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Comment fabrique-t-on un tube de l'été?

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Les maisons de disques fourbissent déjà leur futur tube de l'été. Plus qu'un mois pour pousser leur poulain sur les radios et les télés. Rythme, paroles, calendrier, quelle est la recette du tube de l'été?

Chaque année, un ou plusieurs tubes animent les campings, font danser les boîtes de nuit et enflamment les clubs Mickey tout l'été. Jusqu'à l'overdose. Alors qu'on commence à peine à envisager le régime qui va nous transformer en Doutzen Kroes, les premiers futurs hit envahissent déjà les bacs et les réseaux sociaux. Nous avons décortiqué la formule du tube de l'été.

"Plutôt enjoué, familial, un refrain identifiable, facilement mémorisable pour les enfants, une petite touche exotique...", la recette du tube de l'été semble simple et immuable. Et pourtant, explique Laurent Rossi, à la tête du label Jive Epic, chez Sony, "il n'y a pas de formule magique".

"La Lambada, c'est la quintessence du tube de l'été"

Revenons aux origines des tubes de l'été, en 1989. Les tubes de l'été n'ont certes pas attendu La Lambada. Il y a eu Hotel California, Richard Anthony et Joe Dassin. Mais "la Lambada, c'est la quintessence du tube de l'été: un refrain accrocheur, un rythme 'ensoleillé', qui invite à la danse, des paroles faciles à reprendre, même si elles ne sont pas en français, une chorégraphie", détaille Thomas Joubert, auteur de Les années Top 50.

Et un plan marketing en béton. La Lambada avait ainsi pour partenaire TF1, qui matraquait le morceau à longueur de journées, et Orangina.

Grosses ficelles

Ont suivi quelques titres, souvent oubliables, sur le même modèle: Soca dance, dès l'année suivante, puis Ala li la ou la Macarena, ont creusé le même sillon, tout au long des années 90, jusqu'à l'épuiser. "Les ficelles étaient devenues trop grosses", explique Thomas Joubert. "Aujourd'hui les tubes de l'été n'ont pas forcément été fabriqués pour être un tube de l'été. On a l'impression qu'ils sont moins markettés 'tube de l'été'". "Aujourd'hui, cette fabrication un peu énormissime, ça n'existe plus", confirme Laurent Rossi.

Et si cette recette est éculée, le tube d'été demeure. Toujours très codifié. Avec des paroles facilement identifiables, et un titre facile à chanter, type "Waka waka", ou "Allez ola olé". Exit les balades "plus difficile à caser en été", selon Laurent Rossi, le rythme doit être endiablé. Et le message enjoué. Façon Collectif métissé, et son Laisse tomber tes problèmes. La chorégraphie est aussi un élément déterminant et très fédérateur, elle sera reprise dans les boîtes et les clubs pour enfants.

"Titre camping"

"Il y a une saisonnalité dans la façon dont les radios font leur playlist", note également Laurent Rossi, qui évoque "la recherche du titre camping". Les playlists sont bouclées le 15 juin. "Le bon timing du tube de l'été, c'est donc février pour commencer à en parler, avril pour les premiers passages, et un pic d'airplay [ndlr: de passages en radio] en juillet", précise Laurent Rossi. Mais là non plus, la règle n'est pas gravée dans vinyle. "Si Rihanna arrive le 15 juin avec une bombe atomique, il y a de fortes chances que ce soit le tube de l'été", ajoute-t-il.

Ce n'est donc pas un hasard, si un titre comme Cheerleader, du Jamaïcain Omi, très dansant et dynamisé par son remix, sort maintenant. "L'année dernière, rappelle Thomas Joubert, TF1 avait calculé pour que le titre de Kendji, Color Gitano soit le tube de l'été, juste après sa victoire à The Voice, début mai".

Dimension sexuelle

"Un morceau devient un tube de l'été partir du moment où le public s'en empare", précise Thomas Joubert. C'est un titre "universel", mais qui peut avoir une dimension sexuelle. "Ce n'est pas gênant, tant qu'on ne comprend pas les paroles", avance Laurent Rossi, qui ajoute en riant que "si la moitié des Français comprenait le portugais, le titre de Michel Telo, Ai se eu te pego (Ah si je t'attrape), ne passerait pas".

Enfin le tube de l'été, à l'inverse de l'amour du même nom, peut lui durer. Un peu. "Le bon tube de l'été peut durer jusqu'à Noël", assure Laurent Rossi qui cite Asaf Avidan, Shakira, Maître Gims, Black M ou Sexion d'Assaut, spécialistes de ce genre de performances. Tous sont capables de sortir "un bon track", qui s'est "construit avant l'été, a fait un tube de l'été, a duré à la rentrée, avec un 'switch' derrière, qui permettait d'aller jusqu'à Noël".

On n'en a donc vraisemblablement pas fini avec Omi, Kendji et David Guetta.

Magali Rangin
https://twitter.com/Radegonde Magali Rangin Cheffe de service culture et people BFMTV