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Paris: imbroglio autour d'un théâtre populaire, la mairie embarrassée

Un théâtre (photo d'illustration)

Un théâtre (photo d'illustration) - Benjamin Thompson - Flickr

Habitat Social Français (HSF), filiale de la Régie immobilière de la ville de Paris (RIVP), veut que Graines de Soleil renonce à son bail pour lancer un appel à manifestation d'intérêt (AMI).

Une compagnie parisienne est menacée d'expulsion du Lavoir moderne parisien, seul théâtre du quartier populaire de la Goutte d'Or, par un bailleur social à la main de la mairie de Paris, qui en 2020 avait préempté le lieu afin de le sauver.

"Un non-sens juridique et moral": c'est ainsi que la compagnie Graines de soleil résume, mercredi dans un communiqué, sa "situation kafkaïenne" qui "interroge quant à la politique culturelle de la ville de Paris, prête à sacrifier le seul théâtre du quartier prioritaire de la Goutte d'Or".

"Une forme d'acharnement"

Salle de spectacle construite dans les années 1960 à l'emplacement d'un ancien lavoir décrit par Zola dans "L'Assommoir", Le Lavoir moderne parisien (LMP) avait été sauvé de la spéculation immobilière en 2020 par la mobilisation de la compagnie, soutenue par de nombreuses personnalités, et son rachat après préemption par la Ville.

Mais depuis, Habitat Social Français (HSF), filiale de la Régie immobilière de la ville de Paris (RIVP), veut que Graines de Soleil renonce à son bail pour lancer un appel à manifestation d'intérêt (AMI) qui décidera du nouvel occupant.

Julien Favart, co-directeur de Graines de soleil, dénonce à l'AFP "une forme d'acharnement" après "plus de quatre ans de lutte" pour sauver le site. "On nous dit: bravo, on est très fiers de vous, maintenant on va vous mettre en concurrence".

"Une situation compliquée"

Interrogée par l'AFP, la Ville défend sa "volonté de mise en concurrence, au même titre que tous les lieux culturels exerçant une activité commerciale", afin de faire respecter l'"égalité de traitement entre les acteurs culturels parisiens".

Le travail de la compagnie "n'a jamais été remis en question", souligne aussi la Ville qui rappelle soutenir l'association par une subvention.

L'adjoint aux transports David Belliard, qui avait soutenu la mobilisation de Graines de soleil en 2020, quand il était le candidat des écologistes aux municipales, se retrouve lui aussi embarrassé... avec sa double casquette de président de la RIVP.

"HSF répond juridiquement à une situation compliquée", explique l'élu écologiste qui rappelle l'objectif du bailleur de "réhabilitation du lieu", avec la construction de six logements sociaux.

"Il n'y pas de volonté de faire partir, a priori, cette compagnie", dit-il prudemment, ajoutant vouloir, en tant qu'élu écologiste, "qu'une solution soit trouvée pour permettre à Graines de Soleil de continuer à faire son activité dans des locaux réhabilités".

Sa collègue Anne-Claire Boux, autre adjointe écologiste de la maire PS Anne Hidalgo, a dit à l'AFP son "incompréhension de cette situation" et de la "position de la Ville".

"Âme" du Lavoir, Graines de soleil est aussi un "symbole de la culture en quartier populaire, qui donne leur chance aux artistes qui viennent de tous les milieux", souligne cette adjointe justement en charge de la politique de la ville.

S. B. avec AFP