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Haute-Garonne: des femmes victimes de violences conjugales "remises à la rue"

La préfecture de Haute-Garonne (illustration)

La préfecture de Haute-Garonne (illustration) - PASCAL PAVANI / AFP

33 femmes victimes de violences conjugales vont devoir quitter leur hébergement à l'hôtel en Haute-Garonne, d'après une décision de la préfécture.

La préfecture de la Haute-Garonne a mis fin à l'hébergement à l'hôtel de 33 femmes victimes de violences conjugales, a-t-elle confirmé à l'AFP jeudi, une mesure dénoncée par des associations qui craignent qu'elles "se retrouvent à la rue".

"Depuis trois semaines, 33 femmes - certaines accompagnées d'enfants - ont été informées par les services de l'État de la fin de leur hébergement à l'hôtel, sans qu'aucune solution alternative ne leur soit proposée", ont assuré la Fédération des acteurs de la solidarité (FAS) d'Occitanie et la Fédération nationale solidarité femmes (FNSF) dans un communiqué publié mardi.

"Sous huit jours, elles doivent quitter l'hôtel qu'elles occupaient depuis plusieurs mois", explique Anne-Claire Hochedel, déléguée régionale de la FAS.

D'autres alertes

Les associations craignent que ces femmes soient contraintes de retourner vivre avec un conjoint violent, ou qu'elles soient soumises à d'autres violences, "notamment des violences sexuelles pour obtenir la possibilité d'être hébergées", souligne Françoise Brié, directrice générale de la FNSF.

La FNSF a lancé une enquête au sein de son réseau d'associations pour savoir si des fins de mise à l'abri avaient été constatées ailleurs en France. Françoise Brié précise avoir reçu deux autres "alertes" dans l'Essonne et en Vendée, sans savoir combien de femmes sont concernées.

De son côté, la préfecture justifie la fin des prises en charge par leur durée "excédant un an", face à un dispositif d'accueil "saturé".

"La volonté du préfet est de préserver l'inconditionnalité de l'accueil, mais celui-ci doit faire l'objet d'un accompagnement social, permettant de réévaluer les situations et de trouver une issue à l'hébergement d'urgence", soutient-elle.

Une centaine de personnes, essentiellement des travailleuses sociales, se sont rassemblées à la mi-journée à Toulouse pour demander la réintégration des 33 femmes dans le dispositif d'hébergement d'urgence.

"Un pas en arrière énorme"

Beaucoup refusent de s'exprimer en leur nom, par devoir de réserve pour celles qui travaillent dans des services de l'État ou par peur d'un impact sur leurs subventions pour celles qui sont en association.

"Quand les femmes ont assez de ressource et de force pour partir (du domicile conjugal, NDLR), il faut une logistique derrière pour les accueillir, sinon notre travail ne sert à rien!", s'indigne Anabelle Lhuaire, 52 ans, qui s'occupe de l'accueil de jour dans une structure pour les victimes de violences.

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"C'est un pas en arrière énorme, c'est très grave, surtout quand on voit le nombre de féminicides chaque année", dénonce Coline Auroy, coordinatrice au sein de l'association Espoir, qui héberge des personnes en situation d'exclusion.

Selon la déléguée régionale de la FAS, ces décisions de la préfecture s'inscrivent dans une politique générale de limitation du nombre de nuitées hôtelières pour les personnes sans domicile, qui sont coûteuses pour l'État.

Dans le budget 2023, le gouvernement avait initialement prévu de supprimer 14.000 places d'hébergement d'urgence, mais y avait renoncé après les protestations de maires et d'associations.

L'État crée en parallèle des places pour les femmes victimes de violences, avec l'objectif d'en atteindre 11.000 dans l'année. La FNSF estime qu'il en faudrait 15.000.

3919: le numéro de téléphone pour les femmes victimes de violences.

Le "3919", "Violence Femmes Info", est le numéro national de référence pour les femmes victimes de violences (conjugales, sexuelles, psychologiques, mariages forcés, mutilations sexuelles, harcèlement...). C'est gratuit et anonyme. Il propose une écoute, informe et oriente vers des dispositifs d'accompagnement et de prise en charge. Ce numéro est géré par la Fédération nationale solidarité femmes (FNSF).

T.P. avec AFP