BFMTV
TV

Le Monde détruit par erreur 50.000 clichés d'archive uniques

Le photographe accuse le quotidien Le Monde d'avoir détruit une partie importante de ses archives.

Le photographe accuse le quotidien Le Monde d'avoir détruit une partie importante de ses archives. - -

Le photographe argentin Daniel Mordzinski a appris ce 7 mars que le contenu de l'armoire dans laquelle il conservait les diapositives et négatifs originaux, dans les locaux du Monde, a été vidé et détruit par erreur.

27 ans de travail photographique inestimable, quelque 50.000 clichés subitement disparus? Le photographe argentin Daniel Mordzinski semble désespéré et en colère. Sur son site, dans un billet publié le 18 mars, il accuse le quotidien Le Monde d'avoir détruit une partie importante de ses archives.

Il raconte en quelques lignes sa version des faits : "Pendant plus de dix ans nous utilisions, en vertu de l'accord entre El Pais et Le Monde, un espace du septième étage de la rédaction parisienne du quotidien du soir, où nous gardions des milliers de négatifs et de diapositives originaux. Ils ont disparu, comme ça, rien de plus."

Le local réaffecté et vidé

Selon Daniel Mordzinski, c'est le collègue d'El Pais dont il utilisait le local qui aurait fait cette découverte : "Miguel Mora [...] est arrivé le 7 mars dans ce local et a constaté qu'il avait été complètement vidé, sans nous avertir que tout avait disparu." De tous ces clichés, seuls lui restent ceux qu'il avait numérisés en vue de les exposer.

Un salarié du journal confirme cette version : "Je me suis adressé à la direction générale, on m'a confirmé qu'il y avait eu un déménagement intempestif suivi d'un vidage de l'armoire où étaient stockés ces travaux. Les services généraux ont par erreur détruit le contenu. Tout le monde ici est complètement atterré."

"Un profond mépris"

Le photographe n’a pas de mot assez dur pour accuser le quotidien : "Plus encore qu’injuste et absurde, je trouve paradoxal le fait que Le Monde fasse ses gros-titres – et je suis sûr que c’est avec des sentiments les plus sincères – pour défendre la liberté d’expression [...], mais que des milliers de photographies, des centaines de dossiers avec pour légende "Cortazar", "Israël", "Ecrivains latino-américains", "Semaine noire à Gijon", "Carrefour de littératures", "Saint Malo", "Mercedes Sosa", "Astor Piazzola" etc. ne leur disent rien, et qu’ils jettent tout à la poubelle sans consulter personne."

Daniel Mordzinski était fier de son patient travail d’immortalisation du monde littéraire contemporain, qui rassemble parmi les plus grands artistes de notre siècle.

Une réparation possible?

Il paraît, à la lecture de son petit texte, au moins aussi abasourdi de voir toute une partie de ce travail livrée aux flammes: "J’aimerais [...] que l’on ait conscience que ce qu’il s’est passé au Monde est plus que de la négligence: c’est un profond mépris pour un travail qui fait partie de la mémoire de notre culture contemporaine, au moins dans la mesure où ces protagonistes sont les écrivains qui donnent nature et dignité à notre langue et notre monde."

Le Monde réfléchit à une réparation à proposer au photographe, qui a annoncé au journal argentin Clarin que venant de lui, le prochain contact sera... par l'entremise d'un avocat.

Daniel Mordzinski est reconnu dans le monde entier pour ses portraits d’écrivains parmi les plus illustres, comme Borges, Vargas Llosa ou Cortazar. Beaucoup d'auteurs français sont également passés sous son objectif : Claude Levi-Strauss, Daniel Pennac, mais aussi Amélie Nothomb ou même Frédéric Beigbeder…