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A l'Opéra Garnier, les étoiles sont dans l'escalier

Une danseuse du ballet de l'opéra de Paris, dans le spectacle "Vingt danseurs pour le 20e siècle", le 19 septembre 2015.

Une danseuse du ballet de l'opéra de Paris, dans le spectacle "Vingt danseurs pour le 20e siècle", le 19 septembre 2015. - François Guillot - AFP

La première saison de l'ère Millepied vient de s'ouvrir à l'opéra Garnier. Une petite révolution dans les couloirs et les escaliers de la vénérable institution.

L'étoile est sous l'escalier. Deux jeunes ballerines font du hip hop sur le balcon. Une autre rejoue la scène mythique de Et Dieu créa la femme. Les danseurs de l'Opéra de Paris sortent de la grande scène pour investir salons et couloirs du Palais Garnier pour 11 représentations jusqu'au 11 octobre.

20 danseurs pour le XXe siècle n'est pas un spectacle, mais une balade libre où le public peut picorer à son aise parmi 80 solos, de Balanchine à John Travolta et de Pina Bausch au flamenco. Les spectateurs assistent bouche bée au détour d'un couloir à un solo "Bollywood" ou aux entrechats de la très classique "Bayadère" de Noureev, mais exécutés pieds nus sur le marbre du grand foyer.

Bee Gees et Balanchine

Une vingtaine de danseurs du prestigieux ballet de l'Opéra de Paris, dont l'étoile Benjamin Pech participent à cette aventure. Quand un danseur rompu à la virtuosité du ballet classique se déhanche sur "Stayin' alive" des Bee Gees, c'est l'hilarité générale. Cette "balade" dansée a été imaginée par Boris Charmatz, à la tête du Centre chorégraphique national de Rennes (rebaptisé "Musée de la danse"), un concept qu'il a déjà expérimenté au Moma de New York et à la Tate Modern de Londres. "C'est une sorte d'exposition vivante", explique-t-il.

"C'est un peu comme se balader dans les studios de l'opéra, au moment où des danseurs répètent sur des musiques différentes: on voit le travail de la danse". "Pour les visiteurs, c'est une grosse différence: on n'est pas assis face à la grande scène, on est tout à coup à deux mètres du danseur, on peut lui parler", ajoute-t-il. Contrairement aux éditions précédentes données au Moma et à la Tate, ce ne sont pas des spécialistes de chaque danse qui les exécutent (Japonais pour le Butô, Indiens pour Bollywood etc.) mais les danseurs classiques du corps de ballet de l'Opéra, formés par une quinzaine d'intervenants extérieurs.

"On voit que ça vacille"

"Les danseurs se mettent en danger, ce n'est pas forcément leur répertoire habituel, il n'ont pas de sol de danse, certains sont sur du marbre ou des planchers glissants", observe-t-il. "Et puis quand on les voit de près, il sont plus exposés que sur scène, on voit leur fatigue, on voit que ça vacille ... c'est un autre regard sur la danse!"

Benjamin Pech exécute sous le grand escalier de Garnier un éblouissant Spectre de la rose - un ballet de Michel Fokine qui a été dansé par Nijinski -, en baskets et jogging. "Quand je danse sur du marbre, je ne peux pas sauter comme sur le plancher d'une scène, donc l'enjeu c'est plutôt de rester dans une fidélité artistique, d'être au plus proche de ce que le chorégraphe avait voulu à l'époque", dit-il.

Music hall et hip hop

"Je m'en vais à la retraite (42 ans à l'opéra) dans six mois, donc je trouve que c'est un trait d'union assez joli de déplacer le spectacle de la scène à la salle", souligne-t-il. A côté de l'étoile et des premiers danseurs habitués aux solos, beaucoup de jeunes ne dansent habituellement qu'en formation, et donnent en public leurs premiers solos. La jeune Juliette Gernez virevolte sur des airs de music-hall dans une jupe à damier très "années 50", et ses benjamines Marion Gautier de Charnacé et Caroline Osmont évoluent en baskets sur du hip hop - "crump" ou "voguing" - qu'on voit habituellement en boîte de nuit plutôt qu'à l'opéra.

Chaque danseur exécute 3 ou 4 solos différents en moyenne, dans onze lieux du Palais Garnier. Le visiteur peut soit grappiller les solos au fil de sa déambulation, soit rester auprès d'un seul danseur. "De toute façon, on ne peut pas tout voir", prévient Boris Charmatz: mis bout à bout, les solos prendraient 4 ou 5 heures, quand la visite est prévue pour durer 1h30, et 3h le samedi. "20 danseurs pour le XXe siècle", du 25 septembre au 11 octobre, tarif unique 15 euros.

M. R. avec AFP / Vidéo, Edouard Bonnamour