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Féminicide de Mérignac: la famille de Chahinez Daoud attaque l'État pour "faute lourde"

Des fleurs sont déposées le 5 mai 2021 à Mérignac, près de Bordeaux, à l'endroit où une femme de 31 ans a été brûlée vive par son mari

Des fleurs sont déposées le 5 mai 2021 à Mérignac, près de Bordeaux, à l'endroit où une femme de 31 ans a été brûlée vive par son mari - MEHDI FEDOUACH © 2019 AFP

Chahinez Daoud a été brûlée vive par son ex-mari contre lequel elle avait plusieurs fois porté plainte. Sa famille veut faire reconnaître des "dysfonctionnements du service public de la justice".

Près de deux ans après la mort de Chahinez Daoud, brûlée vive en pleine rue à Mérignac, en Gironde, par son ex-mari contre lequel elle avait porté plainte à plusieurs reprises, sa famille attaque l'État pour faute lourde et faire reconnaître "les dysfonctionnements des services publics de la justice".

"Tout a manqué dans ce dossier, estime auprès de BFMTV.com Me Julien Plouton, l'avocat de la famille de Chahinez Daoud. C'est une catastrophe tout au long de la chaîne judiciaire."

"Cas d'école"

Le 4 mai 2021, Chahinez Daoud, mère de trois enfants, était blessée par plusieurs balles avant d'être brûlée vive en pleine rue à Mérignac par son ex-mari, déjà condamné à deux reprises pour des violences à son encontre. Un mois avant, cette femme de 31 ans, mère de trois enfants, avait porté plainte contre cet homme, qui l'avait à nouveau agressée après sa sortie de prison.

La gestion de cette affaire est "un cas d'école sur ce qu'il ne faut pas faire", estime Me Plouton. Selon lui, ces "défaillances" de l'institution débutent "dès le départ" quand, Mounir B., alors incarcéré pour des violences sur sa compagne et mère de son enfant, reprend à 36 reprises contact avec elle, ce qui lui est interdit, la menaçant de revenir à son domicile.

"Il n'y a pas eu de coordination entre les différents services", pointe l'avocat.

Le 15 mars 2021, l'homme est remis en liberté. Il agresse Chahinez Daoud, la force à monter dans son véhicule, la frappe et tente de l'étrangler. La mère de famille porte plainte immédiatement. Une fiche de recherche est lancée mais l'homme n'est pas interpellé. Deux mois plus tard, Chahinez Daoud est assassinée. "On nous dit qu'on n'a pas réussi à le localiser mais en réalité on ne s'est pas donné les moyens de l'interpeller", note Me Plouton.

"Nous avions dans le dossier des éléments inquiétants de sa personnalité, il était toujours présent autour de Chahinez et il l'a menacée, mais on n'a pas bougé", poursuit-il.

Reconnaissance d'une "faute lourde"

Un rapport de l'Inspection générale de l'administration (IGA) et un autre de l'Inspection générale de la police nationale (IGPN) ont pointé une série de fautes d'appréciations et d'erreurs d'appréciation qui, mises bout à bout, ont conduit à ne pas empêcher le passage à l'acte du conjoint. Les fautes relevées par les deux inspections concernent l'enquête en elle-même: une plainte mal enregistrée le 15 mars 2021 et une procédure bâclée.

Cinq policiers ont écopé de sanctions en janvier 2022 allant de l'avertissement à trois jours d'exclusion temporaire de fonction avec sursis.

Une demande d'indemnisation à l'amiable a été lancée par les parents de Chahinez Daoud et de ses trois enfants qui sont désormais, au terme d'un long combat, sous l'autorité parentale de leurs grands-parents maternels.

"La demande n'est pas motivée par l'indemnité mais par la reconnaissance d'une faute lourde", insiste Me Plouton.

L'État a déjà été condamné pour "faute lourde" après la mort de femmes victimes de violences conjugales, notamment pour son "inaptitude" à protéger ces victimes. L'avocat bordelais regrette que dans ces affaires "tout change et rien ne change". Une femme a été tuée en Gironde la semaine dernière par son ex-compagnon déjà condamné pour des violences conjugales.

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https://twitter.com/justinecj Justine Chevalier Journaliste police-justice BFMTV