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"Emmanuelle" débarque sur Netflix: pourquoi ce film érotique des années 70 est culte

L'affiche du film Emmanuelle, en 1974.

L'affiche du film Emmanuelle, en 1974. - Parafrance Films

Quarante-six ans, presque jour pour jour après sa sortie en salles, le film érotique Emmanuelle arrive sur Netflix. Un film qui a marqué l'histoire du cinéma.

"Mélodie d'amour chantait le cœur d'Emmanuelle"... Même ceux qui n'ont jamais vu le film ont entendu parler de son aura sulfureuse et connaissent l'emblématique photo avec le fauteuil en rotin. Emmanuelle, le film érotique de Just Jaeckin, sorti en France le 26 juin 1974, arrive ce 1er juillet sur Netflix.

Rien ne prédestinait Emmanuelle "la plus longue caresse du cinéma français", comme le vante la bande annonce, à devenir culte. Sorti l'été 74 dans quelques salles, ce récit des tribulations sexuelles d'une jeune femme à Bangkok est réalisé par Just Jaeckin, photographe de mode qui travaille pour la presse féminine, et dont c'est le premier film, avec un budget de 500.000 dollars.

Succès fulgurant

Sylvia Kristel, qui incarne Emmanuelle, est un jeune mannequin néerlandais de 22 ans. Et Pierre Bachelet qui signe la chanson du générique n'a encore composé ni Elle est d'ailleurs, ni Les Corons, ses grands tubes. Ni même la musique des Bronzés. Le seul nom connu du film est celui Jean-Louis Richard, scénariste pour Truffaut, qui signe l'histoire.

Et pourtant le film connaît un succès aussi fulgurant qu'inattendu. Dans la France post-pompidolienne, c'est une révolution. Le film, qui échappe à la censure, grâce au nouveau ministre de la Culture du gouvernement Giscard d'Estaing, va être vu en salles par 11 millions de spectateurs, et rester à l'affiche pendant 13 ans sur les Champs Elysées. 350 millions de spectateurs dans le monde ont vu les ébats d'Emmanuelle.

"Je ne peux pas dire que ce soit un film génial, racontait Sylvia Kristel en 2007. Mais c'était le bon moment. C'est devenu comme un monument à Paris. Les Japonais étaient trimballés en bus à la Tour Eiffel, à l'Arc de Triomphe, et à Emmanuelle".
La première affiche du film "Emmanuelle", en 1974.
La première affiche du film "Emmanuelle", en 1974. © Parafrance Films

"Heureuse interdiction"

Le film tombe en effet à pic, dans une société plus libérée, et profite même en 1975, de la loi instaurant le classement X. Elle rend Emmanuelle et son contenu simplement érotique, plus accessible au public en quête d'émoi.

Effet collatéral du succès du film, le fameux fauteuil, à l'origine un trône polynésien en rotin ou en osier, rebaptisé "fauteuil Emmanuelle", devient une pièce incontournable dans les foyers des années 1970.

Emmanuelle est tiré d'un livre devenu un classique de la littérature érotique, signé Emmanuelle Arsan, femme de diplomate d'origine thaïlandaise, publié en 1959. Et interdit, ce qui a contribué à son succès.

"Voici, transposé à l'écran, le best-seller de la littérature érotique de ces dernières années, Emmanuelle, auquel une heureuse interdiction à l'affichage dans les librairies avait assuré un succès de scandale, en lui conférant le goût secret de l'interdit", écrivait Le Monde en 1974, avant de livrer une critique féroce du film, qualifié de "mélange d'exotisme et de sexualité, sur lequel est plaqué un fatras de philosophie embrumée, comme on en fait à l'heure du dernier whisky dans les salons de la société".

Le physique de jeune fille pure de son héroïne, incarnée par Sylvia Kristel, y est aussi pour quelque chose. Mais si le film a fait d'elle une star, l'actrice Sylvia Kristel aura du mal à évoluer. Marquée par ce premier rôle, qu'elle reprendra dans Emmanuelle l'antivierge, l'année suivante, puis dans Goodbye Emmanuelle en 1977, Sylvia Kristel peine à mener carrière au cinéma. Bombardée icône sexuelle, l'actrice joue ensuite dans L'amant de Lady Chatterley, toujours sous la direction de Just Jaeckin.

Elle tourne aussi pour Chabrol, Francis Girod ou Roger Vadim. " J'ai fait des films qui n'étaient pas très érotiques, bizarrement ils n'ont pas marché", livrait-elle non sans humour à Libération qui lui consacrait un portrait en 2004. Elle s'est éteinte en 2012. Son personnage, devenu mythique, lui survit. Et s'apprête à conquérir sur Netflix, de nouveaux adeptes qui n'ont pas connu les années 1970.

Magali Rangin
https://twitter.com/Radegonde Magali Rangin Cheffe de service culture et people BFMTV