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Téléréalité: "Qui dit spectacle dit risque", analyse François Jost

François Jost, spécialiste des médias, sur BFMTV le 10 mars 2014

François Jost, spécialiste des médias, sur BFMTV le 10 mars 2014 - BFMTV

Le crash qui a coûté la vie à 10 personnes en Argentine a eu lieu lors du tournage d'une émission d'aventure française. Un tel drame est-il de nature à remettre en cause l'avenir de ce type de programmes? Un spécialiste des médias fait le point sur BFMTV.

François Jost, professeur des universités en sciences de l'information et de la communication ce mardi l'invité de Ruth Elkrief. L'auteur de "Télé-réalité" et "L'empire du Loft" a tenté de décrypter sur BFMTV la plus grande tragédie de la télé-réalité, au lendemain du crash qui a fait 10 morts en Argentine, ont trois sportifs français célèbres. 

Comment analyser ce qui s'est passé?

Depuis que la télé-réalité existe, il y a eu un glissement. Plus personne ne croit à la réalité de ces émissions, donc on est allé vers des jeux de divertissement qui correspondent aussi à notre époque, c'est à dire des jeux de l'extrême. Les gens eux-mêmes font aujourd'hui des choses très dangereuses quand ils sont en vacances. On est passé d'une expérience de vie à du pur spectacle.Et qui dit spectacle, dit risque.

Les conditions de sécurité sont-elles suffisantes dans ces émissions?

Faire appel à de grands sportifs, c'est aussi limiter les risques. Le risque d'accident est plus important encore avec des amateurs. Là, on prend des gens très forts pour affronter des épreuves. D'une certaine façon, je pense que l'émission limitait ces risques-là.

Il ne faut pas faire le procès de la télé-réalité car ce qui est arrivé était alentour. D'une certaine façon, ce qui est arrivé sur Koh-Lanta il y a deux ans était plus grave parce que les conditions de jeu étaient en cause.

Faut-il arrêter ces jeux?

Bien sûr cela entache la télé-réalité. On va faire de nouveau un peu le procès de la télé-réalité et celui de la télévision mais tant qu'on n' a pas plus de résultats de l'enquête, il faut tout de même rester prudent. Il ne faut pas lyncher ces jeux. C'est arrivé quand les gens se rendaient sur le plateau du tournage. Donc il ne faut pas exagérer. Marcel Cerdan a pris un avion et il est mort, mais on n'a pas arrêté la boxe. Je pense que c'est tout à fait exagéré.

Il ne faut pas oublier non plus que les candidats sont payés extrêmement cher, ils sont consentants. C'est très triste mais ils ont voulu faire cette émission. Et puis le public est responsable aussi, on ne peut pas toujours accuser la télévision. Il y a des gens qui suivent ces émissions. Elles ne présentent pas de choses choquantes, violentes ou pornographiques et ne relèvent pas d'une censure qui, de toutes façons ne pourrait intervenir qu'après coup.

Quelles leçons peut-on tirer de ce drame?

On est dans une escalade de l'extrême et des jeux de l'extrême. Peut-être faut-il revenir un peu en arrière et faire des jeux comme Fort Boyard qui reste très attractif pour beaucoup de jeunes mais sans aller aussi loin, loin dans les pays, dans la rapidité des tournages, etc. Je ne crois pas par ailleurs que ce tournage ce soit fait à l'économie. Les pilotes étaient extrêmement compétents.

Ce drame a atteint le moral des gens parce que c'était de grands champions et les champions sont des héros. Or, nous avons besoin de héros.

Propos recueillis par A.D. avec Ruth Elkrief