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Police-Justice

Amiante: quand Aubry se défendait face à sa juge

La maire de Lille Martine Aubry, qui était Directrice des relations du travail dans les années 1980.

La maire de Lille Martine Aubry, qui était Directrice des relations du travail dans les années 1980. - -

Pas de négligence, pas de faute, pas de lien avec le lobby de l'amiante: les procès-verbaux de sa mise en examen, en novembre dernier, révèlent les dénégations en bloc de Martine Aubry face aux soupçons de la justice.

C'est un tête à tête entre deux femmes, en plein mois de novembre 2012, dans un bureau du Pôle de santé publique, à Paris. D'un côté, la juge d'instruction Marie-Odile Bertella-Geffroy. De l'autre, la maire de Lille Martine Aubry, mise en examen dans un dossier qui remonte au temps où elle était Directrice des relations du travail, entre mars 1984 et septembre 1987, celui de l'amiante.

Le contenu de cette entrevue est relaté dimanche par Le Figaro, qui a eu accès aux procès verbeaux. Dans le bureau de la juge, qui ne pose aucune question, Martine Aubry relate les faits de manière chronologique. Tout en se défendant de toute responsabilité dans ce drame sanitaire. "Dire que je pourrais avoir fait preuve de négligence, c'est pour moi insoutenable et surtout faux", se défend-elle. "Aucune faute ne peut m'être imputable."

La juge enquête sur la réponse apportée par les pouvoirs publics aux méfaits de l'amiante à partir des années 1970. Elle a fait mettre en examen Martine Aubry car elle estime que celle-ci n'avait pas pris les mesures qui auraient permis d'éviter les conséquences de l'exposition des travailleurs à l'amiante, à qui les autorités sanitaires imputent 10 à 20% des cancers du poumon.

"Deux ans de consultations prévues par la loi"

Ce jour-là, Marie-Odile Bertella-Geffroy reproche notamment à Martine Aubry la lenteur avec laquelle elle aurait transcrit en droit français une directive européenne de 1983, qui renforce la protection des salariés face à l'amiante.

La maire de Lille rétorque qu'elle n'a fait que respecter le cadre légal. "On a fait deux ans de consultations prévues par la loi pour préparer le décret. Le texte a été préparé par la Direction du travail en 1985-1986 et transmis dans les délais en novembre 1986 au cabinet du ministre."

"J'ignorais l'existence du CPA"

Quand la juge aborde les soupçons de collusion entre l'Etat et le lobby de l'amiante, Martine Aubry ne cache plus son agacement. "J'ignorais tout de l'existence du CPA", martèle la maire de Lille. "CPA" pour Comité permanent amiante, lobby composé notamment d'industriels, qui prônait alors un "usage raisonné" de l'amiante.

Marie-Odile Bertella-Geffroy lui rappelle alors que Jean-Luc Pasquier, son adjoint à l'époque, siégeait au conseil permanent du CPA. "M. Pasquier n'a participé qu'une seule fois au CPA pendant les trois ans et demi où j'ai exercé mes fonctions à la Direction des relations du travail", rétorque Martine Aubry. La juge n'en tirera rien de plus.

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