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Police-Justice

Finistère: des sous-marins nucléaires mal protégés

Le sous-marin nucléaire "Saphir"

Le sous-marin nucléaire "Saphir" - -

Une enquête du Télégramme révèle mardi d'édifiants problèmes de sécurité sur la base de l'Ile-Longue, dans le Finistère, qui abrite des sous-marins nucléaires.

Badgeuses à bout de souffle, clôtures en mauvais état, absence de chicanes, de scanner pour véhicules et même de batterie de missiles sol-air, personnel inexpérimenté... Et pourtant, la base de l'Ile-Longue, située en rade de Brest, est ultrasensible. Elle héberge quatre sous-marins nucléaires lanceurs d'engins (SNLE). Ils sont entretenus, entre deux patrouilles, dans cette base où sont également assemblés les missiles intercontinentaux, pouvant emporter chacun six têtes nucléaires, qui arment ces sous-marins.

"Sur la base, pas de système de contrôle biométrique, qui offre pourtant une incomparable garantie d'authentification grâce à la reconnaissance digitale et/ou de l'iris de l'oeil", note Le Télégramme dans son édition de mardi, qui affirme que la base, coeur de la dissuasion nucléaire française, va renforcer ses mesures de sécurité.

Des véhicules peu fouillés

Mais pour l'instant, l'identification des personnels autorisés à y pénétrer "s'effectue au moyen de badges nominatifs équipés d'une simple bande magnétique (très facilement copiable) et d'une photo", explique le journaliste qui signe l'enquête, Hervé Chambonnière, ajoutant que "ces badges ne permettent pas non plus de tracer leurs porteurs, et notamment de savoir s'ils ont bien quitté la base en fin de journée". Quant aux véhicules, le sésame consiste en "un vulgaire morceau de feuille de papier blanc, où figurent quelques informations basiques".

"Alors que le site est en travaux depuis 2006 (aménagements liés au nouveau missile M51), pourquoi les nombreux camions-bennes et toupies qui y pénètrent, et qui peuvent cacher de grandes quantités d'explosifs ou de nombreuses personnes, ne sont-ils pas systématiquement inspectés, comme nous l'avons constaté à plusieurs reprises à l'entrée de la base?", questionne le journaliste.

Des gardes jeunes, peu formés et peu payés

Son enquête pointe également d'autres failles, comme la vulnérabilité des "transrades", des bateaux qui effectuent la navette entre Brest et l'Ile-Longue et transportent la moitié des effectifs (1.200 personnes) travaillant sur le site, ou la ligne électrique desservant l'Ile-Longue, "parfaitement accessible". "Si les zones-clés du site sont censées être autonomes, quel serait l'impact sur le fonctionnement du site si un ou plusieurs pylônes étaient détruits?"

"À noter, également, l'absence de chicane devant l'entrée de la base et dans la base. Impossible d'empêcher un camion-suicide de parvenir jusqu'à la "cathédrale", principal sas d'accès au coeur du site, où plusieurs centaines de personnes se pressent aux heures de pointe", affirme le quotidien, qui relève aussi qu'"une bonne partie des 115 gendarmes maritimes" affectés à la surveillance "sont gendarmes adjoints volontaires, donc débutants, très jeunes, peu formés (...) et peu payés".

La sécurité prise à défaut plusieurs fois

"Par ailleurs, un seul canot pneumatique, sous-motorisé, avec trois à six personnels à bord, est disponible pour intercepter sur le champ toute intrusion maritime". Le journal cite également des appels d'offres publics dans lesquels "on apprend que l'Ile-Longue nécessite la "construction d'un nouveau poste d'accès et la modernisation des moyens de filtrage", "le renforcement de l'alimentation électrique", "l'approvisionnement et la maintenance d'un groupe électrogène de secours"".

La sécurité du site a été prise en défaut à plusieurs reprises, assure aussi le journal. "En juin 2012, deux individus présentant un "badge noir" (sésame délivré à une dizaine de personnes dispensées de contrôle) sont entrés dans la base et sont parvenus jusqu'à un sous-marin, sur lequel ils ont matérialisé un engin explosif", relate le quotidien. "Les mêmes individus ont réussi à ressortir de la base sans être inquiétés", poursuit-il, précisant qu'il "s'agissait, heureusement, d'un test de sécurité, probablement mené par des commandos Marine de Lorient". Le capitaine de corvette Lionel Delort, officier-presse de la préfecture maritime à Brest, n'a pas souhaité réagir dans l'immédiat.