures dans la salle d'audience.

Le fondateur des laboratoires Servier, âgé de 91 ans, a demandé par la voix de son avocat à quitter le prétoire. Le chroniqueur judiciaire de France 2, Dominique Verdeilhan, a indiqué sur son compte Twitter que Jacques Servier s'était présenté à l'audience "contre l'avis de son médecin", et qu'il ne reparaîtrait pas de la journée. Les débats se sont poursuivis sans lui.

#mediator Jacques Servier a quitté definitivement l'audience. Selon son avocat, Me Temime, il s'est présenté contre avis de son médecin.
— verdeilhan (@verdeilhan) 21 mai 2013

Jacques Servier doit répondre, avec quatre cadres de son laboratoire et de sa filiale Biopharma, de "tromperie aggravée". Tous sont accusés d'avoir dissimulé la dangerosité du Mediator, un médicament coupe-faim pour les diabétiques en surpoids, fabriqué et commercialisé par Servier entre 1976 et 2009.

Selon un rapport d'experts judiciaires publié en avril, les effets secondaires du Mediator seraient responsable de 1.800 morts et de plus de 3.000 décès par atteinte des valves cardiaques. Mais pas de quoi provoquer des nuits blanches au président des laboratoires Servier. Il y a une semaine, interrogé par notre antenne sur son procès à venir, Jacques Servier avait simplement lâché: "on s'en fout".

"Il faut que ça s'arrête"

Une attitude qui révolte Irène Frachon. C'est cette pneumologue de Brest qui, en 2007, a révélé la dangerosité du Mediator et abouti à son retrait du marché français deux ans après. "'On s'en fout', c'est la stratégie de communication de Servier depuis 30 ans. Il faut que ça s'arrête", a-t-elle réagi avec virulence dans les couloirs du tribunal de Nanterre, juste avant l'ouverture du procès.

Il y a un an, les avocats de Jacques Servier avaient tenté de faire annuler le procès en déposant une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) à la Cour de cassation. Cette QPC interrogeait la recevabilité de cette audience à Nanterre, alors qu'une enquête pour les mêmes faits est au même moment instruite à Paris. La Cour de cassation avait finalement rejeté leur demande.

Maître Hervé Temime, l'avocat de Jacques Servier, jure pourtant que le vieil homme ne veut pas se dérober. "Jacques Servier veut-il éviter un procès? Bien sûr que non! Il faut qu'il y ait un procès, mais pas dans n'importe quelles conditions", a-t-il argué. Mais dès le début de l'audience de mardi, la défense a de nouveau entamé une bataille procédurale dans le but d'aboutir à un nouveau renvoi.

Pas de réponse pour les victimes

Les victimes du Mediator, dont 700 se sont constituées partie civile, devront donc encore attendre avant d'obtenir des réponses de la part du fondateur des laboratoires Servier. L'une d'elles, Solange Roiné, témoignait avant l'ouverture des débats son espoir de voir Jacques Servier "reconnaître ses torts" et celui d'"une indemnisation pour les victime". Tout en avouant "ne pas attendre grand chose" de la procédure judiciaire. "Sera-t-il capable de s'expliquer? C'est autre chose", a-t-elle reconnu.

Irène Frachon a, elle, réitéré mardi soir sur notre antenne sa volonté de mener son combat jusqu'au bout. "Il y a une question lancinante pour les victimes: c'est s'il savait que le mediator était un poison. Pourquoi l'a-t-il laissé sur le marché? Pourquoi nous a-t-il exposé à ce poison? Elles se le demandent tous les jours", a-t-elle asséné.

Et le docteur Frachon ne compte pas laisser de répit à Jacques Servier tant qu'il n'y aura pas répondu. Selon elle, "il n'y a pas de raison de ne pas le juger parce qu'il a 91 ans".

Le tribunal correctionnel de Nanterre décidera mercredi si le procès du Mediator, se poursuit ou non.

"L'audience reprend mercredi à 13H30", a déclaré la présidente de la 15e chambre, Isabelle Prevost-Desprez, après avoir entendu les arguments des conseils des laboratoires Servier qui se sont livrés à une féroce bataille procédurale, réclamant l'annulation du procès.


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Mathilde Tournier avec Sarah-Lou Cohen