BFMTV
Police-Justice

La zone euro éteint l'incendie, pour le moment

Le Premier ministre grec George Papandreou (au centre) avant une conférence de presse à l'issue du sommet européen crucial de mercredi à Bruxelles. L'accord arraché dans la nuit de mercredi à jeudi par les dirigeants de la zone euro a éteint temporairemen

Le Premier ministre grec George Papandreou (au centre) avant une conférence de presse à l'issue du sommet européen crucial de mercredi à Bruxelles. L'accord arraché dans la nuit de mercredi à jeudi par les dirigeants de la zone euro a éteint temporairemen - -

par Julien Toyer et Yann Le Guernigou BRUXELLES (Reuters) - L'accord arraché dans la nuit de mercredi à jeudi par les dirigeants de la zone euro a...

par Julien Toyer et Yann Le Guernigou

BRUXELLES (Reuters) - L'accord arraché dans la nuit de mercredi à jeudi par les dirigeants de la zone euro a éteint temporairement l'incendie qui menaçait la monnaie unique mais de nombreux risques pèsent encore sur la restructuration de la dette grecque et le renforcement du fonds de soutien à l'euro.

Après plus de dix heures de sommet, les chefs d'Etat et de gouvernement de la monnaie unique se sont entendus avec les banques pour réduire de 100 milliards d'euros la dette grecque et ont endossé un complexe mécanisme permettant de porter la puissance de tir du Fonds européen de stabilité financière (FESF) à 1.000 milliards.

Les marchés européens ont bondi et atteint leur plus haut niveau depuis trois mois alors que l'euro s'appréciait à plus de 1,40 dollar, une valeur qu'il n'avait plus franchi depuis début septembre.

Mais si cet accord complexe compte parmi les plus ambitieux conclus depuis l'éclatement de la crise de la dette en Grèce, fin 2009, il n'en est pas moins bancal, truffé de points d'interrogations et porteur d'importants risques quant à sa réalisation.

Les banquiers devront d'abord confirmer leur engagement volontaire à prendre part au nouveau plan de sauvetage de la Grèce - un processus qui avait été long et poussif dans le programme précédent.

Les pays de la zone euro devront ensuite s'entendre sur une série de détails loin d'être anodins dans la mise en place du nouveau FESF, comme la participation des investisseurs internationaux à ce dernier.

"J'estime que le principal risque serait d'attendre trop longtemps la mise en oeuvre de ces accords", a prévenu jeudi Ewald Nowotny, membre de la Banque centrale européenne.

"La vitesse est essentielle dans ce cas", a-t-il dit à la radio autrichienne ORF.

RESTRUCTURATION GRECQUE

Il y a trois mois, les leaders européens étaient déjà parvenus à un accord d'envergure sur une réduction de la dette grecque impliquant les créanciers privés, mais les retards pris dans l'exécution du plan et son manque d'ambition l'ont très vite rendu inopérant, du moins aux yeux des marchés.

Les décisions prises jeudi au petit matin, qui s'attaquent enfin à bras le corps aux questions de la dette grecque et de la contagion de la crise aux pays plus grands comme l'Italie, l'Espagne, voire la France, sont censées éviter à la zone euro de répéter les mêmes erreurs.

Pour la Grèce, il est prévu que sa dette soit ramenée de plus de 160% du PIB actuellement à 120% en 2020, un niveau jugé soutenable par les autorités européennes.

Pour ce faire, les gouvernements de la zone euro mettront sur la table 130 milliards d'euros sous forme de prêts et garanties, alors que les créanciers privés devront effacer quelque 100 milliards des 210 milliards d'euros de titres grecs qu'ils détiennent.

Cette contribution volontaire, censée être reçue d'ici la fin de l'année, équivaudra à un abandon de créance de 50%, ont dit Nicolas Sarkozy et Angela Merkel, qui ont dû se réunir en personne avec les représentants des banques et peser de tout leur poids pour forcer la décision.

Le directeur général de l'Institut de la finance internationale (IFI), Charles Dallara, qui représentait les banques dans la négociation, s'est félicité de cet accord qui révise le plan du 21 juillet, dans lequel le secteur privé n'était engagé qu'à hauteur de 50 milliards d'euros.

Comme attendu, les dirigeants des Vingt-Sept ont aussi endossé le plan de recapitalisation des banques à hauteur de 106 milliards d'euros d'ici le 30 juin 2012, dont 8,8 milliards pour les banques françaises.

Ce plan prévoit également des garanties publiques destinées à permettre aux banques de s'assurer des financements à moyen et long terme, sur le modèle de celles qui avaient été mises en oeuvre à l'automne 2008, au plus fort de la crise financière.

1.000 MILLIARDS D'EUROS POUR LE FESF

Troisième et dernier volet de la réponse européenne à la crise, les Européens se sont également entendus sur une démultiplication des capacités du Fonds européen de stabilité financière (FESF), qui pourraient ainsi être portées jusqu'à 1.000 milliards d'euros. Une initiative susceptible de rassurer les marchés sur sa capacité à voler, le cas échéant, au secours de pays comme l'Italie ou l'Espagne.

Ce Fonds disposait à sa création de 440 milliards d'euros mais le soutien apporté au Portugal et à l'Irlande et le montage financier complexe nécessaire pour lui assurer une note AAA ont réduit à environ 250 milliards aujourd'hui sa capacité effective résiduelle.

L'effet de levier sera obtenu via un double mécanisme: il s'agira d'une part d'assurer partiellement les dettes émises par des pays en difficulté et, d'autre part, de créer un nouveau "véhicule spécial" adossé au FESF et au Fonds monétaire international (FMI) auquel participeront des investisseurs internationaux, comme la Chine ou d'autres pays émergents.

Nicolas Sarkozy, qui a dit à Bruxelles que la participation chinoise était envisagée, s'est entretenu jeudi au téléphone avec son homologue chinois Hu Jintao.

Le directeur général du FESF, Klaus Regling, se rendra en Chine dès vendredi afin de rencontrer des investisseurs.

S'il avait été exclu depuis le week-end dernier de démultiplier le FESF en lui donnant accès aux liquidités illimitées de la Banque centrale européenne, l'institut d'émission a joué un rôle actif dans l'avant-sommet.

Offrant un peu de répit aux marchés, le futur président de BCE, Mario Draghi, avait indiqué mercredi matin que la banque resterait présente sur les marchés obligataires tant que ceux-ci seraient instables, un signe attendu depuis plusieurs jours dont s'est félicité Nicolas Sarkozy.

"Je suis pas le porte-parole de la BCE. La BCE est une institution indépendante. M. Draghi ne nous a pas interrogés avant de prendre cette décision, nous ne lui avons rien demandé, mais il est permis de se réjouir de ce qu'il a dit, qui est assez clair", a-t-il dit lors d'une conférence de presse, insistant ensuite sur ces rachats de dette.

Edité par Marc Angrand