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Police-Justice

Accès au dossier dès la garde à vue: la justice refuse

Lundi trois avocats ont demandé l'annulation des gardes à vue de leurs clients devant le tribunal correctionnel de Paris (photo), invoquant une directive européenne.

Lundi trois avocats ont demandé l'annulation des gardes à vue de leurs clients devant le tribunal correctionnel de Paris (photo), invoquant une directive européenne. - -

Lundi, trois avocats ont plaidé la nullité de la garde à vue de leurs clients devant le tribunal correctionnel de Paris, au motif qu'on leur avait refusé de consulter le dossier. La justice a refusé leur demande.

Le tribunal correctionnel de Paris a refusé lundi soir d'annuler les gardes à vue de trois prévenus dont les avocats dénonçaient le fait de s'être vu refuser l'accès aux dossiers de leurs clients quand ils étaient entre les mains de la police.

En l'état actuel du droit, les avocats n'ont accès au dossier de leur client que lorsque celui-ci est mis en examen ou entendu en qualité de témoin assisté. Le droit européen voudrait pourtant que cet accès soit possible dès la garde à vue.

Adapter le droit avant même la transposition de la directive

Par cette action, qui intervient à quelques mois de la transposition d'une directive européenne sur le sujet, les avocats entendaient peser sur cette adaptation du droit français. L'accès au dossier en garde à vue est une revendication de longue date des avocats, qui a jusqu'alors été rejetée par le Conseil constitutionnel et la Cour de cassation.

Les avocats s'appuiaient cette fois sur la directive européenne du 22 mai 2012, qui doit être transposée en droit français avant le 2 juin 2014. Elle dispose notamment que "lorsqu'une personne est arrêtée et détenue à n'importe quel stade de la procédure pénale, les États membres veillent à ce que les documents (...) qui sont essentiels pour contester (...) la légalité de l'arrestation ou de la détention soient mis à disposition de la personne arrêtée ou de son avocat".

Les avocats s'appuiaient surtout sur un principe selon lequel l'autorité judiciaire "doit adapter le droit national aux objectifs fixés par la directive" sans nécessairement attendre sa transposition, a plaidé Maître Alexandre Vermynck, premier secrétaire de la conférence.

Sortir du "système de l'aveu d'une personne déstabilisée"

Le tribunal a le "pouvoir de mettre un terme à une injustice", a lancé l'avocat au président Patrick Ramaël et ses deux assesseurs. Maître Vermynck leur a demandé de sortir du "système" fondé sur "l'aveu en garde à vue d'une personne déstabilisée". Son confrère Thomas Klotz a quant à lui appelé les juges à mettre fin à un "archaïsme aujourd'hui intenable". "C'est un mouvement qui commence", a souligné Mapitre Marie-Alix Canu-Bernard, membre du conseil de l'ordre. Les trois avocats ont plaidé ces nullités dans un dossier de vol comptant trois prévenus.

Après plus d'une heure et demie de délibéré, le tribunal a rejeté ces demandes, estimant que les effets de la directive ne peuvent être invoqués avant l'expiration du délai de transposition, dès lors qu'aucune disposition allant à l'encontre des objectifs de ce texte n'a été prise.

Pour autant, les avocats ne désarment pas. Ils prévoient dores et déjà de plaider à nouveau pour demander l'application de ce principe lors d'autres audiences, et vont mettre à la disposition de leurs confrères leurs conclusions sur ce point afin qu'ils puissent les plaider, notamment dans le cadre des permanences pénales des avocats.