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Police-Justice

Des pilotes inquiets de la sécurité

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Des syndicats de pilotes d'Air France réclament à la direction de la compagnie aérienne française, fragilisée par le crash du vol Rio-Paris, des mesures de sécurité supplémentaire. Explications.

Tandis que le crash du vol AF447 Rio-Paris, disparu dans l'Atlantique le 1er juin dernier, reste à ce jour inexpliqué, la Direction générale de l'aviation civile (DGAC) a mis en ligne ce jeudi 23 juillet un nouveau service dédié à la sécurité des compagnies aériennes, afin de renseigner les passagers sur les niveaux de risque de celles-ci. La veille, 4 syndicats de pilote, inquiets de la sécurité chez Air France, ont envoyé une lettre à la direction de la compagnie aérienne française, pour réclamer des mesures de sécurité supplémentaire. Représentant 30% des effectifs des pilotes de la compagnie, ils dressent un « constat d'échec » de la compagnie. « Nous n'avons plus le droit à l'erreur » soulignent-ils, tout en réclamant :
- que l'entretien des sondes Pitot mesurant la vitesse de l'avion soit ramené de 18 à 6 mois.
- la mise en place d'une séance de simulateur spécifique pour les situations de crise.
- une modification des compositions d'équipage pour qu'aucun avion ne s'éloigne de plus de 2 heures d'une piste d'atterrissage avec seulement 2 personnes dans le cockpit.

« La direction ignore les signaux qu'envoient leurs pilotes »

François Nénin, journaliste spécialisé en aéronautique, auteur de l'ouvrage Crash aériens, ce qu'on vous cache (Editions Michel Lafon), se réjouit que « des syndicats mettent aujourd'hui sur la place publique le problème de la sécurité des vols à Air France. Parce qu'il y a problème, poursuit-il. Moi, j'enquête depuis un moment sur la compagnie. Et j'ai une lettre qui remonte à janvier 2005, signée du responsable du secteur long courrier des Airbus A330 et A340. Il constate un certain nombre d'erreurs pouvant véritablement conduire à l'accident, et il termine cette lettre de façon édifiante : "sommes-nous toujours conscients du risque lié au pilotage d'un avion, surtout dans les phases décollage et atterrissage, et de la nécessaire concentration que cela impose ? Sommes-nous toujours présent en tant que pilote ? Partir de Roissy n'est pas un non-événement ; l'avons-nous toujours à l'esprit ?". Tous ces signaux qui remontent de la base, des pilotes, à en croire les syndicats qui aujourd'hui saisissent la direction, ne sont pas pris en compte. [...] Il est plus que temps que la direction prenne conscience de ce problème et adopte des mesures correctives pour garantir la sécurité des passagers. Parce que l'enjeu est important ; c'est celui de la confiance. Celle des consommateurs, mais aussi des navigants, notamment des hôtesses et des stewards. »

Air France, 21ème des 24 grandes compagnies européennes

Egalement rédacteur en chef du site Securvol.fr, lancé en juillet 2008, François Nénin y a établi un classement des compagnies en 5 catégories - de A, "bon niveau", à E, "interdite en Europe ou à interdire" - en se fondant sur toute une série de paramètres, de la formation du personnel au nombre d'accidents déplorés. Air France y est classé en catégorie B, "niveau correct". « Parce qu'il y a eu quand même une récurrence d'incidents graves et d'accidents aussi, justifie-t-il. Air France est d'ailleurs en 21ème position d des grandes compagnies européennes, sur un classement de 24 compagnies. Et il y a en moyenne un crash tous les 4 ans. Donc, les faits sont là.
En juin 2006, le rapport Colin notait déjà un certain nombre de faiblesses importantes, en termes de formation, d'appropriation réelle et concrète de capacités d'évaluation des facteurs humains dans la population des pilotes. Un certain nombre de signaux d'alarme ont été lancés au sein de l'entreprise depuis un certain temps. Et ils sont, semble-t-il, ignorés par la direction. »

Ce site dissipe par ailleurs le préjugé selon lequel toutes les compagnies africaines sont à éviter : Tunisair figure en catégorie A. Air Algérie, Air Madagascar, Air Mauritius et Royal Air Maroc, en catégorie B.

La rédaction-Bourdin & Co