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Police-Justice

Affaire Grégory: Murielle Bolle confrontée à son cousin

Ce vendredi, Murielle Bolle sera confrontée à son cousin qui, trente-trois ans après les faits, a assuré aux gendarmes qu'elle avait été violentée par sa famille pour revenir sur sa version initiale qui accusait Bernard Laroche.

Deux versions différentes en tous points sont appelées à s'opposer ce vendredi dans le bureau de la présidente de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Dijon. Une confrontation doit en effet mettre aux prises Murielle Bolle et son cousin dans le cadre de l'enquête autour de l'affaire Grégory. Face à la magistrate, et en présence du procureur général de Dijon, Jean-Jacques Bosc, l'un et l'autre auront la parole à tour de rôle. Chacun, accompagné de ses avocats, sera interrogé sur ses déclarations qu'il devra confirmer ou non devant la justice. Des questions pourront également être posées au cousin par les avocats de Murielle Bolle

Le cousin, très sérieusement malade, s'est fait connaître très récemment en allant trouver les gendarmes, trente-trois ans depuis les faits, après avoir suivi sur BFMTV l'interpellation des époux Jacob, qui a relancé l'histoire qui plane au-dessus des eaux de la Vologne depuis trois décennies. Expliquant vouloir "soulager sa conscience" et pousser sa cousine à faire de même, il avait assuré les agents de sa présence au domicile des Bolle le 5 novembre 1984, y avoir été témoin du "lynchage" de Murielle et avoir été le destinataire de confidences de la première importance de la part de celle-ci. 

5 novembre 1984, la date-charnière 

Lundi 5 novembre 1984, la date est cruciale dans l'histoire de l'affaire et s'affirme comme le point de bascule de la trajectoire de Murielle Bolle dans le dossier. Ce soir-là, la jeune fille alors âgée de 15 ans revient à Aumontzey, ou plus précisément à Laveline-devant-Bruyère, dans les Vosges, dans la maison de ses parents, Lucien et Jeanine. Avant ça, elle a accablé son beau-frère Bernard Laroche à partir du 2 novembre, devant les gendarmes. Elle leur a en effet raconté que le 16 octobre, jour de la mort de Grégory, en sortant de cours, elle n'a pas pris le bus comme à son habitude mais est montée dans la voiture du mari de sa grande soeur Marie-Ange, venu la chercher. Elle a ajouté que le fils de Bernard Laroche était aussi assis sur la banquette arrière.

Peu après, le récit est devenu plus dense pour les enquêteurs. Dans cette version, Murielle Bolle expliquait que son beau-frère s'était arrêté en chemin pour prendre Grégory, le fils de Jean-Marie et Christine Villemin, et le faire monter dans sa voiture, avant de stopper à nouveau sa voiture, d'en descendre avec le dernier arrivé et de retrouver l'habitacle sans lui. Le 2 novembre au soir, le juge alors chargé de l'instruction, Jean-Michel Lambert, n'était pas présent. Mais au sortir du week-end, le 5 novembre, Murielle Bolle a réitéré ce même récit devant le magistrat. Celui-ci a alors pris la décision de procéder à l'arrestation de Bernard Laroche et Murielle Bolle a, quant à elle, été autorisée à rentrer au domicile familial. 

Un "lynchage"

C'est à ce retour et à cette soirée que son cousin dit avoir assisté, alors qu'alors âgé de 21 ans il avait fait la route jusqu'aux Vosges avec les siens pour voir cette branche de la famille secouée par l'affaire Grégory. Le Monde a cité des extraits de sa déposition devant les gendarmes le 17 juin dernier (témoignage qu'il a également rendu devant Claire Barbier, la présidente de la cour d'appel de Dijon, le 27 juin).

Il a ainsi avancé: "Lorsque nous sommes arrivés, nous sommes tombés pile poil sur une scène insoutenable, un lynchage de ma cousine Murielle". Décrivant le "lynchage" auquel il aurait assisté, il a poursuivi: "Elle a pris énormément de gifles par les membres de sa famille, c’est-à-dire son père Lucien. Ma tante Jeanine a frappé également car elle était dans une colère noire. Et la personne qui l’a le plus secouée était Marie-Ange qui lui criait : "Tu as envoyé ton beau-frère en prison."

Des confidences de Murielle Bolle? 

Selon lui, un avocat s'était alors interposé pour calmer les esprits...et souffler à la jeune fille la meilleure manière de récuser son propre témoignage porté devant les gendarmes (ce qu'elle fera d'ailleurs dès le lendemain). Le calvaire de l'adolescente ne s'était pas arrêté là, d'après son cousin. A table, l'ambiance est délétère. Son père lui lance une chaussure à la figure, l'insulte et l'expulse de la maison. Selon les dires du témoin, la mère de l'adolescente l'a alors chargé de porter de quoi dîner à sa fille. Il a expliqué que cette dernière lui avait répété ce qu'elle avait exposé devant les gendarmes. Ajoutant en outre un détail, absent de sa déposition: "Bernard a remis le gamin à deux personnes alors qu’il faisait presque nuit, et il est revenu sans le gosse."

Ce couple auquel Bernard Laroche aurait, d'après le cousin de Murielle Bolle, remis Grégory a vivement intéressé les enquêteurs en juin 2017, pour lesquels il s'agissait d'un élément inédit d'un écho singulier dans une période qui avait vu l'arrestation des époux Jacob.

L'intéressée nie

Interpellée le 28 juin dernier, et mise en examen pour enlèvement de mineur de moins de quinze ans suivi de mort, Murielle Bolle, aujourd'hui une femme de 48 ans, a été interrogée par les gendarmes au sujet des déclarations de son cousin. Elle a tout d'abord affirmé, à nouveau selon Le Monde, que le nom de celui-ci ne lui "disait rien" et ne "pas se souvenir" s'il était présent ou non, le 5 novembre 1984. A-t-elle bien tenu les propos que son cousin lui prête malgré tout? "Ce n'est pas vrai", a-t-elle dit aux enquêteurs. 

La version que présente Murielle Bolle, dont la demande de remise en liberté doit être étudiée le 4 août, est désormais bien différente de celle des premiers jours de novembre 1984. Le 16 octobre 1984, elle dit avoir tout simplement grimpé à bord de son bus scolaire en direction d'Aumontzey, sans croiser en route ni de Bernard Laroche ni de Grégory Villemin. 

Robin Verner