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Police-Justice

Fillon poursuit Jouyet et deux journalistes du Monde au tribunal

D'après Le Monde l'an passé, l'ancien Premier ministre François Fillon aurait demandé à l'actuel secrétaire de l'Elysée, Jean-Pierre Jouyet, d'accélérer les démarches judiciaires pour "bloquer" le retour de Nicolas Sarkozy en politique. Ce que va démentir l'ancien Premier ministre devant le tribunal ce jeudi.

Démentant être intervenu pour demander une accélération des procédures judiciaires contre Nicolas Sarkozy, l'ex-Premier ministre François Fillon poursuit ce jeudi au tribunal le secrétaire général de l'Elysée Jean-Pierre Jouyet, les journalistes du Monde Gérard Davet et Fabrice Lhomme, ainsi que leur journal et leur éditeur.

L'affaire éclate en novembre dernier. Dans le quotidien du soir et dans leur livre Sarko s'est tuer, les deux journalistes affirment que, lors d'un déjeuner à Paris le 24 juin 2014, François Fillon a demandé à Jean-Pierre Jouyet que l'Elysée accélère les poursuites contre l'ancien président pour entraver son retour.

"Mensonge", avait répliqué l'ancien chef du gouvernement, dont la présence est annoncée devant le tribunal correctionnel de Paris. Après avoir démenti dans un premier temps, le secrétaire général de l'Elysée avait finalement affirmé dans une déclaration à l'Agence France-Presse (AFP) que François Fillon avait évoqué lors de ce déjeuner l'affaire Bygmalion et celle des pénalités infligées à Nicolas Sarkozy pour dépassement de ses dépenses de campagne en 2012, qui ont été réglées par l'UMP.

Le troisième homme

Dans cette affaire, dans laquelle les juges d'instruction ont terminé récemment leurs investigations, l'ex-chef de l'Etat a été entendu sous le statut de témoin assisté, échappant à une mise en examen.

Le troisième homme présent le 24 juin, Antoine Gosset-Grainville, ami de Jean-Pierre Jouyet et François Fillon, avait défendu la version de ce dernier. Il est cité comme témoin au procès. Pour l'avocat de l'ancien locataire de Matignon, Jean-Pierre Versini-Campinchi, François Fillon est victime "d'une opération politique réfléchie" pour le "détruire".

"Ce ne sont pas des partisans politiques, ce sont des journalistes qui publient des informations d'intérêt général", fait valoir François Saint-Pierre, qui avec ses confrères Marie Burguburu et Christophe Bigot assure la défense de Gérard Davet et Fabrice Lhomme.

Un enregistrement, et des questions

Les journalistes s'appuient sur un enregistrement qu'ils ont réalisé lors d'un entretien avec Jouyet le 20 septembre à l'Elysée. On y entend Jouyet raconter que François Fillon avait demandé de "taper vite" contre Nicolas Sarkozy. La défense de l'ancien Premier ministre avait vainement demandé à la justice de pouvoir récupérer l'enregistrement dans son intégralité.

Dans leur offre de preuve, les journalistes produisent les seuls extraits de l'enregistrement relatifs à ce déjeuner. Un "caviardage" dénoncé par Me Versini-Campinchi. Pour Me Bigot, les propos litigieux ne sont pas diffamatoires, car ils prêtent à François Fillon une dénonciation, concernant l'affaire des pénalités, de faits susceptibles de constituer une infraction.

Face à Jean-Pierre Jouyet, François Fillon demande "que la justice fasse son travail", abonde Me Saint-Pierre, "il n'a pas demandé qu'il soit fait entrave". Mais "évidemment, ça le met en porte-à-faux vis-à-vis de Nicolas Sarkozy". Et si les journalistes du Monde ont pris le parti de ne pas solliciter Antoine Gosset-Grainville pour recueillir sa version, c'est pour éviter une stratégie qui selon Me Bigot se serait mécaniquement mise en place pour "faire échec à la publication".

Un euro de dommages et intérêts, contre une procédure abusive

"A partir du moment où ils contactaient M. Gosset-Grainville", ajoute-t-il, "ils tuaient l'info". François Fillon demande un euro de dommages et intérêts et des mesures de publications judiciaires. Les journalistes demandent quant à eux non seulement la relaxe, mais la condamnation de François Fillon pour procédure abusive.

La présence de Jean-Pierre Jouyet à l'audience reste incertaine. Son avocat, Jean Veil, n'a pas souhaité s'exprimer avant le procès. A l'issue de l'audience, prévue sur la journée, le tribunal devrait mettre son jugement en délibéré à plusieurs semaines.

Jé. M. avec AFP