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Police-Justice

Procès du 13-Novembre: interrogé sur les préparatifs des attentats, Abdeslam reste mutique

Salah Abdeslam (croquis d'audience)

Salah Abdeslam (croquis d'audience) - AFP

À plusieurs reprises, le seul survivant du commando des attaques a affirmé ce mardi qu'il ne donnerait pas les noms des autres personnes impliquées dans la préparation des attentats.

Deuxième interrogatoire pour le seul survivant du commando terroriste. Au procès des attentats du 13-Novembre, la Cour entendait de nouveau Salah Abdeslam ce mardi, à propos des préparatifs des attaques, entre le mois d'août 2015 et le 7 novembre de la même année.

C'est en chemise à petits carreaux, les cheveux courts et gominés que Salah Abdeslam répond ce mardi aux questions du Président Périès. Notamment interrogé sur les locations de plusieurs véhicules en amont des attentats, qui ont permis de faire voyager les terroristes du commando depuis la Syrie et à travers l'Europe, il répond sur un ton sec et tendu.

"Je conteste avoir été chercher certaines de ces personnes. Celles que j’ai été chercher, ce sont mes frères de l’Islam, ils vivaient en zone de guerre. Ces frères avaient besoin d’aide, le prophète nous a interdit d’abandonner nos frères. Je le dis franchement, je regrette pas d’avoir été chercher ces personnes là", affirme-t-il depuis son box.

"Je donne pas de noms"

Questionné sur l'identité de la personne à l'origine de la location, et face au Président qui insiste en lui proposant des noms, Salah Abdeslam adopte une position qu'il maintiendra pendant toute l'audience, quelle que soit l'étape des préparatifs sur laquelle il est interrogé: il ne "balance" pas.

"Je peux pas vous le dire qui c’est. C’est pas parce que les gens font plus partie de ce monde que je balance des noms. Je donne pas de noms."

"Si on m'avait mieux traité, j'aurais peut-être répondu"

Qui vous a demandé de louer des voitures? Qui a fait les trajets à travers l’Europe? Des questions qui restent sans réponse, au terme de l'audience, ce mardi, et dont l'accusé dit ne pas vouloir porter toute la responsabilité.

"C’est pas parce que je dénonce pas que vous allez me le mettre sur le dos! Les gens veulent pas comprendre que ceux qui ont tué ne sont plus là. On dit que j’ai tué 160 personnes, que je savais tout, etc. C’est faux. C’est pas parce que je réponds pas aux questions que je suis responsable", martèle-t-il face aux juges.

Le Président interroge également Salah Abdeslam sur les motifs des locations. Ce dernier affirme qu'il n'était pas au courant qu'elles étaient destinées à transporter des personnes sur le point de commettre des attentats. Il explique au contraire avoir agi par fidélité, osant des parallèles avec la Shoah: "Pendant la Seconde Guerre mondiale, il y a des juifs qui se faisaient massacrer et qui en voulaient aux autres juifs du monde de ne pas venir les aider. Je ne voulais pas que les musulmans m’en veuillent."

"Et si vous aviez su qu’ils allaient commettre des attentats, seriez-vous allé les chercher?", lance Jean-Louis Périès. "Bonne question!", répond l'accusé sur un ton moqueur.

Face à son mutisme, la Procureure générale, Camille Hennetier, le presse de s'exprimer. "On a besoin de savoir, Monsieur Abdeslam, car pendant six ans vous n’avez rien expliqué sur ces voitures et ces trajets", réclame-t-elle. Ce à quoi Salah Abdeslam rétorque qu'il aurait peut-être répondu "si on [l']avait mieux traité".

Les avocats de la défense quittent la salle

C'est dans ce climat de tension que se poursuivent les débats, jusqu'à un incident qui finira par mettre fin à l'audience du jour. Alors que l'accusé déclare que la vie de certaines personnes dans le box est ruinée et accuse sans le dire policiers et juges, un avocat des parties civiles, Me Gérard Chemla, l'interpelle pour lui signifier qu'il y a une "forme d'indécence" à dire cela.

Si Salah Abdeslam ne répond pas, ses avocats, eux, se lèvent et accusent leur confrère de plaidier "avant l'heure". Le ton monte, alimentant la tension accumulée dans la journée.

Face à la défense qui continue à s'agacer, le Président finit par lâcher "Si vous n'êtes pas contents, changez de métier!", provoquant la sortie des avocats.

Cécile Danré avec Elisa Fernandez