BFM Paris Île-de-France
Paris Île-de-France

Remarques, insultes... À Saint-Denis, des archéologues visées par des outrages sexistes

Ces femmes, mobilisées sur le chantier de recherches préalables aux travaux de réaménagement du site, subissent fréquemment les propos inappropriés de voyeurs. Aucune plainte n'a été déposée à ce jour, malgré les incitations de la municipalité.

Dans la rue, dans les transports publics et, donc, sur les chantiers. En France, les outrages sexistes surviennent partout. Et ils sont particulièrement récurrents: le ministère de l'Intérieur en recensait 2300 en 2021, presque 1000 de plus que l'année précédente.

Depuis plusieurs semaines, les archéologues à pied d'œuvre sur la place Jean-Jaurès, à Saint-Denis (Seine-Saint-Denis), en sont la cible. Ces femmes participent aux fouilles conduites par l'Institut national de recherches archéologiques préventives (Inrap) et l'unité d'archéologie de la ville de Saint-Denis, préalables aux travaux de réaménagement du site. Des recherches qui impliquent un travail au sol et des positions accroupies ou allongées, et des tenues adaptées aux fortes chaleurs.

Il n'est pas rare que ces archéologues subissent des remarques ou des insultes "à caractère sexiste et sexuel", fustige Oriane Filhol, adjointe à la mairie de Saint-Denis, chargée de la lutte contre les discriminations, au micro de BFM Paris Île-de-France.

"Des patrouilles ont été diligentées"

Elles émanent bien souvent d'hommes, de voyeurs qui les interpellent à travers les grilles du chantier, mais aussi, parfois, de femmes. On lance à ces archéologues, "comme si c'était une réalité, que c'est un métier pour les hommes et qu'elles devaient rentrer à la maison".

Interrogé par Actu.fr, Claude Héron, directeur de l’unité d'archéologie de Saint-Denis, confirme des cas de "harcèlement à caractère sexiste".

"La police a été prévenue. Des patrouilles ont été diligentées, et un rappel à la loi urbi et orbi a été fait", complète-t-il.

Pour sa part, la municipalité dit avoir "réagi immédiatement pour faire en sorte que, sur leur lieu de travail, dans le cadre de leur activité, elles (les archéologues, NDLR) se sentent protégées".

La vidéoprotection pour identifier les suspects

À ce jour, aucune plainte n'a été déposée par les victimes de propos déplacés. "On les invite à le faire, en disant qu'il y a le cadre de la loi, donc c'est pénalement répréhensible", assure Oriane Filhol.

Depuis le 1er avril, l'outrage sexiste "aggravé" est considéré par la justice comme un délit, tandis que le montant de l'amende a été revu à la hausse.

"C'est aussi pour ça qu'on invite à appeler la police dès qu'il se passe quelque chose, soutient l'adjointe à la mairie de Saint-Denis. Grâce aux caméras de vidéoprotection, on peut retrouver facilement les personnes autrices. Porter plainte contre des hommes harceleurs, ça doit aboutir."

Une campagne de sensibilisation lancée

En attendant d'éventuelles suites judiciaires, la mairie a enclenché une campagne de sensibilisation, intitulée "Adoptez le bon comportement". Des affiches ont ainsi été aposées sur les grilles encadrant le chantier.

"Nous vous demandons de respecter le travail des femmes archéologues qui travaillent chaque jour sur ce chantier de fouilles, peut-on lire. Nous vous rappelons que tout manque de respect à leur égard fera l'objet d'une dénonciation et de poursuites comme le prévoit la loi."

Si certaines affiches ont été arrachées et jetées au sol, Oriane Filhol note que les cas de harcèlement ont cessé après le lancement de la campagne de sensibilisation.

William Helle avec Florian Bouhot