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Police-Justice

Les QPC ralentissent-elles le cours de la justice ?

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La Question prioritaire de constitutionnalité (QPC) permet de contester la loi en mettant en doute sa compatibilité avec la Constitution. Une avancée juridique pour certains. Mais elle est de plus en plus utilisée par des prévenus célèbres, qui s’en servent pour repousser leurs procès…

C'est encore une Question prioritaire de constitutionnalité (QPC) qui a pour effet de reporter de plusieurs mois le premier procès pénal du Médiator. Elle a été soulevée par la défense de Jacques Servier, patron du laboratoire du même nom, qui conteste pouvoir être jugé à Nanterre et être en même temps mis en examen pour ces faits à Paris. La QPC, conçue comme une avancée juridique, permet de contester la loi appliquée en mettant en doute sa conformité avec la Constitution.
Mais on constate que depuis son introduction en mars 2010, elle est devenue une arme des prévenus illustres pour éviter tout examen sur le fond des affaires. En 2011, elle a permis à Jacques Chirac de reporter son procès de plusieurs mois. De la même façon, Jean Tibéri a obtenu le renvoi de son procès. Les QPC ralentissent-elles aujourd'hui le cours de la justice ?

« Une arme pour les plus puissants »

« D’évidence oui, répond à RMC Joseph Breham, avocat au barreau de Paris, à la fois auteur et contestataire de certaines QPC, notamment sur le procès des faux électeurs du 5ème arrondissement de Paris. Certaines QPC sont déposées en série, ou en rafale. Je sais qu’il y avait eu trois QPC dans le procès Chirac, quatre dans le procès des faux électeurs de la mairie de Paris, avec pour seul objectif de repousser le procès de plusieurs mois, voire un an ou deux. Les QPC sont des questions assez ardues, donc il faut avoir pour le client les moyens de payer son avocat. C’est devenu dans certains cas une arme pour les plus puissants. »

« La justice ne peut pas être rendue à la va-vite »

Dominique Rousseau est professeur de droit constitutionnel à la Sorbonne-Paris I. Pour lui, la QPC, c’est d’abord « une garantie pour le justiciable contre les mauvais jugements. Il vaut mieux que le problème soit soulevé au moment où le procès commence, et trancher, plutôt que le procès s’enclenche et que dans un ou deux ans, on se rende compte que le procès a commencé sur des bases fausses et qu’à ce moment-là on soit obligé de tout recommencer. La justice ne peut pas être rendue à la va-vite sur un coin de table. C’est un principe de sécurité juridique. »