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Police-Justice

Des "stups" devenus trafiquants

Le tribunal correctionnel de Saintes en Charente-Maritime juge un réseau de traficants pas comme les autres... puisqu'on y trouve deux anciens brigadiers-chefs des "stups" d'Orléans...

Le tribunal correctionnel de Saintes en Charente-Maritime juge un réseau de traficants pas comme les autres... puisqu'on y trouve deux anciens brigadiers-chefs des "stups" d'Orléans... - -

Des policiers "ripoux" devant le tribunal correctionnel de Saintes (Charente-Maritime). Poursuivis pour trafic de stupéfiants, ils sont soupçonnés d'avoir écoulé des kilos de cannabis, d'héroïne et de cocaïne.

Le tribunal correctionnel de Saintes en Charente-Maritime juge, à partir de ce mercredi et jusqu'à vendredi, un réseau de 11 trafiquants. Un réseau pas comme les autres, puisqu'on y trouve deux anciens brigadiers-chefs des "stups" d'Orléans. Deux policiers, qui pendant deux ans ont fourni en drogue les alentours de la station balnéaire de Royan (Charente-Maritime). Pour trafic de stupéfiants, détournement de scellés et vols aggravés, les deux fonctionnaires ont été révoqués en mars dernier, et encourent 10 ans de prison.

200 kg de cannabis, 25 d'héroïne et 2 de cocaïne

Quel était le mode opératoire de ces deux policiers ? Ils allaient tout simplement se servir dans les locaux de la police judiciaire d'Orléans. Et précisément, dans la salle des armes, où une armoire sert à stocker le cannabis, la cocaïne et l'héroïne, saisis et pas encore détruits. Les deux policiers ne se gênent pas, pendant deux ans, en 2007 et 2008, ils récupèrent 200 kilos de cannabis, 25 d'héroïne et 2 de cocaïne. Et pour être plus discrets, ils remplacent les produits par du chocolat ou du plâtre. Une fois les drogues sorties du poste de police, ils livrent la marchandise à un garagiste qui fournit directement le revendeur.
Avec un approvisionnement aussi simple, la drogue pouvait être vendue à des prix sérieusement soldés.

« C'était réglé comme du papier à musique »

Alexandre Novion, l'avocat du garagiste qui récupérait la drogue des mains des deux policiers et était chargé de la distribuer aux revendeurs, explique la « simplicité » avec laquelle fonctionnait ce trafic : « C'était réglé comme du papier à musique : mon client se déplaçait pour obtenir les livraisons de produits. C'est vrai qu'on est frappé par les facilités que la présence des forces de l'ordre a pu procurer. Et ce qui est plus pittoresque, c'est que même les enquêteurs en surveillance, n'y croyaient pas ; ils pensaient même que les policiers étaient en rapport avec un indicateur et ne voulaient pas les compromettre dans une histoire. »

« Confrontés aux trafics, ils ont perdu pied »

Les policiers expliquent leurs gestes par leur passion pour les sports automobiles. Une passion très coûteuse, qu'ils ne pouvaient, disent-ils, assouvir avec leurs salaires de fonctionnaire... Maître Ladislas Wedrychowski, l'avocat de l'un des policiers, tente lui d'argumenter pour expliquer comment son client est devenu trafiquant : « A un moment donné, on perd peut-être notion de ce qu'est la légalité, en étant confronté, au jour le jour, avec des quantités très importantes de produits stupéfiants. La frontière entre la légalité et l'illégalité... quand il faut rémunérer des informateurs avec des produits stupéfiants, on peut perdre pied.
Il faut expliquer à tout le monde la réalité du travail de ces fonctionnaires : pour pouvoir livrer à la justice d'importants trafics, ça ne tombe pas comme ça du ciel. Et la règle des 10% sur les saisies, ça existe dans la pratique des brigades de stupéfiants. »

La rédaction, avec Thomas Chupin