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Le boom des expositions-spectacles

L'exposition Harry Potter à la cité du cinéma de Saint-Denis.

L'exposition Harry Potter à la cité du cinéma de Saint-Denis. - Magali Rangin - BFMTV

Véritables expériences immersives, les expositions-spectacles, comme Harry Potter ou Star Wars Identities, se multiplient et attirent un public conquis et nombreux. Quelle est la recette de ces expo-spectacle?

Quel est le point commun entre Harry Potter et Toutankhamon, Star Wars et le Titanic? Ce sont tous des thèmes d’exposition-spectacle. De vastes expositions immersives, qui voyagent dans le monde entier et déplacent les foules sur tous les continents.

Le monde magique de Harry Potter, fait salle comble à la Cité de cinéma de Saint-Denis depuis le 4 avril dernier. Avant lui, Maître Yoda avait chauffé la place, en compagnie de Dark Vador et toute l’équipe de La guerre des étoiles, avec l’exposition Star Wars Identities, actuellement à Lyon. Paris a également accueilli, en 2014, l’exposition Titanic, et Toutankhamon en 2012. Ces expositions-spectacles ne sont pas un phénomène nouveau. La première du genre, Cités-Cinés, à La Villette, a vu le jour en 1987. Et le public belge a pu plonger dès 1993 dans l'univers de Georges Simenon. Mais elles connaissent aujourd'hui un véritable essor.

La recette est toujours à peu près la même. Ces expositions, sur des sujets historiques (Toutankhamon, la guerre de 14-18, Titanic) ou culturels (le cinéma, Harry Potter, Star Wars, Indiana Jones), mêlent culture et divertissement, avec un dosage qui varie d'une exposition à l'autre.

Pour Jesse Phillips, directeur marketing de GES Entertainment, qui organise l'expo Harry Potter, "peu de marques ou d'histoires sont assez populaires pour donner lieu à ce genre d'exposition". Mais si le thème est déterminant, l'ingrédient-clé des expo-spectacles, c'est l'immersion.

Immersion et émotion

"Les expositions-spectacles privilégient l'immersion et l'émotion, plus que la réflexion offrant au visiteur une plongée dans un univers, réel ou fictif, à l'aide d'une scénographie immersive", décrit Noémie Drouguet, maître de conférence à l’université de Liège et docteur en muséologie. Décors et reconstitutions sont ainsi la base de ces expositions, qui recourent à des technologies du monde du spectacle, soignant particulièrement l'éclairage et le son. Les odeurs contribuent même parfois à l'expérience.

Débauche de moyens et gros battage médiatique sont les deux autres mamelles des expo-spectacle. Et si la promotion n'est pas l'apanage de ces événements, "un tiers du budget de ces expos est consacré au marketing", estime Noémie Drouguet. L’aspect économique est d’autant plus important que ces expositions sont très chères à monter et à gérer. Harry Potter a ainsi déménagé dans “26 camions, et mobilisé 50 personnes pendant trois semaines pour son installation”, décrit Jesse Phillips, qui ne souhaite pas dévoiler le coût d'une telle expo.

Rentabilité et merchandising

Organisées par des sociétés privées, elle ne bénéficient, la plupart du temps, d’aucune subvention et se montent grâce à des sponsors, comme Warner Bros. ou Lucasfilm pour Harry Potter et Star Wars Identities. Il faut donc rentabiliser.

Le visiteur doit ainsi parfois débourser beaucoup. Entre 17 et 22 euros pour Harry Potter et Star Wars Identities, des événements qui ciblent pourtant un public populaire. Et dans les boutiques qui attendent les spectateurs à la sortie de l'exposition, on trouve des objets de merchandising -baguettes magiques, peluches ou encore des maillots de Quidditch- plutôt que les traditionnels cartes postales ou livres.

Des expositions comme Harry Potter ont pourtant le mérite "d’attirer un public biberonné à Internet et à la télévision, dans des musées, d’y réunir plusieurs générations de gens", se réjouit Jesse Phillips. Sauf que les visiteurs de ces expo "n’auront pas forcément envie d’en savoir plus, d’aller au musée, à la bibliothèque, pour creuser le sujet", tempère Noémie Drouguet.

Reliques et petites vitrines

Musées classiques et expo-spectacles ne sont pas pour autant des mondes hostiles, et leur frontière poreuse favorise une influence réciproque. "Les expo-spectacles empruntent des éléments scénographiques aux musées, comme les vitrines, cimaises, socles, estrades, tout ce qui donne un caractère muséal est convoqué quand on présente de vrais objets", explique Noémie Drouguet. Certains accessoires des films Harry Potter sont ainsi présentés à la Cité du cinéma, comme des reliques, dans de petites vitrines. 

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- © Magali Rangin - BFMTV

De leur côté, certains musées s’inspirent de ces expositions. "Il utilisent, à plus petite échelle, la scénographie d’immersion pour jouer sur le registre de l’émotion, tout en conservant un caractère scientifique, et l’envie de faire découvrir quelque chose au visiteur", détaille Noémie Drouguet.

Politiquement correct

Et c'est là ce qui différencie les expo-spectacles des musées, et marque peut-être la limite du phénomène. Certes le visiteur-spectateur en a plein les yeux, mais, ce sont parfois des "coquilles vides, sans grandes ambitions sur le plan de la réflexion", estime la maître de conférence.

"Souvent consensuelles, et toujours politiquement correctes", ses expositions n'ont pas de "vraie démarche scientifique", juge Noémie Drouguet. "Elles exploitent des sujets connus et rebattus", poursuit-elle. Avant de conclure que, lorsque ces expo-spectacles s'attaquent à des sujets plus complexes, elles ne sont pas au niveau des musées traditionnels: "elles n'offrent pas un point de vue, elles restent dans une démarche classique". 

Pas de quoi rebuter le public pour autant. En 2014, 400.000 spectateurs se sont pressées à Saint-Denis pour visiter Star Wars Identities, selon Télérama. Seuls Van Gogh et Cartier-Bresson ont fait mieux. 

L'exposition Titanic mettait le visiteur dans la peau d'un voyageur.
L'exposition Titanic mettait le visiteur dans la peau d'un voyageur. © Joël Saget - AFP
Magali Rangin
https://twitter.com/Radegonde Magali Rangin Cheffe de service culture et people BFMTV