Comment les canicules et le réchauffement climatique vont changer la mode

Alors que les prochains étés s'annoncent de plus en plus chauds, la mode et les collections à venir semblent s'orienter vers des vêtements plus adaptés.

D'ici quelques années, vos armoires seront peut-être remplies de vêtements "oignons", composés de plusieurs couches. "On a déjà des designers qui travaillent là-dessus", explique Vincent Grégroire, directeur prospectives chez NellyRodi, un cabinet de conseil spécialiste du secteur des "industries créatives". Ce chasseur de tendances voit aussi l'émergence des vêtements convertibles, telle une veste dont les manches se retirent ou un pantalon qui se transforme en short.

"C'était déjà dans les recherches mais là c'est une tendance claire: des vêtements confortables qui peuvent s'adapter aux brusques changements de température."

Après un été 2022 de tous les records, la mode se prépare ainsi aux effets du réchauffement climatique. "C'est une problématique qui est identifiée depuis longtemps", assure à BFMTV.com Thomas Zylberman, styliste senior et tendanceur chez Carlin international. "Ça commence à être dans les priorités des marques et dans leurs plans sur plusieurs années", abonde Vincent Grégoire.

Des vêtements plus amples

"L'idée est de pouvoir s'habiller et se déshabiller facilement", résume Sébastien Renault. Directeur artistique du bureau de tendances Promostyl, il remarque déjà une évolution du vestiaire vers des vêtements pratiques et aérés. Il évoque notamment l'arrivée de baskets ajourées voire nu-pieds.

"On remarque que les collections s'inspirent de l'outdoor, du trekking. On voit déjà que les consommateurs se tournent de plus en plus vers des vêtements légers, par exemple ceux qu'on trouve dans les magasins de sport."

Du point de vue de la coupe, place aux modèles amples. En clair: fini les vêtements qui corsètent et qui compriment - même si nos spécialistes concèdent que le legging a encore de beaux jours devant lui. "On ne veut plus être étriqué ou se sentir à l'étroit comme au début des années 2000", observe encore Sébastien Renault, de Promostyl. Il devine même une tendance "monacale": des vêtements plus fluides, plus longs et moins ceintrés.

"On a déjà vu apparaître cet été des tuniques ou des chemises larges. Le formel va devenir urban, le vestiaire va se détendre avec par exemple plus de matières élastiques, comme le stretch."

Vincent Grégoire, de NellyRodi, formule une prophétie similaire: "On va de plus en plus travailler sur les possibilités de circulation d'air, comme avec des échancrures sous les bras, des vêtements ajourés." Thomas Zylberman, de Carlin international, pronostique dans la même veine l'avènement de l'oversize.

"C'est typiquement la grande veste surtaillée unisexe qui fonctionne dans toutes les saisons, traduction parfaite de cette tendance du vêtement ample qui protège de la chaleur et laisse circuler l'air."

Techwear et fibres naturelles

Du côté des matières, Vincent Grégoire, de NellyRodi, repère deux courants qui vont s'imposer dans les années à venir. D'un côté, le techwear - c'est-à-dire des vêtements qui incorporent des matériaux techniques et innovants. Comme ce textile composé de fibres synthétiques couplé à des nanoparticules et à du Teflon qui réfléchit la lumière.

Et de l'autre, un retour en force des fibres naturelles, particulièrement le lin et le chanvre, plus écologiques et moins gourmands en eau. "On est en train de redécouvrir leurs propriétés", confirme Thomas Zylberman, de Carlin international. Des matériaux particulièrement intéressants à l'heure du changement climatique: ce sont des matières respirantes, antibactériennes et qui absordent l'humidité. "Ce sont d'excellents thermorégulateurs", poursuit Sébastien Renault, de Promostyl.

L'autre tendance forte, c'est le recours aux matières recyclées. "Tout le monde s'y met", approuve-t-il. Cuir végétal fabriqué à partir de déchets de fruits, baskets en bouteilles recyclées, semelles en caoutchouc de pissenlit, vêtements en ananas...

Quant aux collections à venir, elles s'annoncent moins marquées entre l'hiver et l'été. "C'est déjà le cas aujourd'hui, certaines collections d'été commencent à ressembler à l'hiver et l'hiver à l'été", constate encore Thomas Zylberman, de Carlin international. "D'ailleurs, les collections auront un spectre très large pour répondre à toutes les amplitudes thermiques."

https://twitter.com/chussonnois Céline Hussonnois-Alaya Journaliste BFMTV