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Police-Justice

Procès de la filière de Cannes-Torcy: les prémices des cellules jihadistes en France face à la justice

Les accusés sont apparus détendus au premier jour du procès de la cellule jihadiste de Cannes-Torcy.

Les accusés sont apparus détendus au premier jour du procès de la cellule jihadiste de Cannes-Torcy. - Benoit Peyrucq - AFP

Le procès de la filière jihadiste dite de Cannes-Torcy s'est ouvert jeudi devant la cour d'assises spéciale à Paris. 19 hommes, suspectés d'avoir appartenu à ce réseau à l'origine de l'attentat dans une épicerie casher en 2012, sont jugés pendant 53 jours.

Leurs modes d'action et leurs cibles illustrent les prémices du terrorisme qui sévit en France depuis trois ans. 19 hommes, suspectés d'avoir appartenu à la cellule jihadiste dite de Cannes-Torcy, sont jugés depuis jeudi devant la cour d'assises spéciale de Paris pour un attentat perpétré contre une épicerie casher en 2012, les projets d'attaques qu'ils voulaient mettre en place et des départs pour la Syrie, pour certains.

Sur les 19 suspects, âgés entre 23 et 33 ans, dix comparaissent détenus. Trois sont toujours recherchés. Malgré la gravité des faits qui leurs sont reprochés, c'est dans une ambiance détendue que les accusés sont arrivés devant la cour. Hilares, s'échangeant des sourires, s'interpellant entre eux, au moment de la suspension de séance, le box s'est transformé en cour de promenade. Poussant la provocation plus loin, certains sont allés jusqu'à s'endormir pendant la lecture des faits. 

Le leader abattu lors de son interpellation

Pourtant, les projets de cette cellule jihadiste, considérée comme la plus dangereuse démantelée depuis les attaques du GIA algérien dans les années 90, ont plongé la France dans une nouvelle ère terroriste. Le 19 septembre 2012, une grenade explose dans une épicerie casher à Sarcelles, dans le Val-d'Oise. Un personne est blessée légèrement, des vitrines sont brisées, mais le pire est évité.

L'enquête va mener les policiers jusqu'à un homme: Jérémie Louis-Sidney. Son empreinte est découverte sur la grenade. Radicalisé, l'homme, connu pour des faits de droit commun, avait semble-t-il fédéré autour de lui plusieurs personnes, des amis d'enfance pour la plupart. Jérémie Louis-Sidney a été abattu quelques jours après l'attentat de Sarcelles lors d'une opération antiterrorisme menée à Strasbourg. Sept autres individus avaient été interpellés.

Un procès "essentiel"

Après l'attaque de l'épicerie casher, les investigations vont également conduire jusqu'à un box à Torcy, en Seine-et-Marne. A l'intérieur: des armes, une cocotte-minute, des clous et des substances pour fabriquer des explosifs. Devant les policiers, Jérémy Bailly, présent devant la cour d'assises spéciale et considéré comme "le fidèle lieutenant" de Louis-Sidney, a expliqué que ces armes devaient être utilisées contre des juifs ou des militaires. 

"Il y a un groupe constitué, organisé autour de principaux leaders, qui ont une certaine influence, un pouvoir de sujétion sur les autres, tente de nuancer Me Elise Arfi, avocate de l'un des accusés. On a le sentiment, pour certains, qu’on est dans la bande d’amis."

Cette radicalisation express, les cibles, les départs en Syrie - certains des accusés ont été arrêtés à leur retour, comme Ibrahim Boudina, suspecté d'avoir voulu commettre un attentat sur la Côte d'Azur, sont des éléments nouveaux en matière de terrorisme sur le sol français qui vont pourtant se retrouver dans les différents attentats perpétrés depuis.

"Quand on lit l’acte d’accusation, on voit se profiler les attentats de 2015 et c’est pour ça qu’il est important de comprendre une partie de ces personnes", estime Stéphane Gicquel.

"Le jihadisme est un virus mutant. Il faut regarder comment ils se sont rencontrés, sur quoi ils se retrouvent, ce sont des gens qui ont aucune spiritualité, insiste Me Patrick Klugman, avocat des parties civiles. La seule chose qui les anime, c’est la haine des juifs et la volonté de tuer. Voilà leur religion, voilà leur dieu. Et ça on le retrouvera dans toutes les autres affaires. L’affaire de Cannes-Torcy elle est essentielle si on veut comprendre le jihadisme et le salafisme dans lequel nous vivons en France depuis plus de cinq ans."

Justine Chevalier