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Police-Justice

Des policiers caméramans pour les interventions à risques ?

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Après les incidents de Montfermeil, une initiative émerge : équiper les policiers de caméras pour prouver les violences qu’ils subissent et éviter les polémiques.

Les policiers doivent-ils s'équiper de caméras vidéos pour rendre compte des évènements lors d'interventions ? C'est en tout cas le souhait du directeur de la sécurité publique de Seine-Saint-Denis, Jean-François Herduin. Le but est de filmer le travail des policiers en intervention. Pour montrer la difficulté de certaines interventions, mais aussi pour confronter leurs images aux vidéos tournées par des amateurs en cas de besoin.

La polémique de Montfermeil

Cette idée est motivée par les récents évènements de Montfermeil (Seine St-Denis), où deux policiers ont été confondus par une vidéo amateur la semaine dernière. On les voit en train de frapper avec une matraque et la crosse d'un flashball un jeune homme de 20 ans qu'ils viennent d'interpeller. Un peu plus tôt dans la soirée, les policiers avaient été victimes dans ce quartier de divers jets de projectiles. Ils soupçonnaient ce jeune étudiant en BTS d'être l'un des auteurs de ces violences. Il devra d'ailleurs répondre de ces faits le 10 décembre prochain devant le tribunal correctionnel.

Les deux policiers ont reconnu les faits et ont été mis en examen pour violences aggravées et placés sous contrôle judiciaire mercredi soir. Ils n'ont plus le droit pour l'instant d'exercer leur métier.

Contre les pièges tendus à la police

Jean-François Herduin, directeur de la sécurité publique de Seine-Saint-Denis, explique le type de dispositif qu'il souhaiterait voir mis en place : « C'est par exemple une voiture avec des policiers qui feront leur travail mais qui auront des moyens vidéos pour filmer certaines interventions. Ca a pour but surtout de rapporter des images sur les actions de la police et les violences qu'elle subit au quotidien. Il y a des pièges qui nous sont tendus au quotidien. La police va filmer les scènes de violence pour quelques fois légitimer l'emploi de la force dans de bonnes circonstances. Tous les jours, il y a des scènes d'affrontements entre bandes ou d'agression de policiers, et ces images-là, ces faits-là, ne doivent pas être écartés. Ca peut expliquer, sans les excuser, que certains fonctionnaires, à Montfermeil, qui venaient de recevoir des tirs de mortier, de feux d'artifices et de cailloux, n'étaient pas dans un état d'esprit tout à fait serein. On peut aussi expliquer des fautes de comportement, de jugement sans les excuser et ils seront sanctionner pour cela ».

« La police n'a rien à cacher »

Côté syndical, on ne semble pas opposé à cette idée. Nicolas Comte, le secrétaire général du syndicat de police SGP-FO, précise cette position : « Nous, on part du principe que la police n'a rien à cacher donc le fait qu'il y ait des caméras à l'intérieur des véhicules de police ne nous dérange pas. Je pense que bien souvent d'ailleurs ça pourra éviter un certain nombre d'accusations infondées. Ca permettrait de démontrer la difficulté du métier de policier. Maintenant, je vois mal comment on pourrait faire en sorte qu'il y ait un caméraman par véhicule de police et que chaque intervention soit filmée. On sait rarement quelle opération, ou à quel moment les choses peuvent dégénérer ».

Non aux gendarmes contre les voleurs

Pour Jean-Pierre Dubois, président de la Ligue des Droits de l'Homme, « ces caméras, ça dépend à quoi elles servent. Si elles servent, et je pense que ça va être le cas, à établir les faits et à montrer qu'il y a eu ou qu'il n'y a pas eu de dérapage et que les choses se sont passées correctement, bien sûr que c'est bien. Il faut qu'il y ait de la transparence, il ne faut surtout pas étouffer. En revanche, il ne s'agit pas de faire images contre images, sinon ça serait vraiment les gendarmes contre les voleurs et deux bandes qui s'affrontent. Il ne faut pas que la police descende à ce niveau-là. Il ne faut pas que chacun ait son service de presse pour se renvoyer la responsabilité. Ce qui compte, c'est que la police intervienne comme la police de la République, dans le respect des lois. C'est souvent difficile, mais ça ne doit pas être œil pour œil, dent pour dent, parce qu'on n'est pas dans un match violents contre violents ».

Seine Saint Denis : une compagnie déjà équipée

Cette idée de caméras pour les policiers fait écho à une autre initiative : la Compagnie de Sécurisation, une nouvelle unité de police chargée en Seine-Saint-Denis de lutter contre les violences urbaines, est déjà équipée de caméras. Cette Compagnie de Sécurisation est composée de 109 policiers chargés de lutter spécifiquement contre les violences urbaines. Des policiers en tenue, mais aussi en civil, chargés d'intervenir dès que des échauffourées commencent.

Comme l'un des problèmes principaux lors de violences urbaines est de trouver les auteurs et de fournir des preuves pour qu'ils soient condamnés devant la justice, ces policiers sont équipés de caméras vidéo, notamment des petites caméras clipées à leur ceinture, et de matériel de police technique et scientifique pour relever un maximum de preuves après un incident et confondre les auteurs.

La rédaction et Sébastien Gilles