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Police-Justice

Audience-clé dans l'affaire Bettencourt

La cour d'appel de Bordeaux examine ce jeudi la demande de libération de Patrice de Maistre, l'ex-gestionnaire de fortune de l'héritière de L'Oréal Liliane Bettencourt, soupçonné d'avoir organisé un financement frauduleux de la campagne présidentielle de

La cour d'appel de Bordeaux examine ce jeudi la demande de libération de Patrice de Maistre, l'ex-gestionnaire de fortune de l'héritière de L'Oréal Liliane Bettencourt, soupçonné d'avoir organisé un financement frauduleux de la campagne présidentielle de - -

BORDEAUX (Reuters) - La cour d'appel de Bordeaux examinera jeudi la demande de libération de l'ex-gestionnaire de fortune de l'héritière de...

BORDEAUX (Reuters) - La cour d'appel de Bordeaux examinera jeudi la demande de libération de l'ex-gestionnaire de fortune de l'héritière de L'Oréal Liliane Bettencourt, soupçonné d'avoir organisé un financement frauduleux de la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy en 2007.

L'incarcération jeudi dernier de Patrice de Maistre, mis en examen pour "abus de faiblesse" notamment, suscite une vive tension sur ce dossier, en pleine campagne électorale. A moins d'un mois du premier tour de l'élection présidentielle, l'opposition de gauche somme Nicolas Sarkozy de s'expliquer, tandis que le camp de l'UMP rejette les accusations.

Si Patrice de Maistre restait en prison, il serait sous pression pour ses prochaines dépositions devant le juge d'instruction Jean-Michel Gentil, qui examine notamment de mystérieux retraits d'espèces de 800.000 euros en Suisse à la veille de l'élection de 2007, et ses liens avec Eric Woerth, alors trésorier de l'UMP et de la campagne Sarkozy.

Sollicité par Reuters, le parquet général de Bordeaux a refusé de dire quelle serait sa position sur la demande de remise en liberté de l'ancien homme de confiance de Liliane Bettencourt qui était, à l'époque des faits, membre du "Premier cercle" regroupant les donateurs fortunés de l'UMP.

Lundi, une première demande de libération a été refusée en "référé" (urgence), ce qui signifie qu'il n'y a aucune erreur de droit manifeste. Mais comme le prévoit la procédure, la formation collégiale de la chambre de l'instruction va désormais se pencher sur le fond du litige.

RETRAITS EN SUISSE, VISITE DE SARKOZY

En annonçant le 23 mars la mise en détention du suspect, le parquet de Bordeaux n'a pas mentionné le motif invoqué par le juge Gentil, mais l'ordonnance de ce dernier, finalement dévoilée par Le Journal du dimanche, évoque explicitement des faits nouveaux mis au jour par la Suisse.

Une "commission rogatoire" (demande d'aide) du juge Gentil à Genève a fait apparaître des retraits en espèces ordonnés par Patrice de Maistre sur la fortune Bettencourt en Suisse de quatre millions d'euros au total entre 2007 et 2009, dont deux retraits de 400.000 euros chacun au premier semestre de 2007, le 5 février et le 26 avril.

Dans son ordonnance demandant la détention de Patrice de Maistre, dont des extraits ont été publiés par le JDD, le juge Gentil remarque que le premier de ces deux derniers retraits a été effectué deux jours avant une rencontre Maistre-Woerth et que le second retrait correspond à un autre détail du dossier.

Dans son carnet saisi par la police, le photographe François-Marie Banier, proche de Liliane Bettencourt, rapportait à cette même date du 26 avril une phrase de la milliardaire: "De Maistre m'a dit que Sarkozy avait encore demandé de l'argent. J'ai dit oui".

Le juge Gentil a aussi relevé dans son ordonnance que "des témoins attestent d'une visite du ministre de l'Intérieur Nicolas Sarkozy au domicile des Bettencourt pendant la campagne électorale". Le magistrat juge donc "nécessaires des investigations s'agissant de ces remises de 2007".

"RECEL"

Le juge Gentil a déjà mis en examen le 9 février Eric Woerth pour "recel" d'une autre somme de 150.000 euros qui auraient financé la campagne de Nicolas Sarkozy en 2007, retirés aussi en partie en Suisse. Dans son communiqué annonçant cette décision, le parquet n'avait pas mentionné le motif de la mise en cause.

Nicolas Sarkozy, qui a refusé de commenter les derniers développements de l'affaire, bénéficie, tant qu'il est chef de l'Etat, d'une immunité qui empêche toute audition comme témoin ou poursuite.

L'opposition de gauche somme le président de renoncer à cette protection, comme l'ancienne juge Eva Joly, candidate écologiste, dans un entretien publié par Libération mercredi.

"Il est candidat, il veut que les citoyens lui fassent confiance pendant cinq ans, nous sommes en droit de connaître sa version des faits. Il bénéficie d'une immunité totale (...) il n'y a que lui qui peut y renoncer et demander à être entendu par le juge Gentil", a-t-elle déclaré.

La candidate du Front national, Marine Le Pen, a souligné un autre aspect de l'affaire, rappelant que Liliane Bettencourt était démente depuis au moins 2006, selon une expertise versée au dossier.

"Est-ce qu'il y a un délit plus grave, plus affreux, plus moralement condamnable que celui qui consiste à abuser de la faiblesse d'une vieille dame ? Je ne le crois pas", a-t-elle dit sur France 2.

Claude Canellas, avec Thierry Lévêque à Paris, édité par Patrick Vignal