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Police-Justice

Lozère: un éleveur en détresse condamné pour avoir laissé mourir une partie de son troupeau

Un troupeau de mouton en 2018 (photo d'illustration)

Un troupeau de mouton en 2018 (photo d'illustration) - JEAN-CHRISTOPHE VERHAEGEN / AFP

Un agriculteur quarantenaire a laissé mourir une partie de son cheptel alors qu'il était particulièrement fragile psychologiquement à cause de la difficulté de son métier.

Un jeune éleveur vivant dans une grande solitude a été condamné lundi à 105 heures de travaux d'intérêt général par le tribunal correctionnel de Mende pour avoir laissé mourir ses chèvres et brebis dans une ferme isolée du Causse Méjean, en Lozère. À défaut d'exécuter sa peine dans les 18 mois, il devra effectuer deux mois de prison ferme, a précisé le tribunal, qui ne lui a pas infligé d'amende.

Âgé d'une quarantaine d'années, de taille moyenne et le visage ceint d'une barbe soigneusement taillée, des lunettes rondes lui donnant des allures d'instituteur, le prévenu a décrit à l'audience sa "descente aux enfers" pendant ce rude hiver 2020-2021 où son "rêve" s'est effondré face à l'adversité, la solitude, l'isolement croissant et les rapports de plus en plus conflictuels avec ses voisins agriculteurs ou son syndicat agricole.

"Je n'ai pas su faire, j'étais débordé, rien ne fonctionnait", a expliqué d'une voix posée cet homme mince qui s'était installé une dizaine d'années plus tôt dans une ferme isolée au-dessus des gorges du Tarn, au lieu-dit "La Maxanne", au coeur de la commune nouvelle de Massegros-Causses-Gorges.

71 animaux ont survécu sur l'ensemble du troupeau

Lui, qui avait été un "excellent éleveur" a totalement perdu pied: il "ne mangeait plus, ne se lavait plus, ne sortait plus de son moble-home", a expliqué son avocate, Isabelle Gaye, évoquant sa détresse. "C'est un monde où l'on est seul, tout seul", a-t-elle souligné en plaidant la relaxe.

C'est un ami de l'éleveur, sentant la précarité de sa santé mentale, qui avait prévenu les gendarmes. Lorsqu'ils sont arrivés à la ferme, ils ont découvert les cadavres en putréfaction de plus de 300 ovins et caprins ("9 tonnes", a souligné le procureur). Chèvres et brebis avaient été privées de nourriture et d'eau alors qu'il restait du fourrage en quantité suffisante, a-t-il ajouté.

Certaines bêtes, mourantes, ont dû être euthanasiées. Sur l'ensemble du troupeau, 71 ont survécu. L'éleveur avait quant à lui quitté les lieux quelques jours plus tôt. Le procureur a réclamé une reconnaissance de culpabilité, pour le principe, ainsi qu'une peine de travaux d'intérêt général car, a-t-il souligné, "quand on est éleveur, on n'a pas que la responsabilité de soi, mais aussi celle du cheptel".

Le prévenu, qui vit actuellement en Corrèze avec sa compagne, a expliqué avoir "fait une croix sur l'élevage". Sans ressources, il envisage désormais de se tourner vers l'enseignement agricole ou de devenir cultivateur.

A.A. avec AFP